Chapitre I : L'allégation de poursuites
discriminatoires
Soulignons que, l'UA ne conteste pas la compétence de
la CPI en Afrique pour la simple raison qu'elle s'avère plus que
nécessaire pour freiner certaines velléités et dissuader
la commission de crimes graves, mais conteste le fait que cette
compétence ne se limite qu'au seul continent africain, que les
règles prévues par le Statut ne s'appliquent que pour les crimes
de ce continent. D'autres responsables de crimes internationaux (les
États-Unis pour les crimes commis en Irak et l'Angleterre pour les
crimes commis en Afghanistan) sont aussi bien que les africains coupables des
mêmes crimes, mais ces derniers ne sont pas inquiétés. Il
apparaît plus que légitime de se demander pourquoi certains
mériteraient plus que d'autres d'être traduits en justice quand
bien même les faits reprochés heurtent des valeurs communes,
partagées par l'ensemble de la Communauté internationale.
Pour les dirigeants africains comme pour l'UA, la justice
devrait être la même pour tous, qu'importe le pays dont on est
ressortissant, or il semblerait qu'au niveau de la CPI, l'État auquel
appartient l'auteur a une influence sur l'exercice des poursuites. Toutefois,
si discrimination il y' a, de quelle nature est-elle et sur quoi l'UA
s'appuie-t-elle pour porter une telle accusation ? Il serait judicieux pour
répondre à cette question, d'analyser les éléments
qui renforcent cette impression que la Cour n'exerce exclusivement sa
compétence qu'en Afrique (Section I) en créant
ainsi par ricochet
8A.MELCHIADE MANIRABONA, Vers la
décrispation de la tension entre la Cour pénale internationale et
l'Afrique: quelques défis à relever, (2011) 45 (2) Revue
Juridique Thémis
9Pacifique MANIRAKIZA, AFRICAN JOURNAL OF LEGAL
STUDIES ( 2009) , L'Afrique et le système de justice pénale
internationale, p21-52, Voir p.32
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une apparence de partialité qui met à mal sa
crédibilité. Il n'en demeure pas moins que ce blâme
mériterait d'être tempéré car la Cour n'est pas
entièrement à l'origine du sens de son activité en Afrique
(Section II).
Section I/- L'exclusivité de poursuites actuelles
en Afrique
Pourquoi toujours l'Afrique ? Ainsi s'exprime, par la forme
interrogative, la revendication première de l'UA. Un but commun
réunit ces deux instituions à savoir la lutte contre
l'impunité que l'on retrouve aussi bien dans l'acte constitutif de
l'Union Africaine (article 4(h) et 4(o)) que dans le préambule du Statut
de Rome. Si elles convergent dans les idéaux défendus, elles
divergent quant à l'application de la justice. De nos jours, le monde
fait face à des crimes d'une violence extrême naissant de conflits
armés, de crises politiques, des guerres etc...mais l'Afrique reste le
continent où les poursuites sont le plus exercées par la Cour
alors que la plupart des crimes graves qui interpellent la communauté
internationale et qui restent impunis ont été commis sur le
continent africain principalement par des africains et contre des non
africains, mais pas exclusivement10. Même si l'Afrique est un
continent conflictogène, elle n'en n'a pas
l'exclusivité11 et rien, même pas le Statut ne justifie
que l'action de la Cour se concentre plus sur cette partie du monde.
Ainsi le fait que l'action de la Cour ne soit dirigée,
à l'heure actuelle, que sur l'Afrique donne lieu à un état
de fait irréfragable (Paragraphe I) alors même
que des situations africaines auraient pu permettre à la Cour de
connaître des affaires non-africaines et de faire sortir la Cour du
conflit qui l'oppose actuellement à l'UA (Paragraphe
II).
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