Paragraphe 2 : La préservation de la paix et de
la sécurité internationales
La paix et la sécurité internationales
constituent des enjeux majeurs pour la Communauté Internationale. C'est
ce qui justifie que parmi les objectifs assignés à l'ONU, on peut
relever, en bonne place, celui qui consiste à « Maintenir la
paix et la sécurité internationales »62.
Il est aujourd'hui très largement admis que les
violations massives des droits humains fondamentaux, quand bien même
elles ont lieu à l'occasion d'un conflit non international, constituent
des menaces à la paix et la sécurité internationales. Pour
rappel, l'article premier du deuxième Protocole additionnel aux
Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la
protection des victimes des conflits armés non internationaux
définit ces conflits comme ceux « qui se déroulent sur
le territoire d'une Haute Partie contractante entre ses forces armées et
des forces armées dissidentes ou des groupes armés
organisés qui, sous la conduite d'un commandement responsable, exercent
sur une partie de son territoire un contrôle tel qu'il leur permette de
mener des opérations militaires continues et concertées et
d'appliquer le présent Protocole ».
Dès lors, la garantie de la sécurité
humaine passe nécessairement par une prompte capacité de la
communauté internationale à mettre en oeuvre sa
responsabilité de protéger qui devient ainsi un
élément incontournable de la sécurité collective.
La moindre défaillance de cette dernière emporte des
conséquences inouïes sur la sécurité de
l'humanité toute entière. Cet enjeu a été bien
appréhendé et rappelé par la CIISE qui fait remarquer que
: « Dans un monde interdépendant où la
sécurité suppose la présence d'un cadre constitué
d'entités souveraines
62 - Art. 1 § 1 de la CNU.
Cheikh Kalidou NDAW, Mémoire de Maîtrise Droit
Public, option Droit des Collectivités Locales, UFR SJP, UGB,
2012-2013.
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Le droit de veto et la responsabilité de protéger
des Nations Unies
stables, l'existence d'États fragiles,
d'États défaillants, d'États qui offrent un refuge
à des individus dangereux, que ce soit par faiblesse ou par
malveillance, ou d'États qui ne peuvent maintenir l'ordre interne qu'en
commettant des violations flagrantes des droits de l'homme, peut constituer un
risque pour tous les peuples, quelle que soit leur situation
géographique »63. On assiste ainsi à une
collectivisation des risques à la laquelle la Communauté
Internationale, compte tenu de sa configuration actuelle, ne peut que
répondre de manière imparfaite. C'est du moins ce que pensent
certains auteurs qui trouvent que « la conciliation de la
sécurité étatique et de la sécurité
internationale au sens large exige un véritable pouvoir exécutif
international. Or les Etats ne sont pas prêts à l'accepter, ce qui
introduit un déséquilibre dans le mécanisme de
sécurité internationale »64. A défaut
de cet idéal d'organisation, la seule voie de salut semble
résider dans une capacité rapide de mise en branle de la
sécurité collective.
Toutefois, il faut bien reconnaitre que la paix n'est pas
seulement le silence des armes. Il est désormais admis qu'elle a aussi
des composantes d'ordre social et économique. Dans son « Agenda
pour la paix » présenté en 1992 à l'occasion du
cinquantenaire de l'ONU, le Secrétaire général d'alors, M.
BOUTROS-GHALI, notait que « Les guerres et les conflits ont de
profondes racines. Pour les atteindre, il nous faudra déployer tous les
efforts dont nous sommes capables en vue de renforcer le respect des droits de
l'homme et des libertés fondamentales, favoriser le développement
économique et social durable, si nécessaire a une
prospérité plus grande, soulager la misère et
réduire les arsenaux d'armes de destruction massive ou, au moins, en
restreindre l'emploi»65. Il en résulte qu'il faut
nécessairement jouer sur la complémentarité entre la
sécurité humaine et la responsabilité de protéger
pour gagner le défi de la paix et de la sécurité
internationales qui, désormais, ne peut être entièrement
relevé par la mise en oeuvre exclusive de l'une de ces deux notions.
Chacune d'elle a son rôle à jouer dans la recherche de
l'idéal de paix et de sécurité qu'incarne la Charte des
Nations Unies.
Au-delà de tous ces facteurs qui illustrent une absence
de congruence entre le droit de veto et la responsabilité de
protéger, il est nécessaire, dans l'intérêt de toute
l'Humanité, que la Communauté Internationale trouve un terrain
d'entente pour les concilier. Même si la réussite n'est pas
toujours au rendez-vous, elle essaie tant bien que mal de forger une pratique
dans ce sens.
63 - CIISE, op. cit., pp 5-6.
64 - QUOC DINH, (N) et al. op. cit. p. 1093
65 - Rapport du SG de l'ONU, (1992), « Agenda pour la paix
», Document s A/47/277 et S/24111.
Cheikh Kalidou NDAW, Mémoire de Maîtrise Droit
Public, option Droit des Collectivités Locales, UFR SJP, UGB,
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Le droit de veto et la responsabilité de protéger
des Nations Unies Titre Deuxième : La tentative de conciliation
par la pratique internationale
Pour résumer l'analyse de cette tentative de
conciliation par la pratique internationale, on pourrait dire que
l'intérêt général n'est pas forcément la
somme des intérêts particuliers. Or le droit de veto et la
responsabilité de protéger plongent la Communauté
Internationale, surtout les membres permanents du Conseil de
sécurité, dans un dilemme quasi insoluble : faut-il faire passer
les intérêts nationaux avant ceux de la Communauté
Internationale ou faire le contraire ? La réponse n'est jamais claire.
Cela rend ainsi la conciliation mitigée (Chapitre I) et
l'effectivité de la responsabilité de protéger pour le
moins contrastée (Chapitre II).
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