2.1.3.2. Approche socio-culturelle
Cette approche défend la thèse selon laquelle la
sexualité ne saurait être un phénomène isolable,
mais elle s'inscrit dans les normes et les valeurs culturelles de chaque groupe
social (Rwenge, 1999.a). Par conséquent, ces normes et ces valeurs
(socio-culturelles) en matière de sexualité déterminent
les comportements sexuels des individus et les manières dans lesquelles
l'activité sexuelle se fait. En effet, elle inscrit ces comportements
dans une perspective obéissant à une organisation
sociale6 fondée sur les normes, les valeurs et modèles
socioculturels de chaque société. Généralement
cette organisation est de type "traditionnel" et "moderne". Dans ce sens, nous
l'aborderons selon ces deux dimensions organisationnelles.
a. La dimension "traditionnelle" de l'approche
socio-culturelle
De cette dimension, il ressort que dans chaque milieu social
les normes, les valeurs et les modèles traditionnels socio-culturels
influencent les comportements sexuels des individus et certaines pratiques
traditionnelles (les mutilations génitales, le besoin de
procréation, l'héritage et rituel de purification de la veuve ou
de l'épouse, la polygamie, la polyandrie, le lévirat, le
sororat...). Elle se focalise sur deux variables pertinentes en relation avec
ces comportements et quelques de ces pratiques à savoir : l'ethnie et la
religion. Evina Akam (2007 : 14) indique que : « le contexte culturel
est généralement approché par deux variables clés :
l'ethnie et la religion ».
6 Elle exprime un mode de relation et de fonctionnement
régissant les individus en société.
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 31
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
? L'ethnie
Wakam (1994), souligne que l'ethnie en tant que lieu de
production et de manifestation par excellence des modèles culturels
spécifiques, apparaît ainsi comme un élément
important dans l'étude des sociétés africaines dont la
population est généralement composée de plusieurs groupes
culturels. Elle est une variable considérable d'identification sociale
d'un groupe jouant un rôle important dans la transmission du VIH/SIDA de
par la différenciation des comportements sexuels des individus ainsi que
la vulnérabilité des femmes par rapport à cette
transmission issue des pratiques traditionnelles.
En effet, les croyances, les perceptions, les attitudes, les
valeurs, les normes, les moeurs, les comportements, les pratiques,... relatifs
au modèle traditionnel socio-culturel constituent des
éléments fondamentaux sur lesquels l'ethnie influe. Selon Mudubu
(1996), la variable ethnie agit plus à travers les croyances, les
perceptions, les attitudes, les valeurs relatives au modèle culturel de
référence. L'ethnie peut être aussi entendue comme un
groupe social qui pour Rwenge (2001) constitue le cadre de reconnaissance et de
valorisation des pensées et pratiques en adéquation avec la vie
sociale et le système socio-culturel.
Dans certaines ethnies, les rapports sexuels ainsi que la
fécondité avant le mariage sont strictement prohibés. La
virginité des filles avant le mariage est une valeur sociale
revêtant l'honneur familial voire communautaire. C'est le cas au
Bénin où la plupart des coutumes exigent que la femme n'ait ses
premiers rapports sexuels qu'après le mariage (Daga J., 2007). Ce qui
n'est pas possible dans d'autres ethnies où cette pratique est au
contraire tolérée et admise par la communauté
traditionnelle, c'est le cas chez les Béti du Cameroun, les Kongo du
Congo Brazzaville et les Mongo de la République Démocratique du
Congo (Rwenge, 1999.a ; Emina, 2005 ; Kalambayi, 2007).
Généralement dans ces dernières l'on observe aussi une
précocité élevée des rapports sexuels, ce qui
exposerait les jeunes filles aux MST/IST. Les études de Rwenge (1999 ;
2001) confortent cette hypothèse. Il ressort qu'à Bamenda
l'appartenance ethnique aux groupes Tikari-Soh et Bamiléké est
positivement associée au risque pour les jeunes d'être
sexuellement actifs avant 16 ans. De même qu'en Côte d'Ivoire, il a
été aussi observé que les filles krou et Sénoufo
(ou Malinké) sont plus susceptibles que leurs consoeurs Akan d'avoir des
rapports sexuels avant 16 ans (Talnan et al., 2002).
La multiplicité des partenaires sexuels pour les femmes
s'inscrit dans un ordre culturel pour certaines ethnies. Au Cameroun, Rwenge
(2001) a constaté que le multi partenariat est
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 32
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
une conduite observée plus chez les jeunes appartenant
aux ethnies Bamiléké, Metta, et les autres ethnies du Nord-ouest.
En effet, les femmes qui entretiennent une relation à long terme avec
plusieurs hommes ayant des partenaires sexuelles multiples peuvent contracter
le VIH en fonction des comportements sexuels de leur partenaire, sur lequel
elles exercent un contrôle très limité.
Au Cameroun, chez les Bëti tout comme chez les
Bamiléké, la recherche du plaisir sexuel serait la principale
raison du multi partenariat chez les hommes. Par contre, chez les femmes les
contraintes économiques étaient la principale raison du multi
partenariat (Rwenge, 2002). Par exemple, les Bamiléké dont les
moeurs sexuelles sont rigides ont un risque plus moins d'utiliser les condoms
pendant les rapports sexuels que les Bëti, où les moeurs sexuelles
sont permissives (Rwenge, 2002). Chez les Yagba au Nigeria et les Bëti du
Cameroun, il existe une coutume selon laquelle la meilleure manière pour
un homme de prouver son amitié à un autre homme est de lui
accorder une nuit avec son épouse comme marque d'amitié
indéfectible (Rwenge, 2002). Ce genre de pratiques rendent
vulnérables les femmes aux MST/IST.
Les pratiques d'héritage et des rites sexuels de
purification de la femme ou de la veuve sont encore présentes dans
certaines ethnies de l'Afrique subsaharienne lors du décès de
leur mari. S'agissant de l'héritage de la veuve, un proche du mari
décédé prend cette veuve pour épouse, quelquefois
dans un cadre polygame. Pour ce qui est des rites sexuels de purification, la
famille du décédé organise une relation sexuelle de fois
non protégée avec un étranger payé par cette
dernière afin de la nettoyer des mauvais esprits du défunt.
Ainsi, ces femmes subissent ces pratiques avec le risque d'être
infectées par le VIH car les refuser conduirait à l'exclusion
sociale ou au viol (HRW, 2005). Dans cette perspective, Caldwell et al. (1993)
estiment que dans l'ordre des facteurs à risque proprement culturels, en
l'occurrence, certaines pratiques sociales traditionnelles comme la polygynie,
le lévirat, le sororat qui sont propices à la déviance
sexuelle, joueraient un rôle important dans la diffusion du VIH. D'autres
pratiques traditionnelles comme l'excision et les mutilations génitales
féminines, la circoncision masculine peuvent également entrainer
l'infection à VIH/SIDA pendant et après l'ablation dans la mesure
où il y a rapport sexuel avant la cicatrisation de la plaie avec un
individu contaminé.
Dans la plupart des ethnies africaines, la femme ne peut en
aucun cas décider sur sa sexualité autrement dit de nombreuses
femmes n'ont pas le pouvoir de décider avec qui,
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 33
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
quand et comment se déroulent leurs relations sexuelles
(Hargreaves et Boler, 2006) surtout au sein des peuples ancrés dans la
culture traditionnelle. En réalité, l'ethnie est une des
variables de base pour l'analyse des faits de population en Afrique. Car elle
constitue en effet le lieu de production et de reproduction des modèles
culturels qui modulent le comportement des individus (Evina Akam, 2007).
? La Religion
La religion est une croyance en un principe supérieur
dont dépend la destinée humaine ou un système de croyances
et de pratiques propre à un groupe social (Dictionnaire Le Robert,
2005). En effet, la vie des religieux est régie par un ensemble de
perceptions, de conceptions, de principes,... inscrit dans un système de
croyances auquel ceux-ci doivent se conformer, on parlerait du respect au
dogme7. Elle peut être définie comme un système
institutionnalisé de croyances, de symboles, de valeurs et pratiques
relatives (Akoto et al., 2002.a).
Appartenir à une religion ou une confession religieuse
revient à intégrer, et à se conformer à ce qui la
régi. Dans cette optique, la Bible (Nouveau Testament) affirme dans 2
Corinthiens 5 : 2 que « si quelqu'un est en Christ, il est une
nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici,
toutes choses sont devenues nouvelles ». Par conséquent, les
comportements individuels ainsi que sexuels peuvent aussi être
influencés par la religion. L'appartenance à une religion peut
modifier l'activité sexuelle des individus et leur propension à
adopter un comportement sexuel à risque (Yana, 1995).
Cependant, la religion n'aborde pas le domaine de la
sexualité de manière claire surtout en ce qui concerne les
jeunes. D'après Rwenge (1999.b : 229) « Un autre reproche fait
à ces programmes est qu'ils s'adressent surtout aux adultes et non aux
jeunes : pourtant ceux-ci constituent une part importante de la population
sexuellement active, mais la moins informée sur les conséquences
néfastes d'une sexualité libre.». Aussi, l'utilisation
des préservatifs comme moyen de lutte contre le SIDA lors des rapports
est peu considérée voire même interdite dans certaines
religions. Dans ce sens, Zoungrana (1999.a) affirme que la résistance
des religions aux messages de prévention a été mise en
évidence au Burkina Faso où certaines congrégations
religieuses ont farouchement combattu les programmes de promotion sociale du
préservatif longtemps perçu comme un moyen de dépravation.
C'est le
7 Point de doctrine regardé comme une
vérité incontestable (dans une religion, une école
philosophique) (Dictionnaire Le Robert, 2005).
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 34
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
cas chez les Catholiques où l'usage du
préservatif est strictement interdit car il serait la cause de la
promotion de la promiscuité et des comportements sexuels
indésirables.
La plupart des religions ont établi des règles
liées à la nuptialité (avec ses différentes formes
si possibles), et à la sexualité (généralement
permise dans le cadre du mariage et non avant le mariage). C'est le cas de la
religion chrétienne qui condamne certaines pratiques comme les relations
sexuelles avant le mariage, l'homosexualité, la bisexualité,
l'échangiste, le multi partenariat sexuel, la masturbation, et le fait
de faire l'amour autrement que pour avoir un enfant est interdit...( Lepycouche
S., 2008). Pour les religieux, ce genre de pratiques a engendré
l'avènement du VIII/SIDA. Mais Dakuyo et al (2002) écrivaient que
le faible niveau de connaissance des leaders religieux sur le VIII/SIDA a
également une influence sur la perception des populations et favorisent
la progression de la pandémie. C'est ainsi que l'épidémie
paraît, pour certains d'entre eux comme une punition et un avertissement
à l'humanité afin qu'elle change de comportements et revienne au
droit chemin.
Selon le Rapport d'un atelier théologique
consacré à la stigmatisation liée au VIII et au SIDA
(ONUSIDA, 2005.a : 12) : « les chrétiens ont souvent
présenté un modèle de Dieu vindicatif qui inflige le VIH
et le SIDA comme punition du péché. Nous croyons, au contraire,
que Dieu est un dieu de compassion qui se réjouit de la création.
Le VIH est un virus (très dangereux pour l'être humain) mais pas
une punition divine du péché ». Certains responsables
religieux pensent que l'utilisation du préservatif s'avère
importante dans une certaine mesure, c'est le cas du Cardinale Lebouche (2007)
qui pense que l'utilisation de préservatifs dans certaines situations
peut être considéré moralement légitime pour
prévenir la diffusion du SIDA. Le virus se transmet à travers un
acte sexuel et ainsi à côté de la vie, il y a le risque de
transmettre aussi la mort. C'est dans ce sens qu'est valable le
7ième commandement de la Bible (Exode 20 : 13) qui stipule
que « tu ne tueras point » en défendant la vie avant tout.
Ainsi, « certaines religions sont ainsi ouvertes au
« modernisme », comme les religions chrétiennes ; d'autres,
par contre, sont restées longtemps attachées aux modèles
culturels traditionnels, comme l'Islam au Cameroun » (Evian Akam,
2007 : 14). C'est le cas du mariage monogame chez les chrétiennes alors
que chez les musulmans l'on peut être monogame ou polygame. Dans les deux
religions l'on peut observer plus ou moins les risques de transmission du
VIII/SIDA. Enfin, la religion d'une manière globale porte certains
aspects qui peuvent aussi contribuer à l'explication de la
prévalence du VIII/SIDA.
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 35
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
b. La dimension "moderne" de l'approche
socio-culturelle
Le changement des comportements sexuels dans la
société peut être influencé par les
éléments liés à la modernité. En effet, le
processus de modernisation favorise la dépravation des valeurs
culturelles (Nouetagni, 2010). Il participe à la diminution du
contrôle social en matière de sexualité. Par ailleurs, le
milieu de socialisation, le milieu de résidence, l'instruction et la
scolarisation, et l'exposition aux médias s'améliorent avec cette
même modernité. Bien qu'elle soit un atout pour le
développement de l'homme et de sa prise de conscience en matière
de SIDA. Cependant, la modernisation stimule la connaissance des IST/VIH/SIDA,
mais elle ne garantit pas pour autant leur santé sexuelle, et aussi elle
n'est pas un facteur réducteur du risque d'en être
contaminé (Tolno, 2007).
? Milieu de socialisation et milieu de
résidence
La socialisation est défini comme un processus par
lequel la personne humaine apprend et intériorise tout au cours de sa
vie les éléments socioculturels de son milieu, les intègre
à la structure de sa personnalité sous l'influence
d'expériences et d'agents sociaux significatifs et par là
s'adapte à l'environnent social où elle doit vivre (Guy R.,
1970). Cet auteur met en relation la socialisation et le milieu dans lequel ce
processus s'effectue.
Dans cette même lignée, le milieu de
socialisation désigne « le lieu physique et culturel dans
lequel la femme a passé son enfance, c'est-à-dire de la naissance
à l'âge nubile (12 à 14 ans). Dans la plupart des
études sur la fécondité, le milieu de socialisation est
souvent étudié en opposant le milieu rural au milieu urbain. Mais
cette opposition sous-entend une autre entre les cultures dites traditionnelles
et celles dites modernes » (Evina Akam, 2007 : 5). A cet effet, le
milieu de socialisation est différent du milieu de résidence
(urbain, rural). Ainsi, l'individu qui, ayant subi sa socialisation dans le
milieu urbain n'a pas les mêmes habitudes que celui qui l'a subi dans le
milieu rural. Cependant, entre l'urbain et le rural, on observe un grand
écart du point de vue culturel, car selon Fassassi (1994 : 15) :
« Le cadre urbain offre par exemple une kyrielle d'opportunités
susceptibles d'infléchir la position de la femme africaine,
traditionnellement passive vis-à-vis de l'ordre socialement
établi ». Or, acquérir une socialisation dans un milieu
rural conduirait à consolider un certain nombre de pratiques, croyances,
normes, traditions relevant du contrôle social et différentes de
celles du milieu urbain.
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 36
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
Ainsi, les comportements sexuels des individus sont
influencés par la socialisation en fonction du milieu de
résidence. A chaque milieu de socialisation, à chaque milieu de
résidence correspond un ensemble de pratiques sexuelles
spécifiques. Le milieu rural caractérisé par une forte
présence d'un contrôle social est le lieu où la tradition
est respectée, généralement les pratiques sexuelles
relevant de celui-ci sont inscrites dans l'ordre traditionnel. Par contre, le
milieu urbain qui de par sa diversité culturelle, l'urbanisation et la
modernisation constitue un cadre de vie où la sexualité apparait
comme ce qu'on pourrait qualifier de désorganisation
sociale8. Sawadogo (2001) nous en donne une explication, dans le
premier milieu il existe une certaine homogénéité
culturelle qui joue en faveur du contrôle social tandis que le second est
hétérogène.
En effet, les phénomènes comme la prostitution,
le commerce sexuel, le vagabondage sexuel prennent corps en milieu urbain, ce
qui rendrait plus vulnérables les femmes vivant dans ce milieu au
VIH/SIDA, car selon Niekerk (2002 : 10) : « this is an environment
very conducive to the flourishing of the AIDS epidemic ». Les milieux
urbains africains sont actuellement les lieux où les transformations des
modèles culturels dits traditionnels par ceux qualifiés de
modernes sont les plus visibles et les perceptibles (Evina Akam, 2007). Au Mali
par exemple lors de l'EDSM-III réalisé en 2001, il ressort que la
séroprévalence est plus élevée en milieu urbain
qu'en milieu rural. Madrama (2003: 9) pense que : « men who move to
urban centres for work end up seeking other women, thereby promoting a risky
sexual culture, whilst the circumstances and environment of the wives who are
left in the rural home may be comparably risk-prone». Ainsi,
l'exposition au VIH/SIDA est plus élevée en milieu urbain qu'en
milieu rural. Le milieu de résidence pendant l'enfance décrit le
lieu physique de socialisation tandis que l'ethnie et la religion vont
définir les influences culturelles en matière de reproduction et
de genre en particulier (Evina Akam, 2007).
? Niveau d'instruction et scolarisation
« L'éducation est essentielle au succès
contre la pandémie. En fait, l'UNICEF reste convaincu que tant que l'on
n'aura pas découvert un remède efficace, l'éducation est
un des moyens les plus efficaces d'enrayer la propagation du
VIH/SIDA» (Bellamy, 2004).9 L'éducation ou
l'instruction renvoie à l'ouverture aux idées (de l'occident) en
acquérant des connaissances dans divers domaines et même en
matière de lutte contre le VIH/SIDA. De nos
8 C'est le relâchement du control social du fait de la
disparition progressive du contrôle des aînés sur les
cadets, en raison de l'introduction et de la diffusion des valeurs
occidentales. Ou un dysfonctionnement social.
9 Message de Carol Bellamy, Directeur Général de
l'UNICEF in UNICEF 2004.
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 37
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
jours, l'éducation en particulier celle des filles (ou
femmes) est perçue comme un moyen à travers lequel celles-ci
peuvent acquérir les connaissances afin de mieux conduire leur vie
sexuelle tout en évitant certaines pratiques néfastes pouvant les
rendre vulnérables au SIDA.
D'après l'UNICEF (2004) il apparaît donc
clairement qu'en l'absence de vaccin, donner une éducation de
qualité à tous les enfants est l'un des meilleurs moyens de
protéger tant les droits que la vie des jeunes menacés par le
VIII/SIDA. Bien que l'éducation soit un atout, elle agit sur la
capacité des filles et des femmes à revendiquer d'autres droits
et à acquérir un statut social considérable, à
atteindre l'indépendance financière ou améliorer leur
représentation en politique (UNESCO, 2006). Ce qui permettrait à
celles-ci d'avoir une parcelle de décision sur leur sexualité.
L'acquisition de ces connaissances en matière de lutte contre le
VIII/SIDA les conduirait à éviter les comportements sexuels
à risque. Car une action plus soutenue de sensibilisation par
l'éducation et de prévention du VIII pourrait protéger 29
millions de personnes contre l'infection d'ici 2010 et faire chuter d'un quart
les taux d'infection par le VIII chez les jeunes (UNICEF, 2003).
En effet, l'éducation sexuelle des filles revêt
un avantage considérable, des études ont tenté de lever
l'équivoque sur le rôle de l'éducation sexuelle des jeunes
dans la modification de leurs comportements sexuels (Rwenge, 1999.b). Dans une
note d'information de l'ONUSIDA (2004) ressort que « les filles qui
restent plus longtemps à l'école et à qui on inculque les
compétences psychosociales ainsi qu'une éducation sexuelle,
retardent le moment de leur première expérience sexuelle, en
savent davantage sur la prévention du VIH ». Pour Rwenge
(1999.a), l'école et les nouvelles activités
récréatives éloignent souvent les jeunes des adultes...les
jeunes sont sous contrôle des parents...il s'en suit le
développement de l'activité sexuelle précoce de
ceux-là qui a été observé dans la plupart des
villes africaines. Cette précocité les expose aux
MST/IST, ainsi « En Guinée, tout comme dans la plupart des pays
d'Afrique subsaharienne, l'éducation sexuelle était
coutumièrement promue avec efficacité parce que les rapports
sexuels étaient essentiellement pratiqués dans un cadre nuptial.
Or, ceux-ci ont de plus en plus lieu hors union et de fait, ils favorisent la
prolifération des Infections Sexuellement Transmissibles (IST) dont la
pandémie du VIH/SIDA. » Tolno (2007 : 3).
Cependant, la situation la plus répandue est celle de
la sous scolarisation des filles surtout dans le contexte africain où
parler de la sexualité aux jeunes est perçu comme un sujet tabou.
Cette sous scolarisation les expose à l'entrée précoce en
vie sexuelle, à la maternité, au
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 38
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
mariage et aux MST/IST. Dans ce sens, Rwenge (2002) indique
qu'avec leur niveau faible d'instruction, les femmes n'ont pas les informations
fiables sur les MST/SIDA et leur prévention, lesquelles sont
indispensables à leur prise de conscience des risques associés
à la sexualité et au changement de leurs attitudes et
comportements dans ce domaine.
? Exposition aux médias
L'acquisition des connaissances confère la
capacité aux filles et femmes d'accéder à certaines
informations en matière de lutte contre le SIDA par le biais des masses
médias telles que : la télévision, la radio, les journaux,
les affiches, les banderoles, l'internet,... D'après l'ONUSIDA (2006),
les médias reflètent en même temps qu'ils façonnent
la culture et les normes sociales. Ce sont des vecteurs de socialisation et un
moyen efficace d'atteindre la population et de renforcement de la
sensibilisation sur le SIDA. Les médias possèdent un potentiel
sans pareil d'informer et d'instruire le grand public (ONUSIDA, 2006). Le plus
souvent en Afrique ces masses médias sont beaucoup plus concentré
en milieu urbain qu'en milieu rural du fait de l'urbanisation et de la
modernité. Ce qui pose un problème de diffusion de l'information
en milieu rural. Ainsi, un grand nombre de population n'a pas accès
à l'information et à la connaissance du VIH/SIDA par le manque de
moyen de communication.
La sensibilisation sur le VIH/SIDA et l'utilisation du condom
n'ont pas produit jusqu'ici des résultats satisfaisants concernant les
programmes pour la promotion de l'éducation sexuelle dans les milieux
ruraux. Cela serait dû, entre autres, à la concentration dans les
villes des infrastructures socioéconomiques (médias, journaux,
centre de santé). Nonobstant les efforts consentis dans les villes
d'Afrique subsaharienne, une frange importante de la population reste encore
mal informée sur le SIDA, les modes de prévention de cette
maladie, et n'a donc pas encore modifié son comportement sexuel.
(Rwenge, 1999.a). L'échec de ces programmes pourrait résulter du
niveau de compréhension des populations cibles lors de la phase de
sensibilisation. Ainsi, Zoungrana (1999.b) affirme que les programmes nationaux
de sensibilisation sur le SIDA ont eu très peu de succès à
cause de la difficulté qu'éprouvaient les populations à
assimiler les arguments scientifiques relatifs aux mécanismes et aux
causes de la maladie avancés par la médecine moderne.
Mais avant toute sensibilisation surtout en matière de
VIH/SIDA, la nécessité d'intégrer les
éléments contextuels socio-culturels et sexuels des individus
dans lequel la sensibilisation s'effectuera, s'avère capitale. Ceci
permettra de bien orienter les messages à
KINSAKIENO Pierre Rostin, Mémoire de fin de formation,
Octobre 2012 Page 39
Modernité et prévalence du VIH/SIDA chez les
femmes en République du Congo.
véhiculer afin que la population les comprenne sans
ambiguïté. Dans la mesure où ce contexte semble être
ignoré par ces programmes, ceci pourrait aussi expliquer en partie leur
échec. C'est pourquoi selon Messanga (2009 : 271) : « Les
médias montrent les malades, les font parler. Ils montrent les morts et
font parler les familles des victimes ; ils montrent les orphelins et "les
localités décimées", toutes choses qui se donnent comme
les éléments "palpables" de la réalité du SIDA.
Celle-ci est perçue dès lors dans la perspective objective. Le
public, à travers ces opérations de monstration, a l'impression
de "voir le SIDA". ». Ce genre d'illustration influe de façon
sensible sur la conscience des individus.
La dimension "traditionnelle" et "moderne" de l'approche
socioculturelle jouent un rôle très prépondérant
dans l'explication de la transmission du VIH/SIDA chez les femmes et de leur
vulnérabilité. Dans cette lignée, « Les
modèles culturels sont en perpétuel renouvellement, les
modèles dominants pouvant à tout instant être
remplacés par des modèles déviants. On assiste ainsi,
petit à petit, au remplacement des modèles culturels dits
traditionnels par ceux qualifiés de modernes. » Evina Akam
(2007 : 14). Il serait important de parcourir aussi la contribution
apportée par d'autres approches explicatives comme l'approche
socio-économique afin de mieux appréhender notre objet
d'étude.
|