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Analyse de la politique d'exemption de paiement des soins en Cote d'Ivoire: cas de la politique de la gratuite ciblee des soins dans le district sanitaire de Tiassale 120 km d'Abidjan

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par Romain YOHOU
Université Senghor d'Alexandrie - Master II Santé internationale 2015
  

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3.1.1.3 Stratégies de mise en oeuvre des exemptions de paiement

A. Stratégie de choix des cibles et de la politique

Les initiatives d'exemption dans la plupart des pays concernent une population spécifique Il s'agit en général :

- des femmes enceintes

- des enfants de moins de 5 ans

- des personnes vivant avec le VIH/SIDA.

Dans les pays d'Afrique francophone le choix a été porté sur une abolition catégorielle (ex. Mali, Niger, Burkina Faso), certainement à cause de l'histoire des politiques de recouvrement des coûts, tandis que certains pays anglophones ont opté pour des suppressions de paiement plus universelles (ex. Ghana, Ouganda, Afrique du Sud). Le rôle des bailleurs de fonds et leur volonté de soutenir les pays dans l'atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement en 2015 n'est certainement pas sans avoir influencé les choix des pays pour l'abolition catégorielle, notamment pour les pays dont le financement de la santé dépend en partie de ces bailleurs.

B. Stratégies de gestion

B.1 Remboursement

Le remboursement aux formations sanitaires est le mode de financement des politiques d'exemption majoritairement utilisé par les pays concernés. Il prend en compte les actes réalisés et les médicaments distribués. Au Niger, de 2006 à la fin de l'année 2010, le taux de remboursement était seulement de 49% (Médecins du monde, 2011). Ce remboursement peut se faire au forfait comme au réel.

B.1.1 Remboursement au forfait 

C'est le système qui a été adopté au Ghana15(*) et au Sénégal16(*) notamment pour certains actes tels que les césariennes dans les hôpitaux régionaux. Le forfait consiste à couvrir les dépenses des formations sanitaires qui sont ensuite remboursées par l'Etat. Dans nombre de pays, la base du forfait avait été mal calculé (Ridde et al. 2011,) ce qui a poussé certains à opter pour un remboursement sur la base des dépenses réelles (factures). [1]

B.1.2 Remboursement au réel 

C'est le remboursement qui se fait sur présentation de factures ou autres documents de gestion. Le Sénégal, dans le cadre du plan Sésame, a opté pour un remboursement au réel. Au Burkina Faso, on est passé d'un système de remboursement forfaitaire à un système de remboursement au réel.

B.1.3 Remboursement par contribution des ONG

Dans certains cas, des ONG sont intervenues comme des tiers payeurs, c'est-à-dire que les patients bénéficient gratuitement des soins et les formations sanitaires sont ensuite remboursées par l'ONG (Ex HELP au Burkina Faso, MSF au Mali).

Dans d'autres cas, le remboursement s'est fait sous forme de dons de médicaments et matériel médical, ce qui a permis d'éviter des pénuries.

B.2 Problèmes liés au remboursement

B.2.1 Délais de remboursement

Plusieurs difficultés ont été relevées dans le processus de remboursement aux structures .En effet, qu'ils aient été réels ou forfaitaires, les remboursements étaient le plus souvent très tardifs, parmi les causes probables de retards on pouvait citer :

- les erreurs de comptabilité par manque de formation (cas du Niger).

- La lourdeur administrative.

- les aléas du passage d'un mode de financement à un autre [3] cas du Burkina Faso

- l'imprédictibilité de l'environnement financier cas du Ghana

- l'insuffisance de financement. [1] cas du Sénégal.

Au Niger par exemple, ces retards de remboursement ont réduit les capacités des COGES (comité de gestion) à renouveler les stocks de médicaments et ont perturbé le fonctionnement de l'Office national de produits pharmaceutiques et chimiques (ONPPC)17(*) principale centrale d'achat du médicament du pays.

C : Stratégies de communication

Les expériences des différents pays ont montré généralement un déficit de communication et des difficultés de compréhension des politiques d'exemption, que ce soit au niveau du personnel de santé qu'au niveau des usagers.

Au niveau du personnel :

Les personnels de santé semblaient méconnaître les différents aspects des politiques d'exemption, tels que :

- les modalités de remboursement (Burkina Faso, Ghana) ou d'allocation des médicaments. Ex : des kits d'accouchement et de césarienne (Sénégal et Cote d'Ivoire)

- les services et actes exemptés et ceux qui ne le sont pas (Burkina Faso, Mali)

- les taux de remboursement (Ghana, Côte d'Ivoire), etc.

Dans de nombreux pays, aucun financement ou presque n'a été prévu pour la vulgarisation de l'information aux formations sanitaires. De plus, les personnels de santé n'ont que rarement été formés aux nouvelles procédures ou nouveaux outils de gestion mis en place. Au Maroc, 87% des prestataires de soins estimait n'avoir reçu aucun document explicitant la gratuité, contre seulement

6.12% qui ont reçu une formation au cours des ateliers18(*).

Au niveau des usagers

Dans la plupart des pays, les masses populaires ont été informées à travers divers types de médias. Au Maroc, 76.47% estiment être au courant de la gratuité de la césarienne et de l'accouchement grâce à un financement de la stratégie de communication [15].Par contre au Burkina Faso, «le budget de communication planifié dans la stratégie nationale n'était que de 2% du budget de mise en oeuvre et de plus les affiches utilisées étaient en français alors que la majorité de la population est analphabète19(*) .

D : Stratégies de suivi / évaluation / coordination

Les outils de suivi et d'évaluation n'ont pas suivi le programme de mise en place des politiques. Iles n'étaient pas développées, donc indisponibles au niveau des structures sanitaires. Cela a entrainé des données difficilement utilisables, du fait de l'incomplétude des supports de gestion. La conséquence a été, des ruptures de stock en intrants et en médicaments. En outre, les activités de suivi et de supervision ont été rarement menées [14].

Au Niger par exemple, deux structures ont été mises en place : une chargée de la coordination de la politique au niveau central et un comité de pilotage et de suivi de la gratuité de soins : Ces deux comités se réunissent depuis 2010 mensuellement. C'est la cellule de la gratuité qui organise des missions de supervisions.

Au Mali, en plus d'un comité de pilotage, un point focal national et des points focaux des directions régionales de la santé et des établissements de la santé ont été créés.

Au Burkina, aucune structure n'a été créé de façon spécifique par faute de moyens, les supervisions des prestataires se sont faits de manière intégrée c'est-à-dire des supervisions intégrant plusieurs thèmes.

E : Stratégies de participation communautaire

Les connaissances disponibles concernent brièvement les expériences du Burkina Faso, du Niger et du Sénégal. Ces expériences montrent que les comités de gestion ont été impliqués dans les politiques d'exemption pour diverses procédures.

- Au Burkina Faso

Les comités de gestion ont en charge la reproduction des outils de suivi, et donc de leur prise en charge financière, ce qui n'est pas sans susciter leur mécontentement20(*).

- Au Niger, les comités de gestion sont impliqués dans la gestion administrative de la politique et dans la gestion des médicaments21(*).

- Au Sénégal, les comités de santé ont été impliqués dans la diffusion de l'information auprès des différents acteurs22(*).

F : Stratégie de prise en charge des patients et référence

Dans la plupart des pays, les circulaires instaurant la politique d'exemption des soins sont restés imprécises sur la prise en charge des évacuations au cours des urgences ou des références .Dans les pays où le transfert gratuit a pu être instauré, (état d'urgence au Burkina et 60 ans au Sénégal) , des difficultés liées aux choix des bénéficiaires ont été signalées .Ces difficultés étaient dûs aux pièces d'état civil peu fiables et l'appréciation de l'état d'urgence ou d'une complication .immédiate. Cette situation a eu pour conséquence des retards dans la prise en charge.

3.1 :4 Motivation / satisfaction du personnel de santé

Au Ghana23(*), au Burkina Faso, au Mali et au Niger, les études ont rapporté que le personnel de santé a apprécié globalement la politique d'exemption de paiement des soins ; cependant, il est resté peu motivé. Au Sénégal cet état d'esprit a été aussi constaté.

Au Burkina, la démotivation était le fruit d'une surcharge de travail ressentie par les soignants, du fait des charges administratives supplémentaires.

Au Niger et au Sénégal, c'était plutôt l'impact négatif de la politique sur les revenus du personnel. En effet, le personnel a parfois vu ses ressources financières diminuer du fait de l'exemption. Dans le cas du Sénégal, le personnel de santé semblait réticent à assurer la prise en charge gratuite des accouchements et césariennes, puis des personnes âgées.

En Côte d'Ivoire, le certificat d'étude de spécialité en gynécologie étant payant par conséquent les gynécologues s'attendaient toujours à une rétribution particulière à cause de la gratuité des césariennes.24(*).

3.1 :5 Relation soignant / usager

Au début de la politique d'exemption de paiement, de bonnes relations entre soignant et usager ont été signalées dans plusieurs pays notamment, au Ghana, Sénégal [1]. Ces relations finiront par se dégrader par la suite du fait de l'absence des fonds, du manque de clarté dans la mise en oeuvre de la politique de gratuité de soins et des multiples ruptures de stock de médicaments dans les structures. En Côte d'Ivoire, des cas d'interpellation et de violence à l'endroit des prestataires ont été observés.

3.1 :6 Satisfaction des usagers

Au Burkina Faso, au Niger, au Mali comme au Ghana, les usagers ont favorablement accueilli la décision de rendre les soins gratuits. Au Burkina Faso comme au Ghana, ils rapportaient que cela leur permet d'anticiper et de réduire les dépenses, ce qui représente un gain pour la famille. Toutefois, ils se plaignaient des pratiques illicites des professionnels de santé .Au Mali, les usagers disent avoir perdu confiance en certains personnels de santé. [16] [17]

Il ressort de notre revue de littérature que les politiques d'exemption ont rencontré beaucoup de difficultés dans leur mise en oeuvre. Certains auteurs ont même affirmé « [...] ces mesures ont été décidées dans une grande précipitation. La décision a été politique avant d'être technique, annoncée soudainement et de façon publique, prenant à court et par surprise, non seulement les agents sur le terrain, mais aussi les techniciens des ministères. » (Olivier de Sardan & Ridde 2012).Si ce point de vue est partagé par plusieurs acteurs avisés, il faut reconnaitre que de grandes variations ont été observées d'un pays à un autre.

* 15 ASANTE, F. Chikwama et DANIELS, C. A. and Armar-Klemesu, M. (2007) Evaluating the economic outcomes of the policy of fee exemption for maternal delivery care in Ghana. Ghana Medical Journal, vol. 41, no 3.

* 16 WITTER, Sophie, DIENG, Thierno, MBENGUE, Daouda, et al. The national free delivery and caesarean policy in Senegal: evaluating process and outcomes. Health Policy and Planning, 2010, vol. 25, no 5, p. 384-392.

* 17 Rapport Ministère de la santé publique république du Niger, cellule de la gratuité

* 18 Ministère de la santé au Maroc, enquête sur la santé de la mère et de l'enfant 2003-2004 Papfemm 2004 70P

* 19 Dsf, cellule de suivi de la subvention, rapport de suivi de la politique, 2008.

* 20 ) Ridde V, Bicaba A. Revue des politiques d'exemption /subvention du paiement au Burkina

Faso. La stratégie de subvention des soins obstétricaux et néonataux d'urgence. Ouagadougou

(Burkina Faso); 2009:42.

* 21 Ministère de la santé publique du Niger, Rapport de la revue annuelle

* 22 Ministère de la santé publique du Sénégal, bureau du conseil technique et du suivi, condition et procédures de mise en oeuvre du plan de solidarité «sésame» 2008

* 23 Witter, S., Armar-Klemesu, M, &Dieng T (2008) National fee exemption schemes for deliveries (vol.24,pp167-198) Antwerp ITGPress

* 24 drkkouakou.blogspot.com

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand