CONCLUSION PARTIELLE
L'obéissance incriminée relève de toute
sorte de soumission indue ou encore de l'obéissance qui a conduit la
commission d'une infraction. L'infraction appelant l'intervention du juge
pénal, les tribunaux d'instance et d'Appel voire la Cour Suprême
se sont prononcés efficacement sur la sanction de l'obéissance.
La diversité de la jurisprudence sur cette question est remarquable.
Le juge dans sa fonction tribunitienne dissuade tout
éventuel délinquant en puissance. Mais, la délinquance par
obéissance est un peu atypique du point de vue du processus de
réalisation de l'infraction et les difficultés
d'établissement de la responsabilité des sujets qui y ont pris
part : le donneur d'ordre et l'obéissant.
Cette difficulté vient de ce que le système
pénal camerounais se limite essentiellement à la lettre de
l'article 83 C.P. qui circonscrit les faits justificatifs uniquement à
l'autorité légitime. Non seulement, ce concept est plein
d'ambigüité mais aussi son régime appelle beaucoup de
minutie dans son examen. Pourtant, dans le système pénal
français l'obéissance constitue un fait justificatif
général : c'est-à-dire que dès lors qu'il est
établi que le sujet a obéi à qui que ce soit, il
bénéficie du jeu des faits justificatifs.
La jurisprudence camerounaise est suffisamment claire sur le
fait que l'obéissance n'est due qu'à l'autorité
légale et compétente. La légitimité de toute autre
autorité n'étant qu'un compromis social et ne peut point
exonérer quiconque, par obéissance, se serait rendu coupable
d'une infraction. Mais il aurait été mieux de s'aligner sur le
chemin français ce qui nous épargnerait des analyses
difficultueuses. Toutefois, il est constant que l'obéissance est
toujours une cause d'amoindrissement de la responsabilité
pénale.
CONCLUSION GENERALE
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de lajutL6ptudeace. Page 90
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La question de l'obéissance est un sujet suffisamment
délicat dans une société en pleine effervescence comme la
nôtre. Si obéir devait toujours être un délit, il y
aurait plus de prisonniers que d'hommes libres, puisque les Hommes en
général ne sont pas égaux ; ou plus encore, on n'a pas
tous la même place ou valeur dans un service. C'est pourquoi
l'obéissance et la hiérarchie vont de paire. Alors, lorsque
l'obéissance répond à une prescription légale, la
responsabilité pénale n'est pas entamée, l'acte
délictueux est supprimé : c'est ce que le législateur
appelle les faits justificatifs. En revanche, elle est un problème
lorsqu'elle est faite en dehors de toute prévision légale.
Le droit pénal pose deux hypothèses :
l'obéissance à la loi et l'obéissance à
l'autorité légale. Pour l'obéissance à la loi,
c'est le fait d'agir sous l'ordre de la loi. La loi autorise dans certaines
circonstances et selon certaines modalités des agissements qui portent
atteinte à la liberté individuelle, et du coup, il n'y a
aucunement infraction.
Il est à ce point édifiant de constater que
seule l'autorité légale est habilitée à donner des
ordres et est d'ailleurs la seule à qui obéissance doit
être due ; c'est ainsi que l'obéissance constitue un fait
justificatif à l'endroit de celui qui s'est rendu coupable d'une
infraction en exécutant sans excès de zèle son ordre.
Malgré cette clarté législative, on en
arrive à confondre toujours les concepts d'autorité légale
et d'autorité légitime.
En effet, même si la loi attribue au père, chef
de famille des pouvoirs allant dans la gestion et l'orientation du
ménage ; ou encore, fait du chef d'entreprise le grand manitou en lui
octroyant de grands privilèges et pouvoirs sur ses employés par
la consécration du lien de subordination, il est de pur détail
que ceux-ci ne détiennent de ce fait aucune parcelle de puissance
publique.
Quelle que soit la situation où les sujets remettent
à l'un d'entre eux des privilèges pour présider à
leurs destinées, le fait que sa suprématie ne soit pas
contestée lui apporte une simple légitimité qui n'a rien
à voir avec la légitimité de l'article 83 C.P. . Et ainsi,
elle est autorité privée. Pour ainsi dire, les ordres
donnés seront illégaux et c'est ce contre quoi le droit
pénal moderne s'insurge.
Mais il faut noter que depuis toujours, le combat contre la
vassalité, l'exécution des ordres illégaux a
commencé avec la condamnation des rapines.
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Le droit pénal moderne a estimé que
l'obéissance à l'autorité constitue un fait justificatif
et les juges sont unanimes sur l'exonération de qui s'est plié
aux ordres de l'autorité légale.
Un problème surgit lorsqu'on sait que le chef de
famille, l'employeur jouissent d'une légitimité suffisamment
forte mais que les effets ne sont les mêmes comparativement à
l'autorité légale. En effet, même si les sujets qui
entourent l'autorité privée lui doivent obéissance, il
faut reconnaître que ceci ne constitue en rien un fait justificatif mais
plutôt peut engendrer des circonstances atténuantes en cas
d'infraction.
Les juges ont veillé à ce que ce genre
d'obéissance soit réprimé avec la dernière
énergie, les peines variant selon les convictions individuelles. Il faut
avouer qu'ils ont été plus sévères qu'au temps du
préteur TERENTIUS LUCULLUS203.
Cependant, nous pensons que si le législateur a
expressément remis des pouvoirs au mari notamment la direction de la
famille, la soumission de l'épouse, l'obéissance des enfants. Et
au chef d'entreprise, les pouvoirs de direction, de gestion et le pouvoir
réglementaire sans oublier la signification du lien de subordination, il
fallait bien que l'obéissance à ces derniers soit
génératrice de fait justificatif parce que leurs pouvoirs sont
élaborés et déterminés par la loi, bien que civile,
et ne sont point contestés : d'où le diptyque
légalité et légitimité. Hormis les cas d'abus. Le
législateur a été très restrictif et, nous pensons
que la loi visant l'autorité légitime est un terme qui devrait
être pris au sens large. Vivement que l'extension des faits justificatifs
soit faite aux autorités privées telles que l'employé et
le chef de famille comme en France à partir de la théorie de
l'obéissance passive. Cette théorie qui crée une excuse
absolutoire pour toute personne qui se serait pliée aux ordres de
n'importe quelle autorité n'existe pas dans notre système
pénal qui ne se borne qu'aux circonstances atténuantes et excuses
atténuantes.
203 Célèbre juge reconnu pour son tact et sa
perspicacité, mentionné par CARBASSE, précité ; p.
23.
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