SECTION 3 : LE DEVELOPPEMENT DES ECHANGES
INTRACOMMUNAUTAIRES ET LES PERSPECTIVES
A. LE DEVELOPPEMENT DES ECHANGES INTRACOMMUNAUTAIRES
La mise en place d'une union douanière impose deux
tâches immédiates et séquentielles : le libre
échange intérieur et la différenciation de l'espace
commercial régional. Il s'agit d'une part de l'application effective du
principe de liberté consistant en la suppression des différents
obstacles tarifaires et non tarifaires (droit de douane et des restrictions
quantitatives dans les échanges intracommunautaires volet interne de la
libéralisation des échanges, et d'autres part la
différenciation de l'espace commercial régional par
l'établissement d'un tarif extérieur commun (TEC) ou tarif
douanier commun(TDC) qui constitue le versant externe de la libre circulation
des biens et qui concerne les échanges avec l'extérieur de la
zone d'intégration.
La création de l'UEMOA est intervenue au moment
où la plus part des pays du tiers monde, notamment africains,
décidaient d'assumer les conditions de compétition internationale
en optant pour un développement fondé sur le marché et une
politique commerciale tournée vers l'extérieur.
« Il ne s'agit plus d'insulariser les
économies africaines par des protections, mais de les amener à
devenir compétitives sur les marchés extérieurs
1».
Ce faisant la libéralisation des échanges
commerciaux couplée à la stratégie d'intégration
fondée sur le protectionnisme minimum, devient le vecteur par
excellence de l'intégration1.
L'UEMOA s'inscrit dans cette mouvance et singularise, en
effet, par son option résolument libérale. Cette option est
transcrite dans le préambule du traité et l'article 4.a. Elle est
affirmée avec force conviction au paragraphe 7 du préambule dans
les quels ils se disent :« déterminés à se
conformer aux principes d'une économie de marché ouverte,
concurrentielle et favorisant l'allocation optimale des ressources».Cette
profession de foi libérale trouve confirmation à l'article 4
alinéa a) dans lequel il est question de « renforcer la
compétitivité des activités économiques et
financières des Etats membres dans le cadre d'un marché ouvert
concurrentiel » et à l'article 832 mais si
l'optique libre échangiste constitue l'axe d'approche, sa
concrétisation emprunte une démarche progressive et
pragmatique.
La libéralisation des échanges
intracommunautaires a essentiellement consisté en l'aménagement
d'un régime tarifaire préférentiel. Ce régime
tarifaire préférentiel transitoire institué par la
conférence des chefs d'Etats et de gouvernements de l'UEMOA comprenant
un corps de règles dont les plus importants étaient:
- la suppression pure et simple de toutes restrictions
quantitatives, entraves non tarifaires, prohibitions ou autres mesures d'effet
équivalent portant sur les importations ou les exportations des produits
originaires ou fabriqués dans les Etats membres;
- l'exonération des produits du cru et de l'artisanat
traditionnel de tous droits et taxes perçus à l'entrée des
Etats membres, à l'exclusion des taxes intérieures.
En réalité, cette disposition vient renforcer
presque des portes ouvertes, puisque, dans le cas de la CEDEAO le marché
de ces biens était totalement libéralisé.
C'est d'ailleurs l'une des rares règles effectives dans
cette communauté, ce qui laisse soupçonner que cette
liberté a préexisté à l'organisation.
- l'institution d'une taxe préférentielle
communautaire (TPC) consistant en une réduction de 30%des droits
d'entrée applicables aux produits de l'espèce importés des
pays tiers, pour les produits industriels originaires agréés.
Il en résulte que l'étape de la
libéralisation des échanges intracommunautaires est effective
pour les produits du cru et de l'artisanat traditionnel qui sont
exonérés de tous droits et taxes.
En effet l'article 10 de l'acte additionnel N°04/96
établit, dans les échanges intracommunautaires, le principe de
la libre circulation des produits du cru et de l'artisanat traditionnel, en
franchise totale des droits et taxes perçus à l'entrée
des Etats membres excepté, le cas échéant, l'application
de la clause du traitement national.
Par contre en ce qui concerne les produits industriels, cette
étape ne sera ralliée qu'après l'épreuve probatoire
de la zone d'échanges préférentiels. Une démarche
que suggère l'article 78 du traité et que formalise l'acte
additionnel N°04/96 « instituant un régime tarifaire
préférentiel transitoire des échanges au sein de l'UEMOA
et son mode de financement »est en vigueur depuis le 1er
juillet 1996.
Ce texte prévoit un régime tarifaire applicable
aux produits industriels originaires et des mesures d'accompagnement qui visent
à préparer la libéralisation des échanges.
Le développement des échanges
intracommunautaires passe également par la structure des exportations et
des importations.
La structure des échanges
intracommunautaires :
· L'évolution globale des exportations
des pays de l'UEMOA :
Le tableau ci-après retrace l'évolution globale
et par pays des exportations de la zone UEMOA de 1993 à 2003.
Il ressort de ce tableau que les
exportations globales de la zone UEMOA n'ont cessées de progresser de
1993 à 2002, passant ainsi de 1470,5 à 6048,9 milliards de FCA,
soit une augmentation de 311,3% . pendant la dite période, tous les pays
de la zone ont vu pratiquement leurs exportations augmenter. Cet accroissement
des exportations est dû à une série de facteurs, notamment,
les effets positifs de la dévaluation du CFA en 1994 qui ont
entrainé une augmentation des productions et des volumes
exportés ; l'effort de diversification progressive des exportations
dans certains pays et la tendance favorable des cours des matières
premières et des produits de base sur le marché mondial.
La hausse des exportations de la zone résulte de la
diversification progressive des exportations observée dans certains
pays. Par exemple, la part de l'or n'a cessé d'augmenter dans les
exportations totales du Mali passant ainsi de 11,08 milliards de CFA à
353,8 milliards de FCFA de 1993 à 2001. Quant au Sénégal,
les exportations de produits chimiques ont augmenté de 186,5%, alors que
celles des phosphates n'ont connu qu'un accroissement de 14,7% entre 1993 et
2001.
A partir de 1998, cette tendance à la hausse des
exportations de la zone commence à s'inverser en raison de
l'essoufflement des effets positifs de la dévaluation. Le taux de
croissance réelle de l'économie passe de 5,2% à 3,2% de
1998 à 1999. La tendance à la baisse de la croissance et des
exportations a continué jusqu'en 2000. Depuis, la perte de
compétitivité des pays de la zone UEMOA s'est
accélérée du fait de la forte appréciation de
l'Euro (et donc du franc CFA) vis-à-vis du Dollar et des monnaies des
pays concurrents à l'exportation, notamment les pays en
développement concurrents des principales exportations de l'UEMOA.
En 2003, les exportations de la zone ont diminué de
4,3% en valeurs par rapport à 2002, due en partie à une baisse de
1,2% des cours mondiaux de cacao. Les volumes exportés ont
également baissé, notamment le cacao, le coton et le café,
en rapport avec la crise de la Cote d'ivoire. La perte de
compétitivité de la zone se poursuivra en 2004 parce que la TCER
composite devait s'apprécier de 14% par rapport à sa valeur de
2000.
Tableau1 : Evolution des exportations
des pays de l'UEMOA- 1993-2003(en milliards de FCFA)
Pays
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003*
|
Accr% 1993-2003
|
Bénin
|
108,6
|
217,2
|
209,6
|
209,6
|
269,9
|
247,5
|
244,4
|
279,3
|
273,9
|
312,1
|
317,8
|
192,63
|
Burkina
|
64
|
119,6
|
137,6
|
119
|
133,6
|
190,4
|
156,2
|
146,4
|
163,7
|
170,8
|
189,5
|
196,09
|
Cote d'ivoire
|
832,2
|
1592,8
|
1899,7
|
2274,3
|
2597,9
|
2717,6
|
2870,1
|
2768,2
|
2892,5
|
3676,6
|
3396,5
|
308,13
|
Guinée- Bissau
|
4,3
|
16,6
|
12,2
|
11,0
|
28,3
|
15,8
|
31,5
|
44,2
|
46 ;1
|
37,9
|
36,4
|
746,51
|
Mali
|
105,3
|
185,9
|
220,5
|
221,4
|
327,7
|
328,1
|
351,6
|
388,1
|
531,1
|
617,6
|
541,6
|
414,33
|
Niger
|
81,2
|
125,1
|
143,8
|
166,3
|
158,5
|
197,0
|
176,6
|
201,5
|
199,7
|
194,8
|
204,4
|
151,72
|
Sénégal
|
200,2
|
439,1
|
495,8
|
505,4
|
528,0
|
570,9
|
632,4
|
654,9
|
735,3
|
743,4
|
740,8
|
270,02
|
Togo
|
74,7
|
182,3
|
188,4
|
225,4
|
246,6
|
247,9
|
241,0
|
257,6
|
261,9
|
295 ,7
|
360,3
|
382,32
|
UEMOA
|
1470,5
|
2878,6
|
3307,7
|
3732,4
|
4290,5
|
4515,2
|
4703,8
|
4740,2
|
5104,7
|
6048,9
|
5787,3
|
293,56
|
Source : BCEAO(2003) Rapport annuel de la banque centrale
des états de l'Afrique de l'ouest
*Estimations.
· Les exportations
intracommunautaires
Comme les exportations globales des
pays de l'UEMOA, les exportations intracommunautaires n'ont cessé
d'augmenter depuis 1994 jusqu'à 2000 avant de baisser en 2001. Elles
passent ainsi de 425,4 milliards de FCFA à 594,9 milliards de FCFA, soit
une augmentation de 39,84%.
Une analyse par pays montre également que les
exportations intracommunautaires de chacun des pays de l'UEMOA ont augmenter
depuis 1994 jusqu'à 2000. Cette augmentation des exportations
intracommunautaires est due d'une part à la progression
générale des exportation totales de chacun des pays et d'autre
part, elle est liée aux séries de mesures prises dans le cadre de
la libre circulation des marchandises au sein de l'UEMOA à savoir
l'établissement d'un régime tarifaire préférentiel
transitoire des échanges en 1996 ; la mise en place d'un Tarif
Extérieur Commun (TEC) et d'une politique commerciale commune en
2000.
Cependant la tendance à la hausse des exportations
intracommunautaires s'est inversée à partir de 2001 et elles ont
baissé de 2,47% par rapport à 2000. Ce repli des exportations
intracommunautaires est imputable à la crise à la crise politique
que traverse la Cote d'Ivoire qui est le principal fournisseur des pays de
l'hinterland ( Burkina, Mali). Le Sénégal qui dispose d'un tissu
industriel plus étoffé que les autres pays de la zone doit
probablement tirer des avantages et des opportunités de la crise
ivoirienne. Effectivement, on observe une augmentation des exportations
intracommunautaires du Sénégal ( plus de 34%) en 2001 par rapport
a 2000. Dans le même ordre d'idée, on constate que les pays
enclavés de l'hinterland ( Burkina, Mali et Niger) ont modifié
leurs circuits commerciaux d'exportation et d'importation au profit des ports
de Lomé, Cotonou et de Dakar. Ainsi, la réactivité et la
flexibilité des operateurs économiques des pays de l'hinterland
face a la crise ivoirienne ont permis d'envisager d'autres alternatives afin
d'adapter leurs schéma logistiques.
Aussi, dans le cadre des exportations intracommunautaires,
les plus gros exportateurs intracommunautaires de la zone UEMOA sont : la
Cote d'Ivoire, le Sénégal et le Mali. En 2001,les exportations de
ces pays ont représenté respectivement environ 70%, 14,65%,
11,39% des exportations intracommunautaires totales. Ces trois pays semblent
très intégrés au marché commun et exportent
pratiquement vers tous les pays de l'UEMOA.
· L'évolution globale des importations
des pays de l'UEMOA :
Globalement, les importations totales de la zone UEMOA ont
augmenté de 231,76% passant ainsi de 1590,8 milliards de FCFA
à 5277,7 milliards de FCFA entre 1993 et 2003. Une analyse par pays
pendant la dite période confirme cette dynamique et montre que les
importations de chacun des pays ont augmenté. Les pays qui ont
enregistré les plus fortes augmentations de leurs importations sont le
Mali, le Togo et le Sénégal.
Cette tendance a la hausse des importations est du
principalement a l'augmentation de la demande intérieure en rapport avec
la forte croissance économique de la zone après la
dévaluation du FCFA en 1994. Ce qui exigeait plus d'infrastructures, de
bien d'équipement, de biens de consommation intermédiaire, de
produits énergétiques et des matières premières
pour les besoins des industries locales et des économies nationales. Par
exemple en 2003, les importations de l'UEMOA ont enregistré une
augmentation de 5,3%, du fait essentiellement des produits pétroliers et
des biens d'équipement dont l'évolution serait liée aux
investissements prévus dans le cadre de la mise en oeuvre des programmes
de lutte contre la pauvreté dans plusieurs Etats membres de l'Union.
Tableau 2 : Evolution des importations des
pays de l'UEMOA 1993-2003 (en milliards de FCFA)
Pays
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003*
|
Accr% 1993-2003
|
Bénin
|
159,9
|
250,6
|
310,6
|
310,6
|
286,3
|
336,7
|
337,8
|
367,4
|
405,4
|
273,1
|
441,8
|
178,03
|
Burkina
|
132,8
|
191,1
|
242,3
|
287,7
|
297,6
|
374,2
|
357,3
|
368,6
|
373,3
|
381,7
|
398,3
|
199,92
|
Cote d'ivoire
|
644,3
|
851,3
|
1213,0
|
1341,4
|
1551,7
|
1703
|
1703,1
|
1710,0
|
1772,3
|
1711,6
|
1929,7
|
199,5
|
Guinée- Bissau
|
16,8
|
32,5
|
37,0
|
35,1
|
42,0
|
30,7
|
26,3
|
35,0
|
45,4
|
40,7
|
40,0
|
138,09
|
Mali
|
139,4
|
249,4
|
277,9
|
282,1
|
318,5
|
329,3
|
372,8
|
421,5
|
538,6
|
520,0
|
567,5
|
407,1
|
Niger
|
84,7
|
146,1
|
152,6
|
179,7
|
175,0
|
238,2
|
206,5
|
230,4
|
242,8
|
258,7
|
254,3
|
200,23
|
Sénégal
|
307,7
|
567,4
|
620,4
|
646,5
|
686,4
|
755,5
|
845,3
|
951,6
|
1047,1
|
1117,9
|
1178,0
|
282,84
|
Togo
|
106,2
|
202,9
|
252,8
|
290,5
|
309,6
|
326,5
|
301,3
|
345,0
|
378,3
|
401,2
|
468,1
|
340,77
|
UEMOA
|
1590,8
|
2491,3
|
3106,6
|
3373,6
|
3667,1
|
4094
|
4150,4
|
4429,5
|
4803,2
|
4904,9
|
5277,7
|
231,76
|
Source : BCEAO(2003) Rapport annuel de la banque centrale
des états de l'Afrique de l'ouest
*Estimations.
· Les importations
intracommunautaires :
En considérant la période (1994-2001), on
constate une hausse significative des importations intra régionales.
Pendant la dite période, elles ont pratiquement été
multipliées par plus de 3 fois et demi, passant ainsi de 156,12 à
556,6 milliards de FCFA.
Cette augmentation globale des importations
résulte non seulement d'une augmentation
généralisée des importations globales de la zone UEMOA,
mais aussi de la mise en application des dispositifs institutionnels et
réglementaires relatifs a la libre circulation des marchandises, des
biens, des services er des capitaux dans le cadre de la mise en oeuvre du
marché commun. C'est ainsi que la part des importations
intracommunautaires dans les importations totales de la zone UEMOA a connu une
hausse de 6,26% à 11,6% de 1994 à 2001.
Une analyse détaillée par pays montre que
certains Etats ont beaucoup plus contribué à l'augmentation des
importations intracommunautaires que d'autres. Les pays qui importent le plus
de la zone sont les pays de l'hinterland ( Mali, Burkina, Niger) et le Benin.
Par exemple, en 2001, la part des importations intracommunautaires dans les
importations totales ont représenté 32% ; 26% ; 22%,
respectivement pour le Mali, le Burkina et le Niger, alors que cette part
n'était que de 1% pour la Cote d'Ivoire ; 4,6% pour le
Sénégal et 8% pour le Togo. Aussi, convient il de constater que
la part des importations intracommunautaires maliennes et du Burkina
représentent respectivement plus de 40% et environ 20% des importations
intracommunautaires de la zone UEMOA.
|
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