§ 4 - La police RC Décennale
A - Le cadre juridique de la RC décennale au
Maroc
L'article 769 du D.O.C. précise que "l'Architecte ou
Ingénieur et l'Entrepreneur chargés directement par le
Maître sont responsables lorsque, dans les dix années à
partir de l'achèvement de l'édifice ou autre ouvrage dont ils ont
dirigé ou exécuté les travaux, l'ouvrage s'écroule,
en tout ou en partie, ou présente un danger évident de
s'écrouler, par défaut de matériaux, par le vice de la
construction ou par le vice du sol.
L'architecte qui n'a pas dirigé les travaux ne
répond que des défauts de son
plan.
Le délai de dix ans commence à courir du jour de
la réception des travaux. L'action doit être intentée dans
les trente jours à partir du jour où s'est vérifié
le fait qui donne lieu à la garantie; elle n'est pas recevable
après le délai."
Cet article a vu le jour en 1913 et a été
modifié en 1959. Il fait ressortir les idées
principales suivantes :
- La responsabilité incombe à trois principaux
intervenants à savoir l'architecte,
l'ingénieur et l'entrepreneur.
- Cette responsabilité dure dix ans (d'où
l'adjectif de décennale attribué par les
assureurs) à compter de la réception des
travaux.
- La responsabilité des intervenants directs est retenue
dans deux cas :
? l'effondrement total ou partiel de l'ouvrage;
? la menace d'effondrement total ou partiel de l'ouvrage.
- L'action contre le responsable doit être intentée
dans un délai de trente jours.
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Responsabilité civile et assurance des
constructeurs au Maroc Limites et carences de la
législation
Cette responsabilité incombe aux intervenants ayant un
contrat direct avec le maître d'ouvrage et exclut de ce fait les sous
traitants par exemple. Cette situation n'est pas confortable pour les
propriétaires qui ne peuvent invoquer la responsabilité
décennale que des professionnels qui ont souscrits un contrat direct
avec le maître d'ouvrage.
B - Principes de l'assurance décennale
L'assurance décennale a pour rôle de couvrir la
responsabilité des intervenants dans l'acte de construire telle qu'elle
est définie dans l'article 769 du DOC. Il en résulte que tous les
intervenants directs liés au maître d'ouvrage par un contrat
doivent figurer parmi les assurés à l'exception du Bureau de
Contrôle. Le maître d'ouvrage peut bénéficier de la
qualité d'assuré vu qu'il fournit dans certains cas des
prestations de services ou/et des matériaux de construction (c'est le
cas notamment des promoteurs immobiliers).
Partant de l'article 769 du DOC, cette police doit couvrir les
4 rubriques
suivantes :
? L'erreur de conception ;
? La faute d'exécution ;
? Le défaut des matériaux ;
? Les pathologies de l'ouvrage dues au sol.
Tel que le stipule l'article 769 du DOC, la
responsabilité des intervenants (durant dix ans après la
réception des travaux) se voit retenue et engagée dans deux cas
précis à savoir l'effondrement et la menace d'effondrement. En
d'autres termes ; implicitement ; seuls les éléments porteurs
(éléments qui concourent à la solidité et
stabilité de l'ouvrage : fondations, poteaux, poutres, dalles, murs de
refend, cages d'escaliers, etc...) sont concernés par cet article. Par
conséquent, l'assurance décennale ne couvre en principe que les
éléments porteurs qu'on appelle communément le gros oeuvre
: le second oeuvre est exclu de cette couverture.
Néanmoins, le second oeuvre peut être couvert par
répercussion dans le cadre de la police décennale : les
désordres propres du second oeuvre seront exclus mais par contre les
dommages subis par ce dernier suite à un effondrement d'un
élément porteur (sinistre de type décennal) sera pris en
charge par la police contractée.
La couverture généralement octroyée est
décennale, non résiliable et avec prime unique. On peut imaginer
néanmoins des cas où la garantie délivrée est
annuelle et donc renouvelable : cas pratiquement non rencontré au Maroc
: La majeur partie des traités de réassurance des compagnies
d'assurance n'envisagent pas ce cas de figure.
Le coût moyen de l'assurance décennale
s'élève à environ 1 % du montant de la construction.
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La franchise à la charge de l'assuré varie en
général pour des ouvrages courants et des fondations classiques
entre 1 et 4 %0 du montant de la construction. Elle a pour effet de
réduire les coûts de gestion du contrat d'assurance et donc d'en
diminuer la prime pour l'assuré, de moraliser le risque et est opposable
au bénéficiaire de la couverture. Mais la franchise pose un
sérieux problème au cas où l'entreprise disparaitrait ou
vit des difficultés financières. Il serait plus judicieux et
profitable ; pour les acquéreurs d'ouvrages ; que la garantie
décennale soit octroyée sans franchise au départ quitte
à payer la prime y afférente.
L'assurance décennale offre une réelle
protection et sécurité au maître d'ouvrage en cas
d'effondrement ou menace d'effondrement de son ouvrage. Cette couverture est
valable même en cas de disparition des constructeurs de l'ouvrage et les
maîtres d'ouvrage sont indemnisés pour réparer le
préjudice subi par leur ouvrage.
Cette couverture est adéquate pour prendre en charge
les sinistres graves engendrant des coûts insupportables pour
l'assuré.
Par contre, elle ne les dispense pas de participer de
manière active et permanente à l'entretien de leurs ouvrages.
L'expérience a d'ailleurs montré que la pérennité
des constructions dépend en grande partie de leur entretien.
Par ailleurs cette police d'assurance n'assure que la
responsabilité délictuelle des constructeurs. L'obligation
contractuelle de faire n'entre pas dans le champ d'application de l'assurance
de responsabilité des entre preneurs. Car il n'appartient pas à
l'assureur de responsabilité de se substituer à un assuré
pour accomplir les prestations auxquelles celui-ci s'est contractuellement
engagé1.
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