II/ Interprétation des données
L'analyse de ce qui a été avancé par les
enseignants peut mettre en évidence certains éléments des
représentations sur l'exercice du métier et sur l'apprentissage,
l'enseignement, le rôle de l'enseignant et de l'apprenant dans
l'apprentissage. Ces éléments peuvent être
résumés dans les points ci dessous :
- Certains enseignants, du fait qu'ils attendent qu'on leur
montre comment faire, qu'on leur crée les conditions pour travailler, et
du fait qu'ils ne se remettent pas en question et ne responsabilisent que les
autres (responsables, élèves...) de l'état de
l'enseignement, laissent penser qu'ils sont des personnes passives dans
l'exercice de leur métier. Ils semblent aussi, qu'ils manquent
d'autonomie dans leur action et ne se considèrent pas comme des acteurs
ni comme des responsables pouvant intervenir (positivement ou
négativement) sur leurs pratiques ou sur leurs conditions de leur
travail. Ce qui est fort lien de la pratique d'un professionnel.
Ce manque d'autonomie et cette passivité pourraient
être considérés comme des obstacles à la
professionnalité (Astolfi, 2003).
- Les réflexions sur l'implantation de la
réforme reflètent aussi la conception qu'ils ont sur leur
rôle en tant qu'enseignant. Ils semblent qu'ils se considèrent
plus comme des exécutants des instructions officielles. Mais de quelles
instructions officielles s'agit-il ? Comment interprètent-ils et comment
comprennent-ils ces instructions ?
- S'occuper de l'apprenant, selon certains enseignants, est
plus utilisé dans le sens affectif que dans le sens de l'apprentissage.
Les enseignants parlent surtout de leurs relations avec les
élèves. Même ceux qui ont parlé du travail en
groupe, ils ne l'utilisent pas dans le but de créer des conditions de
conflits cognitifs mais plutôt dans le but de pouvoir diviser le nombre
des élèves en petits groupes et arriver ainsi à mieux
expliquer son cours et mieux répondre aux questions du plus grand nombre
d'élèves. Selon un enseignant, le travail en groupe ne fait
travailler que les bons élèves. Ceux-ci répondent aux
activités alors que les faibles ne font aucun effort, ils attendent
qu'on leur « dicte » les réponses correctes.
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- L'enseignement correspond plus à une explication du
cours et à une vérification de sa compréhension par le
biais d'un questionnement posé à l'élève par
l'enseignant que ce soit dans le cours et au contrôle continu.
- L'enseignant est satisfait de ses stratégies et c'est
à l'élève de faire l'effort pour comprendre ce qui a
été avancé dans le cours.
- Pour certains enseignants, un examen en fin d'année
ainsi qu'un retour à la punition permettraient aux élèves
de s'intéresser aux cours et de s'engager dans leur travail.
- Les enseignants s'intéressent surtout aux
élèves qui veulent travailler.
- À partir des réponses des enseignants, nous
pouvons supposer que ces enseignants ne se posent pas le problème d'un
manque ou d'une mauvaise compréhension ou même d'une absence de
compréhension due à des obstacles existant chez les
élèves ou à l'utilisation de démarches ne leur
convenant pas. Toujours, c'est la non-motivation et le refus de s'engager dans
leur propre formation que les enseignants reprochent aux
élèves.
- Les enseignants interviewés donnent de l'importance
en premier, au savoir programmé à transmettre. En second, ils
pensent aux conditions nécessaires pour cette transmission, que ce soit
au niveau de l'enseignement de l'enseignant ou de son rôle dans la classe
ou que soit de l'apprentissage de l'élève, de son comportement ou
de son travail en classe ou chez lui. Ces enseignants s'intéressent
à la manière de transmettre le savoir programmé et non
à ce que doit maîtriser l'élève ni à comment
l'aider à construire ses connaissances.
- Pour ces enseignants, les élèves sont encore
en état d'apprentissage, spécialement ceux du lycée
collégial. Il faut leur montrer surtout quoi faire.
- Dans la phase de préparation de cours, qui est une
phase décisive pour le déroulement du cours,
l'élève n'est pris en considération que dans un but de
contrôle que ce soit au début ou à la fin. L'importance est
donnée au savoir à présenter et parfois au contrôle
de compréhension de ce savoir par les élèves. L'enseignant
s'intéresse à ce qui doit être transmis et à comment
le transmettre et non à ce qui doit être construit par l'apprenant
ni à comment permettre sa construction.
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- Les pré-acquis semblent ne pas être
considérés comme des éléments sur lesquels on peut
construire d'autres connaissances. Ils semblent être
considérés comme des connaissances auxquelles on ajoute, au
dessus, d'autres connaissances.
De ces différents éléments, nous pouvons
supposer que l'enseignement correspond à une transmission d'un savoir
pré élaboré de la part de l'enseignant à
l'élève. L'activité de l'enseignant consiste plus en
l'explication et la vérification de la compréhension du cours.
L'élève dans ce cas, est appelé à comprendre et
à travailler selon les attentes de l'enseignant et de l'examen. Son
apprentissage consiste en une mémorisation du cours et un savoir faire
pour traiter des exercices et des problèmes. Utiliser le brouillon ou
laisser le temps aux élèves pour faire des activités, ou
les faire travailler en groupe, semblent être utilisés comme des
routines, sans une réflexion sur le pourquoi ni leur
intérêt dans l'apprentissage de l'élève.
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