1.1.2 Le réseaux d'insertion des migrants en Afrique de
l'Ouest
La théorie du réseau migratoire
considère la migration comme un système d'acteurs sociaux qui
favorise la transmission de ressources (informationnelles, relationnelles ou
statutaires) à l'intérieur d'une structure à forte
cohésion. Les liens d'entraide, qui relient les migrants, les migrants
de retour et les non migrants à la fois dans les pays de départ
et de destination, ont alors pour fonction principale de minimiser les
coûts et les risques de la migration, grâce aux différentes
formes d'appui qu'ils apportent au migrant (BOYD, 1989 ; ZLOTNIK, 1992). Les
premiers migrants constituent des ressources pour les candidats futurs à
l'émigration : les réseaux qu'ils constituent forment un
« capital social sur lequel les personnes peuvent s'appuyer pour
trouver un emploi à l'étranger » (HUGO, 1981).
« Une fois un certain seuil atteint, l'expansion des réseaux
réduit les coûts et les risques de l'émigration, ce qui
provoque une hausse du taux d'émigration, et qui à son tour
renforce les réseaux, etc. » (MASSEY et al.,
1993).
L'analyse des réseaux migratoires révèle
que le monde de l'immigré est pluriel et les réseaux dans
lesquels il s'inscrit peuvent transcender les limites que sa communauté
d'appartenance lui a assignées. Dans le même sillage (ANTOINE,
1992 et al.) identifient trois types de réseaux dans lesquels peuvent
adhérer le migrant. Il s'agit du :
- réseau d'appartenance ou d'origine : l'ensemble
de réseaux de solidarité fondés sur une institution
sociale d'origine comme la famille, l'ethnie, la religion ;
- le réseau optionnel ou de choix : ce sont des
réseaux de solidarité fondées sur un ou des centres
d'intérêt commun à une communauté de choix comme les
associations, les clubs, les mouvements (partis, syndicats, dahira) ;
- le réseau de circonstance : la volonté
d'obtenir un bien ou un service amène bien souvent l'individu à
s'appuyer, dans certains cas, sur des réseaux avec lesquels il
n'était pas préalablement lié. Il s'agit avant tout de
stratégies opportunistes.
Le rôle des réseaux migratoires
en Afrique de l'Ouest a été largement abordé par les
auteurs. Ainsi, les réseaux familiaux sont à l'origine de
l'intensification des mouvements des populations. En effet, Les réseaux
familiaux et communautaires réduisent le coût et les risques de la
migration en facilitant la venue du migrant et en apportant un soutien
économique et social à son insertion professionnelle et
résidentielle (HARBISON, 1981; MASSEY, 1993).
ALLADATIN (2012) a montré la place centrale
du réseau familial le long du processus migratoire des
« Hloua » de la côte béninoise dans les
migrations de pêche en Afrique de l'ouest et du centre. Ce réseau
organise et structure efficacement le phénomène migratoire en
intervenant lors des étapes décisives : depuis la prise de
décision, l'organisation du voyage, le « confiage »
de la femme et des enfants du migrant, à l'établissement
résidentiel et l'insertion professionnelle dans le milieu d'accueil.
Après son insertion le migrant constitue une ressource informationnelle
et potentielle pour les nouveaux candidats à la migration. Il participe
de ce fait à la perpétuation de la migration. Pour
(NDIONE,2006) les migrants originaires du quartier
de Touba-Kaolack s'appuient en grande partie sur les membres de la
communauté mouride en pays d'accueil. Le réseau d'accueil
est d'autant plus opérationnel que les membres de la
confrérie ont installé dans presque tous les grands pays
d'immigration des « maisons de Serigne Touba »Les « maisons de
Serigne Touba » abritent ainsi toutes les manifestations
religieuses organisées par les communautés mourides
à l'étranger. Elles servent en même temps de lieu
d'hébergement temporaire aux migrants confrontés à des
difficultés d'accès à un logement. Le dynamisme des
réseaux migratoire se reflète dans l'organisation des migrants.
Dans les pays d'accueil, les migrants se réunissent au sein des
associations communautaires. Ainsi, de part et d'autre des espaces investies
les différentes pratiques transnationales de ces migrants restent-les
même. (C Boulanger et al 2011).
Selon AGIER (1981) l'insertion professionnelle des migrants
soudanais au quartier zongo de Lomé s'effectue à travers les
commerçants mai guida. C'est eux qui assurent l'insertion
résidentielle des nouveaux venus par la suite il assure l'insertion
professionnelle.
Les réseaux sont aussi indispensables
à la perpétuation de l'immigration. En Afrique Centrale,
l'immigration sénégalaise a pu s'auto-entretenir grâce
à la force des réseaux de solidarité jusqu'à la fin
des années soixante-dix. Mais, de plus en plus ces réseaux
connaissent une crise liée à la crise économique et aux
expulsions répétées au Sud. Aujourd'hui, les migrants
envisagent leur intégration sociale et professionnelle soit en termes de
pluralité de réseaux pour les anciens, soit selon une option
individualiste pour les nouveaux (BA, 1995). La formation des chaînes et
réseaux migratoires ont permis « la massification et la
"démocratisation'" de la migration ». Ces chaînes et
réseaux ont des caractéristiques d'horizontalité et de
verticalité. Les relations à l'intérieur des chaînes
et réseaux peuvent aller de relations de solidarité, de
réciprocité et de parenté à des relations
commerciales, de domination et/ou de subordination (NIETO et al 2007).
A la lumière de cette revue de littérature, il
ressort qu'une littérature abondante et diversifiée existe sur
les migrations internationales en Afrique de l'Ouest de manière
générale et sur les migrations maliennes en particulier. Cet
engouement des chercheurs s'explique par l'intérêt scientifique
de la question.
On note aussi que des travaux ont été faits sur
les migrants maliens dans certains pays africains (Ghana, RCI, Cameroun).
Toutefois, il faut déplorer qu'aucune étude n'ait
été faite sur les migrants maliens au Niger. C'est pour combler
ce vide que la présente étude trouve son intérêt
scientifique.
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