SECTON II : IMPACT DE LA DECENTRALISATION FINANCIERE
SUR LA CROISSANCE ECONOMIQUE :
Les études portant sur le lien entre la
décentralisation financière et la croissance économique
ont pour objectif d'analyser le bien-fondé de cette politique. En effet,
il existe toujours un clivage entre les auteurs de la théorie
libérale (TIEBOUT, 1956 et OATES, 1972) qui voient en la
décentralisation financière un facteur de croissance
économique au travers de l'efficacité dans l'allocation
infrastructurelle, et les auteurs de la théorie analytique qui
n'y croient pas du tout aux vertus de la décentralisation
financière et son impact sur la croissance économique à
travers l'offre infrastructurelle. Cette absence de consensus peut s'observer
non seulement au niveau théorique (I) mais aussi, au niveau empirique
(II).
I. REVUE DE LA LITTERATURE THEORIQUE :
La revue de la littérature autour de ce débat
est en grande partie tirée de la théorie du
fédéralisme budgétaire. En effet, le lien entre
décentralisation financière, décentralisation fiscale et
croissance économique y est largement développé.
Cependant, ces multiples auteurs s'accordent autour d'un point : le principe de
compétition est le principal argument mis en avant pour justifier
l'impact positif de la décentralisation financière sur la
croissance économique (1) même si certains auteurs de
théorie analytique trouvent quelques limites à ce principe
(2).
1. Le principe de compétition :
Sous une organisation politico administrative
décentralisée, il s'établit une
concurrence entre collectivités locales. C'est cette
compétition inter juridictionnelle qui devrait permettre une offre plus
adéquate de biens et services publics ainsi qu'une incitation, au niveau
local, des politiques publiques efficaces (CALDEIRA, 2011).
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Alembe Ayima mathieu, diplôme d'études
supérieures en sciences économiques Option : gouvernance et
développement économique
Mémoire de Master II : Décentralisation et
croissance économique : le cas de 6 pays d'Afrique
subsaharienne
Ce principe est soutenu par le modèle de TIEBOUT (1956)
qui, reconnaissant au préalable la concurrence entre les gouvernements
locaux en termes de fourniture de biens publics, présente l'enjeu du
principe de compétition : attirer le plus de citoyens pour disposer
ainsi d'une base imposable plus importante. Le marché est le principal
régulateur dans son modèle puisque la propension à
augmenter les impôts locaux dans une collectivité entrainerait des
populations vers des collectivités moins contraignantes. La concurrence
entre collectivités limite le pouvoir des gouvernements locaux de taxer
excessivement les contribuables. Ainsi, les « gouvernements locaux peuvent
offrir différents types et niveaux de services publics et, les individus
parfaitement informés et mobiles, peuvent se déplacer dans les
juridictions qui satisfont le mieux leurs préférences »
(CALDEIRA, 2011).
Les avantages du principe de compétition sont
multiples, QIAN et ROLLAND (1998) en présentent deux :
- La redevabilité des dirigeants
locaux s'élève avec le plein fonctionnement du principe de
compétition. Cette idée rejoint le point de vue de SEABRIGHT
(1996) qui voit en la décentralisation un moyen d'accroitre la
redevabilité des décideurs politiques car étant beaucoup
plus proches d'eux, il devient également plus facile pour les
populations de les évaluer. Ils sont donc tenus de rendre des comptes
aux citoyens (souvent en termes de fournitures de biens publics) au risque de
se faire sanctionner à la fin de leur mandat.
- Le principe de compétition décourage aussi la
corruption, car l'enjeu pour les gouvernements locaux est de
fournir des biens publics de meilleure qualité au moindre coût.
On peut donc ainsi conclure sur le fait que le principe de
compétition est largement issu du modèle de TIEBOUT (1956)
où l'idée principale qu'il développe est qu'à
travers un « vote par les pieds », les citoyens peuvent encourager
les gouvernements locaux à accroitre l'efficience des politiques
publiques notamment l'offre des biens publics au niveau local. Cependant ce
principe souffre de quelques limites qui ont été mises en exergue
par les partisans de la théorie analytique.
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