5.2.4.1. Le
développement d'un nouvel esprit associatif : les GIC
L'une des formidables formes d'adaptations aux multiples
mutations dans l'Ouest Camerounest le développement de GICqui fait suite
au décret autorisant la création des organisations paysannes. Il
s'agit là des « organisations à caractère
économique et social des personnes physiques volontaires, ayant des
intérêts communs et réalisant à travers le groupe
des activités communes »21(*). Ce sont là de nouveaux organismes
paysans d'encadrement de faible importance. En effet, le développement
des GIC va accentuer l'esprit d'entraide et le travail communautaire. Ainsi,
dans la pratique, les tâches des GIC sont aussi variées que leurs
objectifs. Les paysans faisant partie d'un GIC se relayent par exemple dans la
création des parcelles, dans le labour, le repiquage, les
récoltes et le transport.En bref, dans tous les travaux qui entourent la
production et la commercialisation des différentes spéculations.
De plus, ces structures traditionnelles jouent un rôle d'encadrement non
moins important auprès de la communauté des paysans. C'est ainsi
qu'ils sont considérés comme « des
véritables écoles de formation des
paysans » (Elong J. G., 2005).En plus de
cet effort communautaire, il faut noter que ces GIC reçoivent de l'aide
multiforme venant de l'État. Cette aide allouée aux GIC peut
être soit des dons de matériels agricoles, des semences
améliorées, ou encore l'encadrement des paysans aux nouvelles
pratiques et techniques. (Fig.32.) On voit s'aperçoit que
35,29% des jardiniers enquêtés sont membres d'un
GIC. Toutefois, on remarque une prédominance de l'individualisme chez
les jardiniers car jusqu'à 64,70% de jardiniers ne
sont pas membres d'un GIC (Fig. 31). Cette situation s'explique par deux
éléments : d'abord une bonne partie des jardiniers
enquêtés a affirmé ne pas avoir les informations
nécessaires sur la procédure de création des GIC ;
ensuite,d'autresont justifié leur non adhésion aux GIC par le
fait qu'ils se sentent plus à l'aise lorsqu'ils pratiquent leur
activité de façon individuelle.
Figure 31 : Appartenance
aux GICs
Source : Enquête de terrain, janvier
2013
Figure 32: Nature de l'aide de l'État aux
GIC
5.2.4.2. Mode d'acquisition
des parcelles L'importance monétaire de la culture de la tomate
a favorisé la mise en place d'une nouvelle forme d'économie
rurale. Cette dernière étant fondée en grande partie sur
la location des parcelles de cultures. Le rendement financier de cette
spéculation a en effet induit une augmentation considérable de
demande en terres. Les terres, qui jadis étaient dans la région
des propriétés familiales et donc se transmettaient par le biais
de l'héritage, connaissent un tout autre sort. La masse
considérable de néo-maraîchers, qui sont jeunes pour la
plupart, combinés au produit des migrations (migrants de retour) et au
poids démographique, entraine une rareté de terres pour la
pratique du maraîchage. La conséquence immédiate est le
développement de la location et de l'achat de parcelles comme modes
d'accès à la terre pour la pratique de la culture de la
tomate.(Fig.33)
Source : Enquête de terrain, janvier
2013
Figure 33: Modes d'accès à la
terre
La figure 33 montre le
mode d'accès à la terre de la population enquêtée.
Il ressort de ce graphique que 43,13% de la population
pratiquant la culture de la tomate la pratique sur une propriété
qu'elle loue. Il faut également préciser que la location des
terres varie considérablement en fonction qu'on se trouve en zone rurale
ou en zone périurbaine. De ce fait, on a constaté que celle-ci
était très développée dans les espaces
périurbains à l`instar de Tsoutsang ou encore de
Titia et Siteu, tous situés dans le
groupement Foto. Contrairement au groupement Fotetsa, espace essentiellement
rural où la location de la terre n'est pas encore répandue. Le
second constat est que cette location varie également de la zone rurale
à la zone périurbaine de la ville de Dschang. Pendant que les
parcelles en zones rurales se louent soit en nature (partie des
récoltes) soit suivant des montants variant entre 5000
FCFA et 15 000FCFA par campagne agricole, la
location en zone périurbaine est essentiellement monétaire et les
prix varient selon la localisation (bas-fonds, bas de versant, versant) et
selon la saison et peuvent atteindre la fourchette de 80 000
FCFA à90 000 FCFApar saison agricole
suivant la taille de la parcelle. (Kounchou, 2008).La valeur
des bas-fonds a considérablement accru. Ils constituent des espaces
très prisés du fait de leur facilité de mise en culture,
de ses sols hydromorphes et surtout de la disponibilité en eau,
véritable pilier de la culture de la tomate. L'irruption des
néo-maraîchers disposant d'un capital financier important a
favorisé la multiplication de l'achat comme mode d'accès aux
parcelles de cultures. De ce fait, 13,72 % des jardiniers ont
accédé à la terre par achat. Ce mode d'accès
à la terre témoigne du développement d'une
véritable économie rurale fondée sur l'investissement.
5.2.4.3. Modes de financement de
l'activité
La provenance des moyens financiers
nécessaires au démarrage de l'activité varie d'un
jardinier à l'autre. Néanmoins, la synthèse des
réponses nous a permise de constater que le mode de financement dominant
chez les jardiniers demeure l'épargne personnelle.
40,2% des jardiniers affirment que l'argent indispensable pour se
lancer dans la culture de la tomate est un apport personnel. La famille
constitue également pour 9,8% des jardiniers, un
créancier non négligeable. Le prêt et les tontines (marque
de fabrique de la population de l'Ouest) y sont également
utilisés comme moyens de financement de l'activité avec
respectivement 5,9% et 36,3%.La micro-finance
qui est quand même développée dans l'arrondissement (une
quinzaine d'établissements de micro-finance) constitue une très
faible source de financement de jardiniers. On se rend bien à
l'évidence que l'entraide (familiale, par les tontines ou par les
prêts chez des particuliers) et l'épargne personnelle constituent
à 93,2% les modes de financements des projets
agricoles. Démontrant ainsi ce que Dongmo a
appelé en 1981 « le dynamisme
bamiléké ». Il convient toutefois derappeler au
regard du tableau9que le financement par la micro-finance n'est pas l'apanage
des femmes. Cette situation permet d'établir une corrélation
entre le niveau d'étude et l'accès au financement
parlamicro-finance. On a donc pu constater dans cette population de jardiniers
que les femmes sont moins instruites que les hommes, raison pour laquelle elles
n'ont véritablement pas accès au financement de la micro-finance.
Outre les garanties exigées pour obtenir un prêt, le manque de
confiance des institutions de micro-finance vis-à-vis des femmes rurales
et les taux de remboursement élevés ne permettent pas massivement
aux femmes d'avoir des microcrédits. (Fokam, 2003 ; Djamen,
2005 ; Bouyo, 2005). De plus, on a constaté que la
proportion des jardiniers qui utilise la micro-finance comme mode de
financement de leur activitéa soit un niveau supérieur, soit un
niveau secondaire dans une moindre mesure.
Tableau 9: Provenance des fonds pour le financement de
l'activité
36
21
8
6
6
77
35, 3%
20, 6%
7, 8%
5, 9%
5, 9%
75, 5%
5
16
4
25
4, 9%
15, 7%
0
0
3, 9%
24, 5%
41
37
8
6
10
102
40, 2%
36, 3%
7, 8%
5, 9%
9, 8%
100, 0%
Effectif
Effectif
Effectif
Homme
Femme
Sexe
Total
Épargne
Personnelle
Tontines
Micro-fina
nces
Prêt
Apport familial
Provenance du capital pour
l'investissement
Total
Source : Enquête de terrain,
janvier 2013
* 21 Définition
tirée de la loi du 14 Avril 1992, qui instituait les organisations
paysannes.
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