B. La possible collaboration entre l'administrateur provisoire
et les dirigeants sociaux
L'article 63 al. 5 du règlement du 13 avril 2002
dispose : « La mise sous administration provisoire entraine le
dessaisissement des dirigeants sociaux, la suspension d'office de leurs
pouvoirs qui sont transférés en totalité ou en partie
à l'administrateur provisoire ». Cette disposition
envisage le cas de dessaisissement partiel des dirigeants sociaux. Dans ce
cas, il peut partager ses pouvoirs avec les organes dirigeants
évincés. Une esquisse de partage de ces pouvoirs est
présentée en supra et nous n'y consacrerons plus de longs
développements.
Le partage de pouvoirs en contexte d'administration provisoire
n'est donc pas une simple vue de l'esprit car ne souffre pas d'un manque de
base légale. Malheureusement, cette possibilité qui pouvait
résoudre plus d'un problème n'est pas utilisée en
pratique. La nécessité d'instaurer un partage de pouvoirs entre
l'administrateur provisoire et les dirigeants s'impose pour au moins deux
raisons :
- D'abord, elle permettra de résoudre l'épineux
problème de la compétence des administrateurs provisoires car ils
seront appuyés dans l'exercice de leur fonction par les dirigeants dont
l'expérience en la matière est incontestable. L'administrateur
provisoire très souvent n'est pas un professionnel du secteur. Il n'est
pas moins étranger au monde de la microfinance et sa gestion ne peut
être qu'hasardeuse. Le professionnalisme des dirigeants lui
éclairera dans la prise de certaines mesures. Ce d'autant plus que les
dirigeants maîtrisent mieux que quiconque la situation de
l'établissement même s'ils n'ont pas tous les moyens pour
l'extirper des difficultés. La collaboration dans ce cas est un gage
d'efficacité.
-Ensuite, cette collaboration permettra un prompt
rétablissement de la santé de l'établissement dans la
mesure où chacun apportera son expertise dans la recherche des solutions
urgentes. Les dirigeants mettront, nous l'avons dit, au service de
l'administrateur leur riche expérience professionnelle. L'administrateur
usera de sa crédibilité et de son influence pour trouver les
ressources financières nécessaires au rétablissement de
l'équilibre financier de l'établissement. Les partenaires,
semble-il auront plus de rassurance à répondre à l'appel
à capitaux de l'administrateur que des dirigeants.
-La collaboration entre les dirigeants et l'administrateur
enfin permettra d'éviter les conflits stériles qui sont de nature
à complexifier la situation critique de l'établissement. Les
dirigeants ne se résoudraient pas d'avoir été suspendus de
leurs fonctions alors qu'ils ont été légitimement
désignés et développeraient une attitude austère,
préjudiciable au redressement de l'entreprise.
Quoi qu'il en soit, les pouvoirs absolus de l'administrateur
provisoire sont à redouter car toute personne détentrice d'un
pouvoir absolu est tentée d'en abuser. D'où la
nécessité d'un contre pouvoir par ailleurs tant
prôné par Montesquieu.
Au total, il est utile de dire que l'idéal des
techniques de traitement d'un établissement en difficulté est de
recourir à une technique de redressement interne en exécutant le
plan de redressement interne défini par les cadres de la structure.
L'efficacité de cette technique dépend à n'en point douter
de la célérité avec laquelle elle sera adoptée et
mise en oeuvre. L'avantage ici est que l'établissement ne supporte pas
les charges supplémentaires de traitement d'un mandataire et qu'il est
épargné des éventuelles dépenses fantaisistes. Les
dirigeants dans ce contexte doivent se montrer assez responsables pour
mériter davantage la confiance de la COBAC. Cette période
d'observation pourra conduire à désigner un administrateur
provisoire pour continuer la gestion et la direction de l'établissement
et surtout pour résoudre ses difficultés. Même dans ce
contexte, l'intervention des dirigeants est nécessaire et la
possibilité de partage de pouvoirs heureusement envisagée par la
réglementation doit être mise en oeuvre. Une intervention
salutaire du législateur communautaire est donc vivement
souhaitée pour apporter des touches correctives au régime de
l'administration provisoire. Cette intervention renforcerait son
efficacité et ferait d'elle une technique assez élaborée
pouvant effectivement contribuer au sauvetage des EMF en difficultés.
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