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Intégration économique régionale et dynamique de la croissance économique dans la sous région de la sadc: approche par modèles des données de panel. de 1990 à  2013.

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par Prince TAFUTENI BITAKI
Université de Kisangani - Licence 2015
  

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1.1.2. Etat de lieux de l'intégration économique régionale en Afrique

Dans une logique d'accroissement des flux commerciaux, la coopération économique régionale est présentée depuis les années 1960 comme la solution aux problèmes de développement dont souffrent les pays pauvres et singulièrement ceux de l'Afrique Subsaharienne (ASS). Elle recouvre plusieurs formes allant de simples coopérations sectorielles aux transferts de souveraineté (Hugon, 2001). C'est ainsi que l'acte constitutif de l'Union Africaine a fixé comme objectif ultime à cette organisation l'intégration économique et politique du Continent. Il réaffirme la stratégie de mise en place de la Communauté Economique Africaine par convergence progressive des espaces et schémas d'intégration des Communautés Economiques Régionales -CERs, avec pour finalité de « bâtir une Afrique intégrée, prospère, en paix, et constituant une force dynamique sur la scène mondiale». En dépit des progrès enregistrés au cours des deux dernières décennies par certaines CERs, et dans divers domaines de coopération, le rythme de mise en oeuvre des objectifs est jugé globalement lent, eu égard aux nombreux défis de

5 De Bornier J.M., « Hayek, philosophe de l'économie ? » in Economies et Sociétés FE, n°45, décembre 2011, pp.13-25.

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développement du continent et aux mutations de l'environnement économique international.

L'intégration peut prendre plusieurs formes. Autrefois considérées comme successives et complémentaires (Marshall, 1966), ces formes cristallisent aujourd'hui des processus contradictoires entre autre l'intégration par les mouvements de capitaux qui cherche à promouvoir une uniformité des règles de gestion tant au niveau des firmes qu'au niveau des Etats. L'intégration par la production qui exige la disponibilité de ressources et de conséquences spécifiques que seuls peuvent livrer des territoires différenciés par leurs systèmes de formation et d'innovation. L'intégration monétaire qui implique l'utilisation d'une monnaie unique entre divers Etats d'un bloc dans le but d'optimiser les échanges internes dans la zone c'est le cas des pays de la CEMAC. L'intégration par les règles d'harmonisation et la règle du protectionnisme minimum et enfin l'intégration par le marché qui est l'abolition des barrières nationales dans les transactions entre les Etats membres d'un bloc, afin que les facteurs de production circulent librement au sein de la zone.

La théorie standard du commerce international souligne les gains statiques procurés par une meilleure spécialisation de chaque pays participant à l'échange qui voit son revenu national s'accroître (modèle Hecksher-Ohlin à 2 pays, 2 facteurs, 2 biens par exemple). Dans le meilleur des cas, l'effet statique est cependant modeste. De plus, dans le cas d'un grand pays qui influe sur la détermination des prix au niveau mondial, la libéralisation unilatérale peut avoir un impact négatif (Verdier, 2004).

Dans le cadre des nouvelles théories du commerce international, l'existence d'externalités implique que le commerce international ne profite pas nécessairement à tous les pays participant à l'échange. En présence de rendements croissants, un pays plus efficient peut en effet ne pas pouvoir entrer sur le marché d'un produit du fait de la présence d'un second pays qui dispose d'une rente de situation sur ce produit (Krugman et Obstfeld, 1995).

Les théories de la croissance endogène (Romer, 1986, Grossman et Helpman, 1991) ont mis en évidence l'existence de gains dynamiques (avec un impact sur la croissance du revenu et non plus seulement sur son niveau), liés en particulier aux économies d'échelle (hypothèse de rendements croissants) et à la diffusion du progrès technique favorisée par le commerce (pour un Survey sur ce thème, voir Fontagné et Guérin, 1997). Cependant, ces gains ne sont pas garantis et des modèles inspirés de ces nouvelles théories montrent que l'ouverture peut pousser les pays concernés vers une spécialisation dans des secteurs peu

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dynamiques avec au total un impact négatif sur la croissance (Rodriguez et Rodrik, 2000). L'exemple des PED spécialisés dans l'exportation de matières premières dont la demande est peu porteuse montre que ces modèles sont bien adaptés à l'expérience de nombreux pays, sachant que la théorie de la baisse tendancielle des termes de l'échange pour les produits primaires en vogue dans l'après-guerre (Prebish, 1950) allait également dans le sens d'une moindre croissance pour les pays exportateurs de ces produits.

En effet, un mécanisme d'intégration régionale est un accord préférentiel entre un groupe de pays, visant à réduire les obstacles aux transactions économiques et non économiques entre ces pays. Ce mécanisme peut revêtir des formes aussi diverses allant d'une simple zone d'échange préférentiel en passant par la zone de libre-échange, l'union douanière, le marché commun jusqu'à l'union économique et même politique, chaque étape progressive se caractérisant par l'incorporation des mécanismes plus ambitieux comme indiqué au tableau 1 ci-après.

Tableau 1. Arrangements institutionnels en matière d'intégration économique

Type

d'arrangements

baisse de

tarifs

entre
membres

libre
échange

entre
membres

politique
commerciale
commune

mobilité
des
facteurs

politiques fiscales et monétaires communes

un seul

gouvernement

zone d'échange
préférentiel

x

 
 
 
 
 

zone de libre
échange

x

x

 
 
 
 

union douanière

x

x

x

 
 
 

marché commun

x

x

x

x

 
 

Union

économique

x

x

x

x

x

 

union politique

x

x

x

x

x

X

La question centrale qui intéresse les économistes est celle de l'impact effectif de l'intégration régionale sur le bien-être, sur la modification de la structure tant de consommation que de production des pays membres ainsi que sur les flux d'investissements directs entre ces pays eux-mêmes et en provenance de l'étranger. Les accords régionaux de commerce sont une forme particulière de libéralisme commercial comportant un aspect discriminatoire. La constitution d'une union douanière, par exemple, peut avoir des effets de création et de détournement de commerce dans les pays membres. Etant donné que les firmes faisant partie d'un processus d'intégration pourront avoir accès à un marché plus vaste, une analyse

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complète de l'intégration se doit également de considérer l'impact de celle-ci sur le degré de concurrence, les marges et les prix pratiqués ainsi que sur les gains dynamiques sous forme d'une innovation accrue de la part des firmes ainsi mises en concurrence6

Évaluant le mouvement d'intégration économique en Afrique7, la Commission Économique pour l'Afrique soutient que l'intégration et la coopération régionale peuvent, en effet, aider les pays africains à remédier à la taille réduite des marchés nationaux, stimuler la concurrence entre pays membres, mobiliser davantage des ressources d'investissement, favoriser le partage de connaissances et la mise en commun de certaines ressources (par exemple les cours d'eau), promouvoir la paix et la sécurité, accroître la capacité collective de négociation et la visibilité dans les arènes internationales. En dépit de différences en matière de dotations en ressources, les pays africains pourraient exploiter utilement leurs avantages comparatifs, joindre leurs compétences et concevoir des solutions communes à l'allocation des ressources.

L'Afrique compte à ce jour 14 Communautés Économiques Régionales distinctes, avec 3 à 4 CER en moyenne dans chacune des cinq régions naturelles du continent : le Centre, l'Est, le Nord, l'Ouest et le Sud, comme l'indique le tableau 2 ci-après. Il est à noter en particulier que le Marché commun de l'Afrique orientale et australe - le COMESA - est à cheval entre trois régions : l'Afrique australe, l'Afrique de l'Est et l'Afrique du Nord. Paradoxalement, plusieurs pays africains appartiennent à la fois à une multitude de groupements économiques sous-régionaux, un phénomène qui est connu sous l'appellation de « the spaghetti bowl ».

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6 MUCCHIELLI, J.-L., MAYER, T., Économie internationale, Paris, Dalloz, 2005, p. 407-421.

7 Economic Commission for Africa, Assessing Regional Integration in Africa, Addis Ababa, 2004.

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Tableau 2. Les Communautés Économiques Régionales en Afrique

Régions

Communautés Économiques Régionales

Afrique de l'Ouest

Communauté pour le développement économique de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO/ECOWAS)

 

Union économique et monétaire ouest-africaine(UEMOA)

 

Union de la Rivière Mano (URM/MRU)

 

Communautés des États Sahélo-Sahariens (CEN-SAD)

Afrique Centrale

Communauté Économique des États de l'Afrique Centrale (CEEAC/ECCAS)

 

Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)

 

Communauté Économique des Pays des Grands Lacs (CEPGL)

Afrique Australe

Communauté de Développement de l'Afrique Australe (SADC)

 

Union Douanière pour l'Afrique Australe (SACU)

 

Commission de l'Océan Indien (IOC)

 

Marché Commun de l'Afrique orientale et australe (COMESA)

Afrique Orientale

Communauté d'Afrique de l'Est (EAC)

 

Autorité intergouvernementale pour le développement (AIGD/IGAD)

Afrique du Nord

Union du Maghreb arabe (UMA)

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Intégration économique régionale et dynamique de la croissance économique dans la sous-région de la SADC : analyse en modèle des données de Panel de 1990 à 2013

Figure 1. Groupement d'intégration régionale en Afrique et appartenance à des entités multiples.

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Une autre caractéristique de l'intégration économique régionale en Afrique est l'appartenance d'un pays à deux ou plusieurs organisations sous-régionales. Pourquoi un pays tiendrait-il à être membre dans plusieurs organisations sous-régionales ? Les raisons les plus immédiates et susceptibles d'expliquer l'adhésion à une communauté donnée sont:

? La proximité géographique,

? L'interdépendance économique,

? Une culture ou une langue commune,

? Des relations de coopération historiques et

? Le partage des ressources communes.

À cela, peuvent s'ajouter des raisons politiques et sécuritaires. Plus subtilement, ce serait aussi une question de positionnement stratégique. Des pays se livreraient ainsi à une certaine « géométrie variable » en fonction de circonstances du moment. Autrement dit, appartenir à plusieurs CER donne la possibilité d'une part de maximiser le bénéfice découlant du dynamisme de certains groupements et, d'autre part, de se désengager éventuellement des organisations les moins performantes. D'après une enquête de la Commission Économique pour l'Afrique8, les raisons invoquées par les pays pour rejoindre les CER sont par ordre d'importance : politiques et stratégiques (50 %), économiques (35 %), géographiques et historiques (10 %) ainsi que culturels (5 %).

L'appartenance à plusieurs CER n'est pas sans inconvénients en termes d'efforts et d'argent. Les pays membres se prêtent malgré eux à un nombre croissant d'obligations : paiement des cotisations, participation aux réunions incessantes à divers niveaux, adoption et ratification des protocoles d'accords, etc. En outre, les pays concernés s'exposent à la duplication, au chevauchement et à l'incohérence des programmes sous régionaux ; ce qui est de nature à diminuer l'efficacité de ces programmes ou à ralentir le processus même d'intégration économique.

La SADC et le COMESA figurent parmi les CER les plus performantes en Afrique, comme déjà indiqué plus haut. Au sein de la SADC, l'Afrique du Sud s'est arrogé 64 % des exportations intracommunautaires, en 2000-2007. Pour ce qui est du COMESA, 81 % des exportations proviennent des pays suivants : Kenya (29 %), Libye (15 %), Égypte (13 %), Zambie (11 %), Zimbabwe (8 %) et Ouganda (6 %). Au chapitre des importations, l'Afrique du Sud et l'Angola ont réalisé respectivement 69 % et 9 % des importations totales de la SADC.

8 Economic Commission For Africa, Assessing Regional Integration in Africa II. Rationalizing Regional Economic Communities, Addis Abeba, 2006.

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Pour le COMESA, il s'agit de l'Égypte (45 %), de la Libye (12 %) et du Kenya (9 %). Certains auteurs considèrent que le processus d'intégration régionale risque d'être fragilisé si les pays membres n'ont pas le même niveau de développement économique. Par exemple, au sein de la SADEC, il y a d'énormes disparités : «D'un côté le Mozambique, le Malawi et la Tanzanie font partie des sept pays les plus pauvres du monde; de l'autre, l'Île Maurice et l'Afrique du Sud sont en passe d'entrer dans la catégorie des pays industriels. Seule l'Afrique du Sud dispose d'un marché intérieur suffisamment grand, et au pouvoir d'achat suffisamment élevé, pour que les investissements directs dans les secteurs des biens de consommation et des biens d'investissement y soient jugés rentables.»9

La réussite du processus d'intégration régionale dépend dans une grande mesure du degré d'harmonisation des politiques économiques des pays membres, notamment en matière de tarifs, de taux d'inflation, de taux de change, de ratios de la dette publique, etc. La réalisation de la stabilité macroéconomique et de la convergence des agrégats macroéconomiques clés est une condition nécessaire pour la création d'une union monétaire. De toutes les CER auxquelles appartient la RDC, il n'y a que la SADC et le COMESA qui envisagent explicitement de mettre en circulation à terme une monnaie unique à l'usage de leurs États pays. De ce fait, elles ont édicté une série de critères de convergence macroéconomique devant être remplis préalablement à la création de leurs zones monétaires respectives. Par contre, au sein de la CEEAC, hormis la République Démocratique du Congo et Sao-Tomé et Principe, les autres pays membres font partie déjà de la Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC). Néanmoins, ils sont tous soumis au respect des critères de convergence macroéconomique applicables dans le cadre du Programme de Coopération Monétaire en Afrique (PCMA).

Cette large incertitude théorique confère une importance particulière aux travaux empiriques sur le lien ouverture-croissance, sachant qu'il est toutefois difficile de mettre en évidence empiriquement les gains de l'ouverture en termes de croissance pour les PED.

9 François Kabuya Kalala et Tshiunza Mbiye, Communautés Économiques Régionales : Quelle Stratégie D'intégration En RDC ? , Kinshasa, mai 2010, dans L'Afrique des Grands Lacs. Annuaire 2009-2010, p337

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus