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Le droit de véto et la responsabilité de protéger des Nations Unies

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par Cheikh Kalidou NDAW
Université Gaston Berger de Saint-Louis, Sénégal - Maà®trise 2013
  

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Paragraphe 2 : Le jeu des alliances protectrices

La guerre froide est terminée. Du moins, c'est ce que l'on veut croire. Les relations internationales demeurent marquées par des antagonismes latents ou apparents constitués autour des idéologies politiques ou des intérêts stratégiques. Comme pendant les années du conflit Est-Ouest, le monde est resté séparé en Blocs plus ou moins homogènes et idéologiquement proches. Même si l'ampleur a diminué, on retrouve toujours les Etats de tradition communiste d'un coté et ceux à orientation libérale de l'autre coté. Les Etats-Unis et la Russie, chacun avec ses alliés, ne pouvant que très difficilement parler le même langage. Le fonctionnement du Conseil de Sécurité en donne, s'il en était de besoin, une illustration patente. Certains membres permanents bloquent systématiquement toute résolution en défaveur des Etats qui sont sous leur protection quelle qu'en soit la raison. Le phénomène a pris une ampleur telle que plusieurs auteurs comme DE LACHERIERE et QUOC DINH l'ont dénoncé.

Le premier constate que « de la paralysie constitutionnelle mais limitée délibérément et réalistement inscrite dans la Charte, on passe ainsi à une paralysie généralisée au gré des alliances et des clientèles établies ou espérées »69. Cette analyse réaliste rend bien compte de la tendance à l'élargissement du bénéfice des privilèges du veto aux Etats non membres permanents.

Le second auteur met bien en exergue les conséquences de cette situation dans le cadre d'une agression armée d'un Etat contre un autre. Il écrit : « en pratique aucune contestation n'est possible si l'agresseur est l'un des membres permanents sinon même l'un des Etats protégés par eux. Le système des blocs a démesurément élargi une exception que les auteurs de la Charte avaient accepté en la limitant implicitement aux grandes puissances »70.

69- DE LACHERIERE, (G.), « Lacunes ou cohérence de la Charte » dans la Charte des Nations Unies. Commentaire article par article, Economica, Paris, 1991, p. 1447-1452.

70 - QUOC DINH, (N.) et al. , op. cit. p. 1111

Cheikh Kalidou NDAW, Mémoire de Maîtrise Droit Public, option Droit des Collectivités Locales, UFR SJP, UGB, 2012-2013.

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Le droit de veto et la responsabilité de protéger des Nations Unies

Un bref coup d'oeil sur les résolutions ayant fait l'objet d'un veto au Conseil de sécurité permet de saisir l'ampleur de ce phénomène.

Ainsi, sur la période allant du 16 février 1946 au 19 juillet 201271, nous avons pu dénombrer prés de 184 projets de résolution ayant fait l'objet d'un veto au Conseil de sécurité72. Les cinq membres permanents ont tous y recours à leur veto même si c'est à des degrés divers. La Russie et la Chine totalisent, prises ensemble ou isolément, une bonne centaine de ces vetos. La France environ seize fois. Les Etats-Unis ont opposé leur veto plus de quatre vingt fois au moins. Le Royaume-Uni à une trentaine de fois. Dans tous ces vetos, ce qu'on remarque c'est qu'ils peuvent être opposés soit par un seul membre permanent soit par plusieurs à la fois. Toutefois, il convient de remarquer que les alliances se passent essentiellement entre la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ; la France et le Royaume-Uni, Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ou entre la Russie et la Chine. Jamais, pendant cette période considérée, les anciens pays de l'Est n'ont opposé un veto en collaboration avec ceux de l'Ouest. Ce qui témoigne d'une vision toujours antinomique des grands problèmes du monde entre ces deux camps. Cela prouve aussi que l'opposition entre ces anciens blocs subsiste encore. On a peut être trop vite crié à leur disparition...

Les Etats-Unis opposent systématiquement leur veto à toute résolution visant Israël qui, pourtant, de manière flagrante et continue, viole le droit international. En 2011, les Etats-Unis se sont ainsi opposés à un projet de résolution qui réaffirmait que « les colonies de peuplement israéliennes établies sur le territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, sont illégales et constituent un obstacle majeur à l'instauration d'une paix globale, juste et durable »tout en « condamnant la poursuite des activités d'implantation de colonies par Israël, Puissance occupante, dans le territoire palestinien occupé (...) »73. Parallèlement, les Russes et les Chinois s'opposent farouchement à toute résolution comportant des sanctions de type militaire contre le régime syrien et excluent toute éventualité d'une intervention armée dans ce pays.

71 - Cette fourchette a été choisie arbitrairement pour donner une simple indication du phénomène en question.

72 - Ce décompte est approximatif et ne prend pas en compte les vetos intervenus ultérieurement. Pour plus de précision, voir sur le site officiel de l'ONU www.un.org

73 - Document S/2011/24 du 18 février 2011, ONU.

Cheikh Kalidou NDAW, Mémoire de Maîtrise Droit Public, option Droit des Collectivités Locales, UFR SJP, UGB, 2012-2013.

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Le droit de veto et la responsabilité de protéger des Nations Unies

Le jeu des alliances réduit ainsi le système de sécurité collective telle une peau de chagrin. Le mécanisme de la responsabilité de protéger, lui aussi, s'en retrouve fortement mis en mal. Au même moment l'action de l'ONU devient davantage tributaire du bon vouloir des grandes puissances. Ces dernières monnaient leur responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales contre des alliances stratégiques. Les propos de DEFARGES trouvent dès lors tout leur sens lorsqu'il affirme que : « Le Conseil de Sécurité, qui pourrait être l'enceinte de la mise en oeuvre du droit d'ingérence (responsabilité de protéger), rassemble des Etats avec leurs intérêts propres de puissance ; toute décision du Conseil est un compromis entre ces intérêts et reflète plus ou moins l'équilibre politique du moment »74. C'est ainsi qu'il va régner un sentiment d'une justice à double détente dans la mise en oeuvre de la responsabilité de protéger incombant à la Communauté Internationale. On aboutit dès lors à une sélectivité des interventions armées.

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