1.3. MESURES COLLECTIVES POUR DIMINUER LE RISQUE
D'INFECTION D'UN MALADE HOSPITALISE
1.3.1. Mesures générales
a) Mise à disposition de
moyens
L'indispensable préambule à la mise en oeuvre de
la prévention des infections liées aux soins est la prise de
conscience à tous les niveaux, depuis les bureaux ministériels
jusqu'aux centres de santé les plus reculés. Cette
démarche doit conduire à transférer une partie des moyens
depuis les soins curatifs vers la prévention. La modification attendue
des pratiques passe autant par la mise à disposition de moyens
adéquats, humains et matériels, que par l'éducation des
acteurs. Sa condition sine qua none est un effort financier
adapté des états, des bailleurs de fonds et des acteurs
privés impliqués (3).
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Théo. MITIMA K., Mémoire de Maitrise en
santé publique, 2e promotion SACO
b) Education et communication
L'éducation des professionnels de santé doit
être une priorité. De nombreuses enquêtes ont en effet
montré la mauvaise connaissance des soignants Africains sur les mesures
simples de prévention du risque nosocomial (24). Des enseignements
spécialisés dans les facultés de médecine et les
écoles d'infirmières, ainsi que des formations postuniversitaires
régulières, doivent être mis en place ou
renforcés.
L'évolution des représentations mentales est en
effet un processus long et difficile, en Afrique comme ailleurs. Ces
enseignements peuvent relever de la responsabilité des comités
locaux de lutte contre les infections nosocomiales. Pour être
opérationnelles, les recommandations de bonnes pratiques mises à
disposition des soignants doivent être adaptées aux conditions
locales d'exercice et au niveau des différents personnels.
Les autorités locales ou nationales ont alors la charge
de rédiger les protocoles, d'identifier des indicateurs pertinents et
surtout d'instaurer une culture de l'évaluation des pratiques
professionnelles, seule garante d'une continuité des actions
préventives.
La sensibilisation et la responsabilisation des industriels du
médicament et du biomédical sont également
nécessaires pour tenter de maîtriser les risques infectieux
liés aux soins. Ainsi, l'impact non négligeable des visiteurs
médicaux sur les prescriptions excessives ou inadaptées
d'antibiotiques peut avoir des effets délétères par une
pression de sélection exercée sur les bactéries. Des
partenariats public-privé sont nécessaires pour développer
et produire des dispositifs médicaux plus sûrs et à moindre
coût, si possible par transfert de technologies (4).
Enfin, des campagnes d'information publique destinées
à la population générale peuvent permettre de
réduire les pratiques à risque, même si le faible niveau
d'alphabétisation et la puissance des croyances populaires sont deux
véritables obstacles. Une des premières cibles pourrait
être d'éviter le recours
massif et abusif aux injections en Afrique, qui repose en
partie sur la croyance répandue qu'un traitement injecté est plus
efficace qu'un traitement per os (5).
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Théo. MITIMA K., Mémoire de Maitrise en
santé publique, 2e promotion SACO
c) Notification et recensement des
cas
La surveillance locale des infections nosocomiales est un axe
important de prévention mis en avant par l'OMS. Les infections de sites
opératoires et les infections par BMR sont en particulier redevables
d'un suivi ciblé. Reposant sur la déclaration obligatoire et le
recensement, la surveillance fournit des informations
épidémiologiques indispensables à la mise en place de
mesures adaptées et à l'évaluation de leur
efficacité. Elle permet aussi, et peut-être surtout, de
sensibiliser les soignants et de les aider à identifier et à
corriger leurs pratiques à risque, et finalement, de réduire ces
risques pour leurs patients et pour eux-mêmes (6). Il est certain que
cette surveillance peut passer pour un voeu pieux quand le personnel
compétent et volontaire et les outils de détection font
défaut. Néanmoins, instaurer cette démarche est une
étape essentielle pour engager une culture de prévention des
infections nosocomiales. Dans un premier temps, cette surveillance doit
être restreinte aux infections jugées prioritaires suivant leur
impact en termes de prévalence, de morbidité, de
létalité, d'évitabilité....
d) Réorganisation des soins et des
pratiques
La prévention des infections nosocomiales relève
de la responsabilité de chaque service et de chaque soignant. Sa mise en
place impose des changements dans l'organisation des pratiques de soins, au
mieux sous l'égide d'un comité ad hoc dans les
structures hospitalières (7). Il s'agit notamment d'aboutir à une
plus stricte observance des précautions universelles, au lavage des
mains, au maintien d'une hygiène satisfaisante, à l'utilisation
correcte des matériels, au recensement systématique et
honnête des infections nosocomiales... En ce qui concerne l'isolement des
patients contagieux, le regroupement géographique des patients atteints
d'une même pathologie contagieuse ou « cohorting » peut
constituer une alternative efficace et de moindre coût à la
construction de chambres individuelles, généralement
réservées aux patients les plus riches (8). Enfin, chaque
établissement ou, à défaut, chaque praticien devrait
s'impliquer dans une politique de bon usage des antibiotiques (protocoles
thérapeutiques écrits) pour réduire la pression de
sélection qui aboutit à l'émergence de bactéries
multirésistantes
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Théo. MITIMA K., Mémoire de Maitrise en
santé publique, 2e promotion SACO
(BMR). Il est certain que la surveillance des
résistances n'est pas une pratique généralisable à
chaque structure, mais un site provincial de référence
paraît utile pour suivre leur évolution.
e) Recherche sur les infections nosocomiales
(incidence, déterminants, impact...) Il est paradoxal
de noter qu'à l'efflorescence des recommandations de bonnes pratiques
cliniques, s'oppose l'indigence de la connaissance des infections liées
aux soins en Afrique intertropicale (9-10). Une mobilisation est
nécessaire pour préciser leur prévalence, leur impact et
leurs multiples déterminants (biologiques, structurels, culturels...).
Une meilleure connaissance des déterminants anthropologiques du recours
massif aux injections ou des pratiques délétères
d'hygiène notamment hospitalière peut optimiser les mesures
préventives (5,11).
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