L'éducation de l'élite gouvernante dans la pensée platonicienne( Télécharger le fichier original )par Placide IPAN MOLOUASHUNI Institut supérieur de philosophie Saint-Joseph MUKASA Yaoundé Cameroun - Baccalauréat 2010 |
CHAP.III. REGARD CRITIQUE SUR LE SYSTEME EDUCATIF DE PLATONSoulignons que les précédents chapitres nous ont permis d'avoir une vue d'ensemble sur la théorie platonicienne de l'éducation de l'élite gouvernante. A présent, nous tenterons de cerner ou de relever quelque failles de cette théorie tout en nous focalisant sur le scientisme, l'élitisme, le radicalisme platonicien et l'utopie platonicienne. III.1. L'éducation scientifique ou le scientismeLe souci de réformer la cité animait Platon, c'est pourquoi avait-il envisagé la réformation des esprits. Celle-ci devrait avoir pour soubassement la recherche purement scientifique. En d'autres termes, Platon voulait réformer les esprits toute en les soumettant à une éducation plus scientifique. Voilà pourquoi, Henri Irenée Marrou soutient que : « cette éducation scientifique, Platon ne l'a pas rêvée seulement pendant près de quarante ans (387-348), il l'a dispensée aux disciples groupés au tour de lui à l'académie »44(*). Cette éducation scientifique nous révèle d'une certaine façon, l'attachement de Platon aux sciences dites préparatoires dont : l'arithmétique, la géométrie, qui d'après lui, conduisent à la science suprême qu'est la dialectique. Et l'estime que Platon avait pour l'arithmétique, il l'exprime en ces termes : « la science des nombres-logique et arithmétique est donc la première des sciences préparatoires »45(*). Il estime également que : « l'étude des sciences, de l'arithmétique, de la géométrie, de la musique et de l'astronomie nous fait un second pas vers le sommet de la dialectique »46(*). Notons tout de même que si Platon accorde une place de choix aux sciences, c'est parce qu'il voulait que les chefs reçoivent une formation rationnelle. Cet amour des sciences chez Platon se justifie par l'inscription placée au fronton de l'académie : « que nul n'entre ici s'il n'est géomètre »47(*). De plus, il souhaitait que la formation élitiste se diffère de celle donnée à l'ancienne éducation qui, selon Marrou : « l'idéal de cette éducation ancienne reste d'ordre éthique, il tient en un mot le fait d'être un homme bel et bon »48(*). Mais pour Platon, l'éducation de l'élite devrait transcender celle donnée aux gardiens qui se caractérise plus par la gymnastique et la musique ; qui par contre, vise ce qui est scientifique. C'est dans cette optique qu'il propose que les chefs soient d'abord imprégnés de l'esprit scientifique, et que la science ne les échappe de peur qu'ils restent ignorants. Il fait donc cette recommandation en ces termes : « il faut donc autant qu'il se peut prescrire aux citoyens de la callipolis de ne point négliger la géométrie, elle a d'ailleurs des avantages secondaires qui ne sont pas à mépriser »49(*). Bref, nous pouvons même dire que Platon a exprimé son attachement aux sciences et en a fait presque le socle de l'éducation de l'élite. Car pour lui, l'élite devrait connaître la science non sous sa forme particulière, mais plutôt sous sa forme universelle. De ce fait, celui qu'il faudra établir comme chef, devra remplir en quelque sorte cette condition. Auguste Dies commentant Platon, « [...] insiste sur l'enseignement de sciences des nombres, du calcul, de la géométrie et de l'astronomie : tout homme libre doit en avoir au moins une connaissance élémentaire »50(*). Nous réalisons aux vues de ce qui précède que la science a une marque indélébile que doivent avoir ceux qui devront gouverner la cité. * 44 Henri Irenée Marrou, L'histoire de l'éducation dans l'antiquité, OP.Cit, P.10. * 45 Platon, La République, Op.cit., P.40. * 46 Platon, Gorgias, par Paul Lemaire, Paris, Librairie, A. Hatier, 1927, P.10. * 47 Emile Chambry, Platon (oeuvres completes, tome VII, première partie, La République, IV-VII, Paris, Garnier Flammarion, 1966. * 48 Henri Irenée Marrou, Op.Cit, P.79. * 49 Platon, La République, Op. Cit., VII, 527 a-527 e. * 50 Auguste Dies, Platon, Op. Cit., p. 208. |
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