B. La perplexité autour de l'appartenance du
droit à l'eau comme droit social ou comme droit de
solidarité.
Une seconde difficulté se présente puisque la
cour assujetti le droit à l'environnement et implicitement le droit
à l'eau à la catégorie des droits dit « de
troisième génération ».
Cette catégorie des droits de l'Homme est
particulièrement controversée, et ajoute en difficulté
à la lisibilité du droit à l'eau. Les droits dit « de
troisième génération » autrement appelés
droits de « solidarité »229 est une
catégorie des droits de l'Homme développée
essentiellement par K. Vasak à laquelle on adjoint
généralement le droit à la paix, au développement
et à l'environnement, mais aussi le droit des minorités etc. Ces
droits ont pour titulaire non pas des individus mais un groupe dont
l'individualité des membres s'est effacée au profit du groupe.
C'est une catégorie assez difficile à appréhender, raison
pour laquelle elle a été abondamment critiquée,
étant considérée moins comme un droit humain
que comme un ensemble de revendications. Il en fait est assez
étonnant que la Cour ait usé de ce terme (bien qu'il ait
été postulé que les droits de solidarité
étaient le propre des pays
en développement23°) dans sa
décision. L'étude de l'entièreté de sa
décision nous permet de comprendre qu'elle fait en fait
référence au droit au développement durable. C'est la
raison pour laquelle elle y englobe le droit à un environnement sain
(donc dans la logique jurisprudentielle, le droit à l'eau). Ce qui pose
cependant une difficulté conceptuelle. Le droit à l'eau est
entendu au niveau international comme un droit social. D'ailleurs d'autres
arrêts de la Cour confirme qu'elle lie le droit à l'eau aux DESC
notamment lorsqu'elle
reconnaît le droit à l'eau en vertu de l'article
47 (le droit à la santé) ou dans l'arrêt Delhi Water
Supply & Sewage vs State Of Haryana où elle le décrit
comme un bien social. Ainsi il semble y avoir une division dans la
jurisprudence indienne. Deux hypothèses sont plausibles. La Cour en
consacrant deux approches du droit à l'eau permet d'élargir sa
22sNIVARD (C.) La justiciabilité des droits sociaux:
étude de droit conventionnel européen, op. cit. p.62
229CULLET (P.) Droits de solidarité en
droit international, Etude entreprise dans le cadre d" une bourse d"
étude et de recherche du Conseil de 1" Europe dans le domaine des droits
de 1" homme, 1993, p.11
2solbib, p. 16
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définition et par la même son contentieux, ce qui
est étend également sa justiciabilité. Il est
également plausible que la Cour n'ait pas entendu donner une si grande
portée à l'eau. Dans ce cas, le droit à l'eau est un
fondement juridique de son argumentation et ce n'est pas à dessein
qu'elle a progressivement développé sa justiciabilité
à travers divers aspects de son contentieux. Cette seconde
hypothèse, sans que nous ne puissions l'affirmer, permettrait de
justifier les incohérences entre les différentes approches
qu'elle a du droit à l'eau (le droit à une potable et le droit
à une eau salubre).
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