2. Eléments de contexte de la relation Agriculture -
Pollution de l'eau
Outre une pression environnementale accrue par le recours
massif aux fertilisants azotés et la facilitation de leur transfert vers
les cours d'eau, l'intensification de l'agriculture n'a pas été
sans conséquences sociales et économiques sur la filière
et les choix stratégiques des agriculteurs pour leurs exploitations.
Une contrainte majeure réside dans le fait que
l'agriculteur doit pouvoir vivre de son activité, c'est-à-dire
optimiser sa production par la gestion d'un ensemble de facteurs complexes et
aléatoires en interaction, tout en diminuant ses charges et ses
coûts d'exploitation. Le contexte économique incite l'agriculteur
à raisonner en termes de marges. Dans ce schéma, le recours aux
intrants trouve une certaine légitimité. Il rend le
système de production moins complexe et moins aléatoire pour
l'exploitant, qui trouve un intérêt à rationaliser ses
achats d'intrants face à la variabilité des prix de vente du
marché. Un système entretenu, d'une certaine façon, par
une forme de lobbying des firmes phytosanitaires.
L'interdépendance entre les consommateurs - urbains
pour la plupart et guidés principalement par le prix des biens de
consommation - et les agriculteurs soucieux de la rentabilité de leur
exploitation, est déséquilibrée par les nombreux
intermédiaires qui s'interposent en effectuant des marges à
l'achat et à la revente des produits. Le pouvoir grandissant de la
grande distribution, mais aussi des consommateurs dans l'orientation du
marché vers l'essor de produits respectueux de l'environnement, n'est
pas encore assez fort pour orienter définitivement et à grande
échelle les agriculteurs dans leurs pratiques.
Les choix des exploitants sont régis par les politiques
publiques et les incitations financières qu'elles induisent. Les
conditions d'attribution des primes dans le cadre de la PAC déterminent
souvent les choix culturaux, comme en témoigne la réforme de la
PAC 1992 : dans certains départements, le montant des primes de l'Etat
pouvait atteindre 200 €/ha pour du maïs irrigué au
détriment du maïs non irrigué. L'association du gain de
productivité et des montants des primes a eu pour conséquence
l'équipement massif des exploitations en matériel d'irrigation.
Jusqu'au verdissement de la PAC en 2003 et la suppression des aides
spécifiques, l'incitation à l'irrigation, et donc indirectement
au transfert des polluants vers les cours d'eau, était financière
et publique.
Master 2 Politiques Territoriales de Développement
Durable 5
Première partie :
Relation Eau-Agriculture au niveau national La Seille :
Gestion de la ressource en eau et pollution agricole
D'autre part, l'exploitant est souvent confronté
à la complexité du système administratif français.
La multiplicité des interlocuteurs rend toute démarche
particulièrement lente. Pour de nombreux agriculteurs, il est ainsi plus
simple d'obtenir les subventions de la PAC que d'obtenir des aides
environnementales dont l'accès manque d'ergonomie administrative. Enfin,
la superposition des politiques nationales et communautaires peut laisser
l'exploitant perplexe dans sa gestion. Ce système constitue un frein
à la mise en place d'actions en faveur de l'amélioration de la
qualité de l'eau en milieu agricole, en particulier pour les mesures
fondées sur le volontariat des agriculteurs.
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