§ 2 L'intégrité de l'écrit
électronique et la conservation du contrat électronique
L'article 1316-1 du Code civil oblige les parties à un
écrit électronique à le conserver « dans des
conditions de nature à en garantir l'intégrité ».
Ainsi, il appartient aux parties à un contrat électronique de
mettre en oeuvre un procédé permettant de préserver la
preuve de leur
13 Affirmation à relativiser lorsque existe une convention
de preuve, voir infra Partie 2 Chapitre 1 Section 2
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accord dans des conditions telles que le contenu de
l'écrit électronique présenté au juge serait
identique à celui existant au jour de l'établissement de
l'acte.
Cette opération peut s'avérer délicate
lorsqu'elle suppose un ou plusieurs transferts de données
numériques car c'est notamment à ce moment qu'il existe un risque
d'altération de l'écrit.
Une telle atteinte portée au contenu de l'acte serait
fatale à la partie qui s'en prévaut car il est loisible au juge
de le rejeter au seul motif qu'il ne s'agirait pas d'un écrit
électronique au sens de l'article 1316-1 du Code civil.
La conservation renvoie traditionnellement à la notion
d'archivage défini selon un auteur comme l'opération qui « a
pour finalité d'assurer une valeur juridique aux documents de leur
établissement jusqu'au terme du délai de conservation
».14
C'est pourquoi le législateur a imposé dans
certains cas à l'une des parties au contrat l'obligation d'assurer
elle-même l'archivage du contrat électronique alors que la
directive du 8 juin 200015 ne prévoyait qu'un archivage
optionnel.
Ainsi, La loi LCEN du 21 juin 2004 a introduit un article L
134-2 au Code de la consommation aux termes duquel « lorsque le contrat
est conclu par voie électronique et qu'il porte sur une somme
égale ou supérieure à un montant fixé par
décret, le contractant professionnel assure la conservation de
l'écrit qui le constate pendant un délai déterminé
par ce même décret et en garantie à tout moment
l'accès à son co-contractant si celui-ci en fait la demande
».
Selon le décret du 16 février 2005 pris pour son
application16, ce texte applicable aux contrats de consommation
conclus par voie électronique déclenche l'obligation pour le
professionnel de procéder à un archivage du contrat conclu
lorsque son montant dépasse 120 euros. Le délai de conservation
est de 10 ans à compter de l'exécution du service ou de la
livraison du bien qui fait l'objet du contrat, ainsi il commencera à
courir à compter de la conclusion du contrat pour celui dont
l'exécution est immédiate.
Cette disposition favorise le consommateur en prenant en
compte l'inégalité de moyens des parties. En effet, il est
logique de l'imposer au professionnel qui, s'il ne dispose pas des
14 L'auteur distingue les deux notions, selon lui, la
conservation a trait à la conservation d'un droit tandis que l'archivage
s'appliquerait à un support. E. Caprioli, « L'archivage
électronique », JCP G n° 38, 14 septembre 2009
15 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des
services de la société de l'information, et notamment du commerce
électronique, dans le marché intérieur, JOCE L
178, 17 juill. 2000, p. 1
16 Décret n° 2005-137 du 16 Fév. 2005 pris
pour l'application de l'article L 134-2 du Code de la consommation, JORF
18 Fév. 2005, texte n° 26
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moyens aptes à respecter cette contrainte, peut en
confier l'exécution à un tiers spécialisé
présentant les caractéristiques d'un tiers de confiance.
Au demeurant, cette activité s'est largement
développée et se trouve notamment pratiquée par des
professionnels possédant des labels délivrés par
l'AFNOR17 en vertu de normes privées censées assurer
aux clients toute confiance dans des prestations de qualité.
Il aurait été vain d'imposer cette obligation au
consommateur dont la maîtrise de la technique électronique est
plus que douteuse. En effet, comme le rappelle un auteur :« qui, parmi les
cyber-consommateurs sait, par exemple, que l'archivage de ses messages sur sa
messagerie électronique n'est pas enregistré sur son propre
disque dur, mais sur les données détenues par son
hébergeur ? »18.
S'il est indispensable aux parties de conserver l'acte dans
des conditions aptes à garantir son intégrité, le respect
de cette condition ne suffit pas à garantir les parties de le
recevabilité de leur preuve. En effet, l'écrit
électronique n'en reste pas moins une preuve littérale dont la
validité est subordonnée à l'existence d'une signature
propre à l'auteur. Il était nécessaire par
conséquent d'assurer la transposition de la directive du 13
décembre 1999 consacrant la validité de la signature
électronique.
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