Paragraphe 1 : L'attractivité d'investissements
directs étrangers (IDE) au Tchad
Les institutions publiques sont naturellement l'un des
déterminants essentiels de la compétitivité des
entreprises, de leur capacité et volonté d'investir. Un
environnement défavorable en la matière conduit à des
surcoûts de production qui ne sont pas supportables dans un contexte de
globalisation marqué par l'intensification de la concurrence à la
fois sur le territoire national et, bien-sûr, sur les marchés
tiers. L'État est donc un acteur de toute première importance. La
façon dont il remplit ses tâches régaliennes en termes de
sécurité des personnes, des biens et de fourniture de services
publics marchands et non marchands affecte directement la rentabilité
privée des entreprises et, par conséquent, les décisions
d'investissements97.
1-1: La politique économique
La politique macroéconomique, d'ouverture et de
privatisation a pour but d'attirer les firmes multinationales.
? La politique budgétaire
La mise en oeuvre d'un programme économique
signé en juillet 2013 avec le FMI a permis d'améliorer
l'orientation budgétaire du pays. Ses résultats positifs ont
conduit à l'approbation par le FMI d'un accord triennal au titre de la
facilité élargie de crédit (FEC), pour un montant total
équivalant à 79.92 millions de DTS (environ 122.4 millions de
dollars), le 1er août 2014. Sa bonne exécution a permis
d'atteindre le point d'achèvement de l'Initiative Pays Pauvres
Très Endettés (PPTE) au cours de l'année
201598. La réalisation de cet objectif a permis au Tchad de
bénéficier d'une réduction de sa dette de près de
850 millions de dollars, selon les estimations du FMI. La consolidation
budgétaire s'est poursuivie tout au long de l'année 2014, comme
l'atteste l'évolution du déficit primaire hors pétrole
rapporté au produit intérieur brut (PIB) hors pétrole, qui
est ainsi passé de 20,1% du PIB hors pétrole en 2010 à
17,6 % et 16% du PIB hors pétrole respectivement en 2013 et
201499. La loi de finance rectificative a pris en compte des
dépenses d'investissement, notamment celles
97 BAD. (2012), Environnement de
l'investissement privé au Tchad, p. 17.
98 Rapport PNUD 2015.
99 Idem
50
liées à l'organisation programmée du
sommet de l'Union Africaine en 2015 et des dépenses en matière de
sécurité. La baisse des recettes pétrolières
générée par celle de la production de pétrole,
ainsi qu'un accroissement du service de la dette pour faire face au
remboursement d'une avance sur les ventes de pétrole et d'un emprunt
obligataire contracté en 2013, ont également été
pris en compte dans la loi de finance rectificative de 2014.
La mise en oeuvre d'un plan visant à toiletter le
fichier de la solde des fonctionnaires a été engagé en
2014. Il permettra de réaliser une économie annuelle pouvant
aller jusqu'à près de 17 milliards francs CFA. L'organisation
d'une table ronde sur le financement du gap du PNUD (2013-15) et du programme
national de sécurité alimentaire (PNSA) en juin 2014 a permis
d'enregistrer des promesses de financement de plus de 1 000 milliards francs
CFA, donnant ainsi plus de cohérence avec la programmation
budgétaire du pays et aussi davantage de visibilité en
matière de financement, notamment pour les programmes d'actions
prioritaires (PAP) retenus dans ce plan. La bonne exécution du PNUD est
l'un des éléments clés pour atteindre le point
d'achèvement de l'initiative PPTE. Par ailleurs, au sujet de la
transparence de la gestion pétrolière, des efforts ont
été réalisés via l'initiative pour la transparence
dans les industries extractives (ITIE). Ils ont permis au Tchad d'obtenir la
conformité à la norme ITIE en octobre 2014.
? La politique monétaire
Bien que disposant d'instruments variés pour soutenir
et orienter l'investissement productif, les orientations de la politique
monétaire du Tchad sont déterminées par la Banque des
États de l'Afrique Centrale (BEAC), du fait de son appartenance à
la zone franc. Constituée de trois zones monétaires: les Comores,
l'Union Monétaire Ouest-Africaine (UMOA) et l'Union Monétaire
d'Afrique Centrale (UMAC), à laquelle le Tchad appartient, la zone franc
permet aux États membres de bénéficier d'un système
de taux de change fixe mais ajustable, d'une garantie illimitée
accordée par le trésor français aux monnaies émises
par les différentes institutions régionales d'émission,
d'une centralisation des réserves de change et d'une liberté de
transfert des capitaux. En ce qui concerne le Tchad, la BEAC, via son
comité de politique monétaire (relayé au niveau national
par le comité monétaire financier) définit les grandes
orientations de la politique monétaire et la gestion des réserves
de change.
La politique monétaire conduite en zone CEMAC vise deux
objectifs au moyen de l'utilisation des taux d'intérêt comme
instrument de la régulation monétaire : d'une part le taux
d'intérêt d'appels d'offres, dit TIAO et d'autre part à
maîtriser l'inflation et à conforter le niveau de parité du
franc CFA/euro. Son niveau a été abaissé au cours de
l'année 2014,
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passant de 3.25 % en octobre 2013 à 2.95 % en juillet
2014, afin de soutenir l'activité économique de la
sous-région par la mise en oeuvre d'une politique monétaire
accommodante, sur le modèle de celle conduite par la Banque Centrale
Européenne (BCE). Les avoirs extérieurs nets ont
enregistré une baisse de près de 4.5 % entre fin décembre
2012 et fin décembre 2013, notamment en raison de la baisse des
exportations de pétrole. Cette tendance pourrait s'accentuer avec la
baisse du prix du pétrole observée sur le marché
international en 2014. Sur l'ensemble de l'année 2013, le taux
d'inflation au Tchad s'était établi à 0.2 %, largement en
deçà de la norme communautaire de 3 % fixée dans le cadre
du pacte de convergence de la zone CEMAC. En 2014, toutefois le taux
d'inflation est remonté à 2.9 %, selon les estimations, en raison
notamment d'une moins bonne campagne agricole et de la fermeture de la
frontière avec le Nigéria, qui affecte le commerce
intracommunautaire100.
? La politique d'endettement
L'endettement est considéré comme un obstacle
aux IDE car il est une source d'incertitude, de la même manière
que la politique économique est aussi incertaine avec un taux
d'endettement élevé. Les risques combinés d'inflation et
d'imposition réduisent l'investissement. Cependant, le paiement du
service de la dette réduit l'excédent des ressources domestiques
susceptibles d'être consacrés aux investissements. Cette situation
décrédibilise l'image du pays à l'échelle
internationale. Ainsi, Borensztein (1990, p.315) pense que pour les
investisseurs domestiques, l'existence d'une dette très
élevée réduit le rendement futur des investissements car
une proportion très élevée du profit sera utilisée
pour le paiement de la dette101. En effet, un taux d'endettement
modéré est considéré par les investisseurs comme un
signe de bonne gestion et partant, susceptible d'attirer plus d'IDE.
Dans le cadre du programme signé avec le FMI en vue de
l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative PPTE,
l'évolution de la dette fait l'objet d'une attention
particulière. Afin d'en contrôler son évolution, des
changements ont été effectués dans son suivi. Tout projet
de prêt doit désormais être examiné par la commission
nationale d'analyse de la dette (CONAD), présidée par le ministre
des finances et du budget et appuyée par l'équipe tchadienne
d'analyse de viabilité de la dette (ETAVID).Les missions de cette
commission sont les suivantes : définir une stratégie nationale
d'endettement et de désendettement et évaluer les offres de
financement. L'atteinte du point d'achèvement de l'initiative de
désendettement doit permettre au Tchad de réduire
significativement le risque
100 Idem
101Ibrahim NGOUHOUO. (2008), Les
investissements directs étrangers en Afrique centrale:
attractivité et effets économiques, thèse de
doctorat en Sciences économiques, Université du Sud Toulon-Var,
France, p. 59.
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élevé de surendettement constaté par le
FMI dans sa dernière analyse de la viabilité de la dette, en
août 2014, et de bénéficier ainsi d'une réduction de
la dette évaluée à près de 850 millions de dollars.
L'évolution récente de la dette, tant externe qu'interne, se
caractérise par une tendance à la hausse. La dette publique
extérieure a ainsi atteint 23.5 % du PIB en 2013, contre 20.3 % du PIB
en 2012, et elle est estimée à 27.1 % du PIB en 2014
102 . L'augmentation de ce ratio s'explique essentiellement par le
recours à des prêts commerciaux relativement importants au cours
de l'année 2013. Pour sa part, la dette publique intérieure est
passée de 7.7 % en 2012 à 8.3 % en 2013, en raison notamment de
l'émission d'emprunts obligataires sur le marché régional
et des prêts contractés auprès de certains pays de la
CEMAC.
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