1.1.2. Histoire des bandes dessinées en
francophonie
Rodolphe Tdpffer, instituteur suisse, est souvent cité
comme le père de la BD actuelle, ou tout du moins son
précurseur. En 1827, il commence à dessiner ce qu'il appelle ses
histoires en estampes, l'Histoire de M~ Vieux-Bois puis
les aventures de M~ Tric-Trac sous forme de feuilletons.
Les albums, imprimés dix ans plus tard, sont composés, comme
dans l'imagerie d'Epinal, de rangées de dessins au trait,
accompagné de quelques lignes de textes. La différence
relève de différents formats de cadres impliquant un certain
montage.
La première BD française est due à un
amateur, Georges Colomb, qui signe Christophe La
Famille Fenouillard dont les aventures paraissent chaque semaine
dans Le Petit Français Illustré, journal pour
enfants, à partir de 1889.
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En 1905 sort le premier illustré* pour filles La
semaine de Suzette avec la bande dessinée Bécassine
(Pinchon/Caumery).
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Les journaux pour enfants se renouvellent en proposant de
plus en plus de bandes dessinées à la place des histoires
illustrées. Les dessinateurs utilisent de mieux en mieux la bulle
: dans les premières planches* des Pieds Nickelés,
Louis Forton ne l'utilisait que partiellement, comme complément
des commentaires, Alain Saint-Ougan
systématise véritablement son emploi dans Zig et
Puce (première apparition dans Le
Dimanche illustré en 1925).
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R.TSpffer Mr Tric Trac (c) Favre
Christophe La famille Fenouillard (c) Armand Colin
Pinchon Bécassine (c) Gauthier Languereau
Forton Les Pieds Nickelés (c)
Société Parisienne d'Edition
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En 1929, George Remi, sous le pseudonyme d'Hergé,
fait débuter à Tintin ses Aventures au pays des
Soviets dans le Petit Vingtième.
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La même année, Paul Winkler créé
Opera Mundi représentant en France du plus important producteur de
BD aux Etats-Unis : King Features Syndicate, puis Le journal de
Mickey (avec les personnages de Walt Disney) en 1934.
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Les BD américaines commencent alors à venir
en Europe, la naissance des récits d'aventures et des héros
justiciers ou explorateurs (Dick Tracy, Flash Gordon) vont
influencer la BD franco-belge dans la création de nouveaux
personnages. Au genre comique vient s'ajouter le
récit d'aventures.
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La deuxième guerre mondiale marque une période de
censure et d'appropriation de certaines revues par les partis politiques.
Les revues de BD sont donc considérées comme un média de
masse envers la jeunesse dont le discours peut transcrire des tendances
politiques.
C'est aussi la naissance de deux écoles* belges :
l'école de Charleloi et l'école de Bruxelles...
Hergé L'île noire (c) Casterman
Couverture du Journal de Mickey n°688 (c) Walt
Disney
H.H. Knerr The Katzenjammer kids (Pim Pam Poum
en France) (c)K.F.S./Opera Mundi
A. Raymond Flash Gordon (c) K.F.S.
D. O'Neil/N. Adams Batman (c) National Periodical
Publ. Inc.
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La première commence avec Robert Velter qui imagine
le personnage Spirou en 1938 pour un magazine, fondé
par Jean Dupuis, qui prend son nom. Le Journal de Spirou lancera
de nombreux artistes dont le style est humoristique, utilisant un dessin
« rond », des bulles arrondies et des symboles pour
représenter le mouvement.
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L'école de Bruxelles est née dans
Le Journal de Tintin (1946). Hergé et E.P. Jacobs
(Blake et Mortimer) sont les figures emblématiques de
ce courant qui introduit un dessin plus réaliste, des
détails dans les décors, un texte abondant et des
bulles rectangulaires.
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Après la guerre, la loi du 16 juillet 1949
destinée à protéger la jeunesse des dangers de la
BD dénote explicitement le protectionnisme français, entre
nationalisme et anti -américanisme. La production francophone en est
favorisée. De grands personnages vont apparaître à cette
époque.
De nouvelles revues voient le jour ainsi que des maisons
d'édition qui se spécialisent dans la BD. La cible principale
reste les jeunes et ce jusqu'aux années soixante.
R. Goscinny/A. Uderzo Astérix le Gaulois (c)
Albert René
Fournier Spirou (c) Dupuis
E.P. Jacobs La marque jaune (c) Casterman
Morris Lucky Luke (c) Dupuis
Roba Boule et Bill (c) Dupuis
Peyo Les Schtroumpfs (c) Dupuis
Franquin Gaston Lagaffe (c) Dupuis
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En 1959 paraît Pilote, magazine
illustré, créé par René Goscinny avec Greg
(Achille Talon), Charlier et Giraud (Lt. Blueberry), qui
s'adressera rapidement à un public plus âgé que les autres
revues notamment grâce à un style et à un discours plus
satirique et plus
engagé.
La BD pour adultes s'affirme encore dans Hara-Kiri, journal
bête et méchant, fondé en 1960 entre autres par
Cavanna et Reiser et dans des productions érotiques initiées par
des artistes anglais.
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La BD s'ouvre donc à un public nouveau, les dessinateurs
et scénaristes* y affirment d'autant plus leurs idées et leurs
convictions politiques.
La contre-culture commence alors vers 1968, selon Annie
Baron-Carvais [BARON-CARVAIS, 1985, p.26]. C'est la naissance de magazines
axés sur l'humour, la parodie, la critique, la
dérision comme Charlie-Mensuel (1969), L'Echo des
Savanes (1972) et Fluide glacial (1975) ou encore sur la
science-fiction avec Métal Hurlant (1975).
Greg Achille Talon (c) Dargaud
Gir/Charlier Lt. Blueberry (c)Dargaud
Reiser (c) Pilote - Dargaud
Ph. Geluck Le chat 1999,9999 (c) Casterman
Bretécher Les frustrés
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1978 marque un certain retour au classicisme. Le magazine
Circus (édition Glénat) et le mensuel A suivre
(Casterman) présentent des récits d'aventures «
éloignés de tout intellectualisme » avec Bourgeon
(Les Passagers du Vent), Tardi (Adèle Blanc-Sec),
Comès, Yslaire (Sambre).
Puis peu à peu apparaît aussi un « Nouveau
Réalisme », dans des genres très différents :
science fiction (L'Incal de Moebius/Jodorowsky), humour (Margerin),
séries noires (Tardi), etc.
L'explosion de la bande dessinée dans les années
1970 -1980 a été suivie d'un retour de bâton.
L'arrivée du monde des marchands a cassé la dynamique. De
nombreuses revues indépendantes disparaissent, les
gros éditeurs dictent la loi de la rentabilité
instantanée. Au milieu des années 90, leurs politiques
marketing mènent à un regain d'intérêt par le public
Les séries Titeuf, XIII, Largo Winch, Lanfeust de Troy
accueillent un franc succès parallèlement aux
héros déjà éprouvés (Astérix, Tintin,
Lucky Luke, Valérian). Certaines maisons d'édition reprennent
le chemin de l'indépendance. Les Humanoïdes Associés
proposent des albums utilisant de plus en plus l'ordinateur pour la
colorisation et la création d'images en 3D (Mégalex,
Les Technopères ou encore la suite des aventures de John
Difool).
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Bourgeon Les passagers du vent (c) Casterman
Tardi Brindavoine (c) Casterman
Moebius L'incal 1982 (c) Humanoïdes
Associés
Comès Silence (c) Casterman
Bilal Exterminateur 17 (c) Humanoïdes
associés
Moebius/Jodorowsky L'incal Noir 2000 (c) Humanoïdes
Associés
Beltran Mégalex (c) Humanoïdes
Associés
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Ordinateur : le mot est prononcé, mais sur le bout des
lèvres seulement. De nombreux artistes restent encore sceptiques,
souhaitent conserver un état d'art-artisanat transmis
de générations en générations d'artistes dans
les studios et entérinent du même coup la politique frileuse,
conservatrice et à courte vue des grands éditeurs. Mais certains
auteurs, comme nous l'avons vu ci-dessus et verrons encore ci-après,
commencent à s'approprier cet outil pour expérimenter de
nouvelles possibilités.
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