Les intermédiaires fiscaux jouent un rôle vital
dans le cadre du système fiscal, que ce soit en tant que conseillers
juridiques et fiscaux ou autres prestations fiscales fournies au profit des
contribuables. Ils aident leurs clients à comprendre leurs obligations
et à s'y conformer dans un contexte de plus en plus complexe. Ils les
assistent pour les différentes prestations fiscales, les
représentent devant l'administration fiscale ou les différentes
juridictions administratives et fiscales, mais aussi défendent leurs
intérêts devant les différentes juridictions. Leur
présence est vitale pour les contribuables ainsi que pour
l'administration fiscale.
Les intermédiaires fiscaux se trouvent du
côté de l'offre d'une relation dans laquelle les contribuables,
leurs clients, constituent le côté de la demande. Il s'agit d'une
relation tripartite dans laquelle l'administration fiscale constitue l'autre
partie garantie par une réglementation. Le système de
réglementation constitue donc le pilier de la relation tripartite entre
les contribuables, les intermédiaires fiscaux et l'administration
fiscale62.
Généralement, les rôles des
intermédiaires fiscaux doivent être nécessairement
complémentaires pour être plus efficaces dans un système
fiscal se basant essentiellement sur une corrélation étroite
entre la spécialisation et la complémentarité des
professions d'intermédiation fiscale.
Cependant, les intermédiaires fiscaux ne
bénéficient pas de la même situation au niveau de la
réglementation. En effet, les professions sont subdivisées
à travers deux catégories de réglementation.
La première catégorie de réglementation
concernant la profession fiscale est une réglementation dite stricte
où l'administration fiscale joue un rôle plus actif. En effet,
l'octroi de l'agrément pour le conseil fiscal ou l'autorisation
d'exercice de l'exploitant du bureau d'encadrement et d'assistance fiscale est
du ressort de l'administration fiscale. L'organisme professionnel n'a pas de
rôle considérable dans toutes les circonstances.
La deuxième catégorie de réglementation
s'appuie dans certaines limites sur un système
d'autoréglementation dans le cadre établi par les organismes
professionnels. La corporation professionnelle joue un rôle actif et elle
est régie par des règles professionnelles et
déontologiques propres. En effet, elle statue sur les demandes
d'inscription en qualité de membre ou de prise de mesures disciplinaires
à l'encontre des professionnels défaillants. Elle est
considérée comme le garant de l'indépendance et de la
qualité des prestations de ses membres. Elle concerne la profession
d'expert
62 Étude du rôle des
intermédiaires fiscaux, OCDE, 2007, p. 64
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comptable, la profession de comptable et la profession
d'avocat.
La situation du marché de conseil fiscal est en outre
caractérisée par une concurrence acharnée entre les
intermédiaires fiscaux, une réglementation insuffisamment
contraignante de la profession puisqu'elle appartient à une
réglementation ancienne qui n'a pas été
révisée en profondeur depuis sa promulgation et remonte aux
premières années de l'indépendance de la Tunisie. Sur le
plan pratique, l'activité de conseil fiscal est effectuée par
l'expert comptable ou l'avocat ou d'autres professions de dénominations
différentes, ce qui constitue une interférence entre les
différentes missions de ces intermédiaires.
Ce n'est pas le seul problème mais il y en a d'autres
dont notamment:
o des réglementations anciennes et notamment la loi
n°60-34 du 14 décembre 1960 relative à l'agrément des
conseils fiscaux,
o une réglementation actuelle ne répondant pas
aux besoins de l'économie et de l'évolution rapide de la
législation fiscale,
o les interférences au niveau des missions des
intermédiaires fiscaux,
o les prérogatives absolues de l'administration
fiscale,
o la spécialisation en matière fiscale n'est
pas claire alors quelle est une nécessité absolue pour
l'économie. Cette spécialisation exige la séparation des
fonctions entre les différents intermédiaires fiscaux. D'une
manière générale, la séparation s'effectue entre
les fonctions fiscales, les fonctions comptables et les fonctions juridiques et
ce, en vue de protéger le domaine d'intervention de chaque profession,
d'éviter les conflits d'intérêts au niveau professionnel et
d'en assurer ainsi une bonne continuité.
La solution à tous ces problèmes, c'est de
donner plus de considération au volet de la réglementation, c'est
à dire vers une perspective élargie pour la politique de la
réglementation.
Il faut rappeler que l'Etat tunisien, dans un souci de tout
réguler, a généré un éventail exorbitant et
contraignant de règles, de formalités et de procédures.
Ces mesures ont dévié de leurs missions principales et ont
compliqué davantage le vécu des citoyens, des entreprises et des
professionnels. « La non-implication des parties prenantes a tenu en
échec toutes ces tentatives de réforme» que l'administration
a suivi pour regagner la confiance des citoyens sans aboutir à des
résultats encourageants. D'où la nécessité d'une
réforme aussi rapide qu'efficace. «Simplifier la vie des
citoyens et des entreprises et favoriser la création d'un environnement
propice aux affaires sont
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désormais les soucis majeurs de toute politique
réglementaire responsable»63,
La Tunisie traverse une période de croissance faible,
avec une pression pour accroître la productivité des entreprises,
des ressources budgétaires limitées et une impatience croissante
à l'égard des freins réglementaires, et des agendas
politiques complexes pour promouvoir l'innovation et la croissance.
La qualité de la réglementation devient donc
cruciale pour permettre aux gouvernements d'accroître la cohérence
de leurs actions, de gérer les risques et d'améliorer la
compétitivité.
Compte tenu de ce qui précède, nous pouvons
dire que la « guillotine » réglementaire permet de
réviser rapidement le stock de réglementations anciennes dont
notamment la réglementation des professions d'intermédiation
fiscale, et d'éliminer celles devenues obsolètes. La «
guillotine» est particulièrement recommandée dans les
situations de crise ou post-révolution. Ce processus permet
d'éliminer 20% des formalités qui constituent 80% du «
fardeau » administratif pour les usagers.
Le projet adopté actuellement par le ministère
de finances et qui consiste en « la simplification des
formalités fiscales et douanières s'inscrit dans cette nouvelle
vision de la gouvernance réglementaire et marque l'entrée de la
Tunisie dans le club des pays pratiquant une gestion réglementaire
avancée fondée sur la concertation et le
compromis»64. Il se base sur les objectifs majeurs
suivants65 :
o initier une gouvernance réglementaire, participative,
transparente et crédible,
o faciliter le quotidien des usagers et en particulier des
entreprises,
o réduire les coûts réglementaires et
administratifs,
o créer un processus durable et sécurisé de
contrôle de la qualité réglementaire.
Mais à cet égard, que faut-il
réglementer, et comment faut-il combler les déficits de
réglementation, tout en évitant les inconvénients d'une
réglementation trop restrictive ou trop réactive ?
63 EL MEKKI Ali, Chef d'unité à
la Direction Générale des études et de la
législation fiscales, la Presse de Tunisie (économie), 11 janvier
2012
64 EL MEKKI Ali, op. cit.
65MAAMR Ridha, Direction
Générale des études et de la législation fiscales:
Une approche participative et structurée, la Presse économique,
11 janvier 2012.
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