2. Une variété dans les politiques de
décentralisation financière
La variété des politiques de
décentralisation financière mise en place par les pays d'Afrique
subsaharienne reflète la spécificité même de chaque
pays. Cette diversité s'observe même à l'intérieur
des unions monétaires, ou des blocs sous régionaux tels que la
CEMAC, L'UEMOA ...etc. Cette absence de coordination nous oblige à
analyser succinctement le cas particulier de certains pays.
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Alembe Ayima mathieu, diplôme d'études
supérieures en sciences économiques Option : gouvernance et
développement économique
Mémoire de Master II : Décentralisation et
croissance économique : le cas de 6 pays d'Afrique
subsaharienne
Le cas spécifique des pays anglophones d'Afrique
subsaharienne tels que l'Afrique du Sud est intéressant à
analyser.
En Afrique du Sud par exemple, c'est le
gouvernement central pour éviter les distorsions entre les
différentes régions, qui a le contrôle de l'essentiel du
système de taxation directe et indirecte : impôts sur les
bénéfices, droit de douane, T.V.A. Cependant, selon la
constitution, les ressources collectées ne sont aucunement la
propriété exclusive du gouvernement central, elles doivent
être réparties entre les trois sphères du gouvernement
(gouvernement national, gouvernement provincial et municipalités) :
c'est le principe de l'Equitable share1. Les
municipalités Sud-africaines ne se contentent pas de cela, elles
disposent d'un outil fiscal à rendement potentiellement
élevé : les impôts sur la propriété
bâtie ou non bâtie. C'est la raison pour laquelle les
municipalités Sud-africaines financent leurs dépenses à
hauteur de 90% sur des ressources qu'elles mobilisent elles-mêmes ; les
transferts de l'Etat ou de la province ne représentant que 10% de leur
budget (LOOTVOET et KHAN, 2002).
Les pays francophones d'Afrique subsaharienne sont
également caractérisés par une diversité des
politiques de décentralisation financière. En
Guinée, les collectivités locales ont trois
principales sources de revenus : les ressources propres, les revenus
partagés, les transferts, et les ressources provenant de
l'extérieur (coopération décentralisée et
autres...). Si le système de transferts n'est pas encore effectif
(VERGNE, 2009), la gestion des revenus partagés manque de transparence
et la disparité entre communes urbaines et rurales est très
importante. C'est le gouvernement central qui est chargé de la collecte
des ressources partagées dont elle retient 50%.
Au Cameroun, les ressources des
collectivités locales sont issues de trois grands postes : les recettes
fiscales en gestion propre, les ressources fiscales en gestion partagée,
et les recettes fiscales de péréquation et tout récemment
les dotations de fonctionnement et d'investissement qui sont fixés
chaque année par la loi des finances (VERGNE, 2009). L'un des objectifs
clairement établis par le gouvernement c'est d'atteindre 10% des
ressources transférées à l'échéance 2015 aux
collectivités locales. La maitrise de l'outil de fiscalité locale
propre
1En Afrique du Sud, la constitution stipule que les
ressources collectées à l'échelle du territoire national
ne sont pas la propriété exclusive du gouvernement national,
celles-ci doivent être reparties équitablement entre les trois
sphères du gouvernement : gouvernement national, gouvernement
provincial, et gouvernement local : c'est le principe de l'équitable
share.
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Alembe Ayima mathieu, diplôme d'études
supérieures en sciences économiques Option : gouvernance et
développement économique
Mémoire de Master II : Décentralisation et
croissance économique : le cas de 6 pays d'Afrique
subsaharienne
laisse à désirer, les collectivités
locales vivant essentiellement des transferts de l'Etat et du
FEICOM1.
Au Sénégal, la part des
collectivités locales dans les finances publiques de l'Etat reste
marginale, puisque les recettes des collectivités locales ne
représentent en moyenne que 6% des recettes de l'Etat. Mais aspect plus
important, les ressources propres des collectivités locales
Sénégalaises représentent la plus grande partie de leurs
ressources globales, donc la capacité à mobiliser les ressources
est assez élevée. Cela est encourageant même si des efforts
doivent encore être faits. La « fiscalité partagée
» est un des outils maniés par l'Etat qui collecte les taxes et
reverse 50% du produit de la taxe annuelle sur les véhicules et de la
taxe sur la plus-value immobilière (VERGNE, 2009).
La nouvelle constitution de la RDC quant
à elle prévoit une répartition des montants
collectés autour de la formule « 50% - 40% - 10% »
c'est-à-dire 50 % des revenus générés restant au
niveau central, 40% à octroyer aux provinces et 10% pour la caisse
nationale de péréquation. Malgré cet effort de
transparence en ce qui concerne le transfert de moyens, l'opacité autour
des modalités de répartition des 40% au profit des provinces
demeure.
Ces quelques exemples montrent l'extrême
diversité des politiques de décentralisation financière,
ce qui va pousser NDEGWA en 2002, à capter ce phénomène
par une méthodologie bien précise afin de faire une comparaison
entre pays.
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