Partie 1 : Etat des lieux de la relation Eau-
Agriculture en France
1. Evolution de l'agriculture en France
1. Intensification des pratiques agricoles
Portée par la Politique Agricole Commune de 1958,
l'agriculture française a connu une intensification sans
précédent s'inscrivant dans les nouveaux enjeux de la seconde
moitié du XXème siècle. Parfois qualifié
de « révolution agricole », ce processus a profondément
modifié les pratiques agriculturales françaises : rendement,
taille et fonctionnement des exploitations, mais aussi hausse des pressions sur
l'environnement. L'évolution des techniques agriculturales -
appuyée par la mécanisation des exploitations, le
développement de l'irrigation et le recours à des substances
phytosanitaires et intrants de synthèse - a permis d'augmenter la
productivité de manière considérable. Les rendements en
blé ont ainsi été
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Figure N°1 : Evolution des rendements annuels
français moyens (source Agreste)
quintuplés et la surface de travail de chaque
agriculteur décuplée. Cette évolution s'est
accompagnée de deux mutations majeures du
monde agricole : la spécialisation des exploitations et
des territoires ruraux d'une
part, et l'aggravation de la vulnérabilité
des
paysages ruraux aux activités anthropiques. La
spécialisation des exploitations a permis
d'accroitre la productivité et s'est faite au
détriment du système « polyculture-élevage »
plus « traditionnel ». Ce dernier offrait un équilibre entre
le nourrissage du cheptel par le fourrage produit sur l'exploitation et la
fertilisation de ses parcelles par les déjections animales produites. Ce
système rompu, certains espaces ruraux se sont orientés vers
l'élevage intensif avec des densités de cheptel permises par
l'achat de fourrage supplémentaire, mais saturant le sol en
déjections animales soumises au lessivage. D'autres se sont
tournés vers la céréaliculture, consommatrice d'eau et
d'intrants de synthèse à leur tour lessivables.
La vulnérabilité des milieux aquatiques et
terrestres aux perturbations d'origine anthropique trouve son origine dans
l'évolution des systèmes de production dont découle la
modification des paysages ruraux. A titre d'exemple, la spécialisation
des exploitations en grandes cultures entraine des rotations plus courtes qui
favorisent l'invasion par les plantes adventices et incitent à la lutte
chimique par les pesticides. De même, la raréfaction progressive
des prairies au profit des cultures fourragères implique une absence de
couvert végétal en hiver qui favorise l'écoulement, le
lessivage des intrants et l'érosion des sols. A plus grande
échelle, les opérations foncières de remembrement du
parcellaire agricole initiées par les pouvoirs publics
Master 2 Politiques Territoriales de Développement
Durable 4
Première partie :
Relation Eau-Agriculture au niveau national La Seille :
Gestion de la ressource en eau et pollution agricole
dans les années 1960 et poursuivies jusqu'en 1980 ont
participé à l'intensification de l'agriculture. En favorisant la
mécanisation sur de très grandes parcelles, cette politique a
bouleversé les paysages agricoles par l'arrachage de nombreuses haies,
le recul des prairies et des zones humides, et l'enterrement des cours d'eau
(jusqu'à 30% de perte de linéaire d'un affluent de la Moselle en
40ans par exemple). Ces éléments paysagers constituent autant de
milieux de rétention qui font obstacle aux flux de polluants vers les
cours d'eau. L'imperméabilisation croissante des sols, le curage des
fossés et l'augmentation des taux de drainage dans les bassins versants
constituent à l'inverse des « corridors de transfert des polluants
».
En ce sens, l'évolution de l'agriculture
française est intimement liée à l'évolution de la
qualité de l'eau. Avec 14 % des volumes d'eau douce
prélevés en 2001 et 1,9 millions d'hectares irrigués en
2000, le secteur agricole est un utilisateur peu performant, peu efficace et
hautement subventionné de cette ressource.
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