I-1-2 Emergence du problème
Dans son acception la plus large, l'épargne
désigne tout comportement qui inclut un sacrifice dans l'espoir
d'obtenir un meilleur rendement futur. Elle est définit par les
économistes comme la partie non consommée du revenu (Keynes,
1959), celle qui ne se détruit pas immédiatement. Ainsi, les
économistes considèrent que les facteurs explicatifs du
comportement d'épargne des ménages sont essentiellement
liés au taux d'intérêt (pour les néoclassique) et au
revenu (pour les partisans de Keynes). Ce qui revient à dire que, seuls
les ménages à revenu élevé peuvent épargner.
Par contre, les ménages à bas revenu c'est-à-dire les
ménages dont la situation salariale est
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précaire et instable n'ont pas la capacité de
dégager une partie de leur revenu pour le consacrer à
l'épargne.
Cette assertion économique réduit la conception
multidimensionnelle de la notion de l'épargne des ménages parce
qu'elle met en veilleuse les déterminants socioculturels de
l'épargne. Autrement dit, l'approche économique relègue au
second plan les dimensions psychologiques et sociologiques de l'épargne
dont l'importance dans la décision des ménages, dans l'acte
d'épargne, est corroborée par de nombreuses études
(Beverly et sherraden, 1999).
Ainsi donc, la sociologie appréhende l'épargne
comme un phénomène social fondé sur des croyances qui
structurent les relations sociales et orientent l'action d'épargne des
ménages. (Sindzingere, 2005). Par exemple, le fait qu'un ménage
achète une maison ou une voiture, cela est certes
considéré comme un acte de consommation ou d'investissement du
point de vue économique. Cependant, dans une orientation sociologique,
ces dépenses peuvent être prises comme des actes d'épargne
parce qu'elles reproduisent une logique légitime d'acquisition de
statut, d'identité ou de prestige social. En effet le milieu social, les
croyances et les pratiques culturelles et même religieuses influencent
les ménages quant à la décision et l'utilisation de leur
épargne. De sorte que la capacité, les enjeux et les pratiques
d'épargne des ménages varient en fonction de la stratification
sociale (si on est riche, pauvre ou dans la classe moyenne) ou de
l'appartenance socioculturelle des ménages.
C'est donc pour mieux comprendre les réalités
sociales entourant la question des déterminants sociaux de
l'épargne qu'une enquête exploratoire a été
menée auprès de 70 ménages du village d'Adjamé
Bingerville. A l'issu de cette enquête, différents constats se
sont dégagés, montrant la prééminence de
déterminants autres qu'économiques du comportement des
ménages dans leur actions d'épargne.
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