1.2.3. Le capital social
Même si le concept de capital social n'est pas nouveau,
il connaît depuis le milieu des années 90 un regain
d'intérêt considérable dans toutes les disciplines des
sciences humaines et sociales. S'inscrivant dans une volonté
scientifique d'étudier les phénomènes sociaux pour
comprendre et améliorer le système économique et social,
la notion intéresse un certain nombre d'auteurs. A commencer par Pierre
BOURDIEU (cité par ZENOU, 2009), qui a introduit le concept de capital
social à travers une définition dite « structurelle et
relationnelle »13. En effet, selon lui le capital social
est « l'ensemble des ressources, actuelles ou virtuelles, qui
reviennent à un
13 Qualificatifs employés par Benoît
ZENOU (2009), dans sa thèse intitulée « Le Capital Social
comme un Potentiel d'Interaction Coopérative : le cas des Relations
Intergénérationnelles Familiales ».
13
individu ou à un groupe du fait qu'il
possède un réseau durable de relations, de connaissances et de
reconnaissances mutuelles plus ou moins institutionnalisées,
c'est-à-dire la somme des capitaux et des pouvoirs qu'un tel
réseau permet de mobiliser » (BOURDIEU, cité par ZENOU,
2009). Pour l'auteur, le capital social fait l'objet d'une accumulation
individuelle et doit être entretenu pour ne pas se
déprécier.
Toutefois, l'engouement scientifique international pour le
capital social ne débute réellement qu'à partir des
travaux de James COLEMAN (cité par ZENOU, 2009). COLEMAN aborde
davantage le capital social par ses effets et en donne une définition
dite « fonctionnelle et institutionnelle »14. Il
considère ce capital comme un bien public qui peut être
mobilisé par les agents pour satisfaire leurs propres besoins. Il est le
premier à présenter le capital social comme un ensemble
d'institutions limitant les coûts de transaction et organisant les
rapports sociaux. Les approches de BOURDIEU (1986) et de COLEMAN (1990) sont
dites « individuelles », puisqu'elles se basent sur
l'individu comme moteur de la mobilisation du capital social.
PUTNAM (1993), quant à lui, mène des recherches
portant sur le capital social « collectif » et consacre
ainsi l'intérêt de l'étude de cette notion comme un enjeu
économique et politique. Ses recherches sont faites en Italie et les
résultats présentent le capital social comme l'un des
déterminants de la performance de l'implémentation des politiques
en Italie. Il définit le capital social en tant que «
dimensions de l'organisation sociale, tels la confiance, les normes et les
réseaux, capables d'améliorer l'efficacité de la
société en facilitant l'action concertée »
(PUTNAM, 1993).
Cependant, toutes ces considérations du concept de
capital social ont entretenu le flou sémantique qui entoure la notion et
l'impossibilité de pouvoir rigoureusement en proposer une
définition. De plus, il y a une confusion qui est faite entre le capital
institutionnel et le capital social. ZENOU (2009), tenta de proposer une
définition plus aboutie du capital social, tout en différenciant
le capital social de celui institutionnel. En effet, ZENOU énonce que :
« il nous apparait essentiel de ne pas placer les institutions
(formelles ou informelles) dans la définition même du capital
social, c'est-à-dire comme des composantes » (ZENOU, p.87,
2009). En utilisant un raisonnement par l'absurde, ZENOU démontre
qu'inclure le capital institutionnel dans la définition du capital
social « conduit à de nombreuses contradictions et rend
imprécis le concept de capital social » (ZENOU, p.87, 2009).
Selon cet auteur, le capital social est « [...]
14 Qualificatifs employés par Benoît
ZENOU (2009), dans sa thèse intitulée « Le Capital Social
comme un Potentiel d'Interaction Coopérative : le cas des Relations
Intergénérationnelles Familiales ».
14
un potentiel d'interaction coopérative,
c'est-à-dire comme un ensemble de ressources qui permettent à un
individu d'accéder aux ressources de son partenaire pour qu'elles
puissent satisfaire ses besoins ». Dans la suite de son travail, il
considère l'entité familiale, et les relations entre les
générations pour prouver que le capital social peut être
transféré ; si bien que le capital social est en plus «
un constitué de ressources relationnelles transmissibles entre les
générations » (ZENOU cité par PAUL, 2011).
Cette recherche s'inspire des travaux de ZENOU, mais dans le
cadre plus large de l'ethnie15. Ce choix est dû d'une part,
à la prise en compte dans ces travaux, d'un ensemble de relations entre
les âges et, d'autre part, au lien fait entre capital social et
économie. Ainsi, il a été considéré qu'au
sein d'une ethnie, chaque enfant (au sens large, c'est-à-dire
descendant) bénéficie des ressources relationnelles et non
relationnelles16 de son père ou de son grand père,
qu'il utilise pour accéder aux ressources des autres membres de
l'ethnie, afin de satisfaire ses objectifs de maximisation du cheptel. Ce qui
induit, ceteris paribus, la performance de certains bénéficiaires
des transferts d'animaux dans l'activité d'élevage du fait de
leur appartenance à un groupe social donné, notamment l'ethnie.
Notre but n'est pas de rechercher à démontrer une fracture
sociale, mais plutôt de mettre en évidence des atouts en
matière d'élevage existant dans certaines ethnies, pouvant
être dupliqués dans les autres groupes ethniques.
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