3. La récurrence des problèmes sanitaires
des pensionnaires
Les inspections médicales des prisons ont un objectif.
Celui de voir l'état général des locaux de
détention afin de faire des suggestions d'amélioration sur des
aspects hygiéniques et de la vie sanitaires des détenus.
Malgré les observations critiques relevées par les
différents rapports, le commun des pensionnaires se rend très
vite à l'évidence que les problèmes de santé
persistent. Ainsi, du fait des mauvaises conditions hygiéniques, la
quasi-totalité des détenus du pénitencier de Dschang est
menacée et souffre de maladie. En effet " le matériel de couchage
existe, mais la quantité est réduite, la plupart des lits a servi
à plusieurs génération de détenus. Ils ne sont pas
désinfectés avant toute nouvelle utilisation d'où la
présence permanente de puces, punaises et
68 APD, rapport d'inspection médicale, 1988.
69 Ibid.
70 Pierre Kuené, 50 ans, infirmier des prisons, Dschang,
24.11.2009.
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vermines qui donnent la gale"71. De même
à la prison de Mantoum, les détenus se plaignaient le plus
souvent de la présence de poux, de cafards, de la vétusté
du matériel de couchage qui les prédisposaient aux affections
paludéennes surtout en période de pluie72.
Comme on peut le remarquer, l'axe principal des mesures
sanitaires prises dans les deux prisons a consisté à soigner
autant que faire se peut les malades qui se présentent à la
consultation. Mais, les lourdeurs de procédures et le peu
d'intérêt accordé à l'exploitation rationnelle des
rapports d'inspection ont eu pour effet d'augmenter le taux de morbidité
au sein de la population carcérale de sorte que les maladies mentales
ont pris de l'ascendant sur les maladies physiques73.
En somme pour ce chapitre, les structures des soins
médicaux et le régime des inspections sanitaires des prisons -
Dschang et Mantoum -sont sur le plan national définis et codifiés
par le texte organique de 1973 et sur le plan international par plusieurs
textes dont l'ensemble des règles minima pour le traitement des
détenus en constitue l'ossature. L'analyse des différentes
structures de soins médicaux mises en place pour assurer le droit
à la santé des pensionnaires a permis d'établir que
l'infirmerie des deux prisons, quoique existante, n'arrive pas toujours
à assurer ses prestations à cause du personnel médical
insuffisant et de la vétusté du matériel de soins ainsi
que des difficultés de son approvisionnement en médicaments de
première nécessité. Malgré cet état des
choses, les hôpitaux départementaux proches des deux prisons ont
joué un rôle très important pour assurer au quotidien le
droit à la santé des détenus, ce dernier se
résumant aux consultations, aux examens médicaux et bien
sûr aux
71 Martin Djoufack, 67 ans, manoeuvre, incarcéré en
1983, PPD, 03.02.2010.
72 Emmanuel Gayo, 60 ans, ex-détenu, PPM Mantoum,
24.08.2009.
73 Les archives dépouillées et les entretiens
oraux permettent d'affirmer que les pathologies mentales ont pris à un
moment donné de l'avance sur les pathologies physiques dans les deux
prisons qui n'ont d'ailleurs pas de spécialiste en psychiatre. En dehors
du cas illustratif de Jean Mbougna de la prison de Dschang, des cas similaires
sont relevés à la prison de Mantoum et n'avait été
la vigilance des co-détenus et du service de garde, on aurait pu
enregistrer des suicides.
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hospitalisations en cas de gravité de l'état
sanitaire des pensionnaires. L'hôpital départemental ou central de
Foumban, protestant de Njissé et d'arrondissement de Malantouen
recevaient pour le cas d'espèce les malades du CRC puis de la prison de
production de Mantoum tandis que leur homologue de Dschang en faisait de
même pour les détenus malades du pénitencier de Dschang.
Dans les deux prisons, les inspections médicales ont souvent
été rarement effectuées en conformité avec les
textes en vigueur, de même la négligence de leur contenu par les
différents acteurs de la chaîne pénitentiaire et les
solutions de fortune envisagées n'ont pas permis de freiner la
propagation des maladies en milieu carcéral. Il convient aussi de noter
que les pathologies les plus fréquentes résultent globalement des
conditions de détention dans l'ensemble mauvaises.
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