2.2. Le sexe de la femme comme pouvoir de
domination
En partant du postulat selon lequel la femme donne la vie, on
se rend compte qu'elle est ipso facto dotée du pouvoir d'enfanter, mais
aussi de maudire ou d'ôter cette vie. On pourra, à la limite, dire
que la femme apparaît comme un être sacré ou un dieu. A
priori, c'est ce qui pose problème entre l'homme et la femme. Ce
problème est perçu par Françoise HERETIER-AUGE qui dit que
: « l'appropriation de la fécondité dans le corps masculin
est voué à l'échec : il ne peut jamais avoir de simulacre.
Elle passera donc par le contrôle : appropriation des femmes
elles-mêmes ou le produit de leur fécondité, (...)
»153 La maternité est un phénomène qui
n'est réservé qu'à la femme et c'est un
phénomène qui est le véritable lieu de domination.
A cet effet, MAMBOUBE affirme que :
- « lors du rituel de purification de la veuve
après sa réclusion, la personne qui doit lui enlever la
défense lors du premier rapport sexuel après la mort du
défunt est l'Angô Mungala parce qu'il est détenteur de
pouvoir. Puis vient l'Angô Ondoukoué qui termine l'acte sexuel
avec elle ».154 Le rapport sexuel que la veuve partage
avec ces deux détenteurs de pouvoirs n'est pas un rapport sexuel de
plaisir, mais repose sur une égalité de pouvoirs pour les trois
acteurs. La veuve ne peut pas rompre cette défense avec un non
Angô-Mungala ou Ondoukoué au risque de perdre toute sa valeur
auprès de ces Angô-Mungala ; où une partie de son pouvoir y
réside. Car le sexe de la mère des jumeaux a un pouvoir mystique
qui ne peut s'expliquer. Le rapport sexuel des mères des jumeaux avec
les Angô wa Mungala et wa Ondoukoué est une pratique plutôt
symbolique.
Comme l'affirme Eddy Blaise MABADI MAHEBA, « en imposant
des rapports sexuels aux mères des jumeaux, les Nganga Mongala
traduisent un acte symbolique en rapport physique. Ces relations intimes sont
faites au nom des entités imaginaires qui considèrent la
mère des jumeaux comme source de pouvoir et de
153 Françoise HERETIER-AUGE, Masculin/féminin.
La pensée de la différence, Paris, Odile Jacob, 1995,
p.230.
154 Madame MAMBOUBE, informatrice rencontrée le 23 avril
2009 à Lambaréné au village Bellevue.
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puissance ».155 C'est en ce sens que le sexe
de la femme est un véritable lieu de domination de la femme sur les
hommes. Dans une autre mesure, pour mettre en relief l'idée selon
laquelle le sexe de la femme apparaît comme un pouvoir de domination ;
nous allons nous appesantir sur une perspective de Florence BIKOMA qui tourne
autour de la sacralité des jumeaux et du sexe de la femme.
En effet, il ya une allusion faite entre le sexe de la femme
considéré comme le port de débarquement et les jumeaux,
des navires qui viennent pour y accoster156. On pourrait partir de
l'idée selon laquelle « les hommes initiés au mwiri,
portaient sur leurs bras gauches un tatouage qui serait la
représentation du vagin de la femme. Ceux qui leur permettaient de
maudire ».157
Eu égard ces considérations, on se rend compte
que le sexe de la femme a une portée symbolique, il possède un
pouvoir de domination et autour duquel gravite une mythologie.
155 Eddy Blaise MABADI MAHEBA, Ambivalence et pouvoir :
Mongala et le culte des jumeaux chez les Mahongwè, Mémoire
de Maîtrise en Anthropologie, Libreville, UOB/FLSH, sept.2005, p.75.
156 Florence BIKOMA, op.cit., p.276.
157 Propos recueillis auprès d'un informateur
Akélé-Sango, vendeur de vin de palme au village Bellevue le 25
avril 2009.
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