1.7.LE TRANSFERT DE FOND PAR LES SOCIÉTÉS
DE TÉLÉCOMMUNICATION
Le virement d'argent par téléphone portable pour
des transferts de fonds et le paiement de petits montants, comme les frais
scolaires et les factures des services publics, s'est étendu à
d'autres pays africains. En Afrique du Sud comme au Congo, Vodacom s'est
récemment associé à Nedbank pour offrir ces services
à l'intérieur du pays. « Le taux de
pénétration actuel du marché cible de Vodacom, sa
présence par l'intermédiaire de distributeurs même dans les
zones rurales, nous a intéressés », explique Ilze Wagener,
cadre chez Nedbank.
Les transactions par téléphonie mobile peuvent
permettre aux banques d'accéder aux marchés ruraux sans avoir
à ouvrir de nouvelles agences. En mai 2011, neuf mois après son
lancement, le partenariat Vodacom-Nedbank comptait 140 000 abonnés en
Afrique du Sud et avait établi plus de 3 000 agences M-Pesa et 2 000
guichets automatiques dans le pays. Dans un pays comme l'Afrique du Sud,
où la clientèle et les distributeurs ont des profils plus
variés, « il faut envisager M-Pesa de manière très
différente », affirme Mme Wagener. À ses yeux, le service
« présente des possibilités et des défis sans
équivalent ».Dans certains pays, les banques forment des
partenariats avec plusieurs compagnies de télécommunications.
« Le réseau de transfert d'argent mobile mis en place grâce
à des partenariats avec quatre sociétés de
téléphonie mobile au Ghana nous a permis d'étendre nos
services auprès de clients répartis dans l'ensemble du pays
», a indiqué à Afrique Renouveau OwurekuOsare, responsable
du service de transactions bancaires d'Ecobank au Ghana. Le renforcement de
ce réseau au Ghana s'inscrit dans le cadre d'une stratégie plus
globale d'élargissement de la clientèle, a-t-il ajouté.
Tout indique que les services bancaires et financiers
traditionnels s'adaptent aux nouvelles technologies et aux nouveaux
marchés. Il s'agit désormais d'attirer ceux qui n'ont pas de
compte bancaire. Les banques qui proposent des services de transfert d'argent
par téléphone portable recommandent aux
bénéficiaires auxquels il reste un peu d'argent de le placer dans
des « portefeuilles mobiles » : des comptes bancaires
électroniques liés à un téléphone
portable.
« En permettant aux personnes sans compte bancaire de
garder leur argent dans des portefeuilles mobiles liés à leurs
numéros de portable, nous espérons que cet argent finira dans un
vrai compte bancaire », précise M. Osare. En mai, Ecobank a
proposé à sa clientèle d'Afrique de l'Ouest un compte
d'épargne mobile qui peut être rattaché à un
portefeuille mobile.
Le cas de M-Pesa est intéressant à plus d'un
titre. Dans le cadre de ce service, une compagnie de
télécommunications et une banque se sont associées l'an
dernier pour offrir un compte d'épargne, connu sous le nom de M-Kesho.
C'est l'un des premiers partenariats de ce type. Un usager de M-Pesa peut ainsi
transférer de l'argent, par téléphone portable, d'un
portefeuille mobile M-Pesa vers un compte d'épargne M-Kesho,
géré par Equity Bank.
Face à la popularité croissante des
transactions financières par téléphonie mobile au Ghana,
HollardInsurance et Mobile Financial Services Africa se sont associés au
début de 2011 à MTN pour lancer mi-Life, un service de «
micro-assurance » géré par téléphone portable.
« Ces services d'assurance font pleinement usage de notre technologie, de
sorte que tout le processus d'enregistrement se fait également par
téléphone portable », précise M. Verkade. Avec de
très faibles primes, l'idée est de tirer parti dans un premier
temps de la demande non satisfaite pour ce type de service au Ghana, surtout
dans les régions rurales mal desservies, pour ensuite l'étendre
à d'autres marchés africains, comme le Rwanda.
En dépit de l'essor des transferts de fonds
internationaux par téléphone portable, divers obstacles
persistent.
Un marché limité ;Le développement
rapide de M-Pesa au Kenya s'explique en partie par le fait que la
société qui l'a lancé, Safaricom, a
bénéficié de sa position de quasi-monopole. Ailleurs en
Afrique, M-Pesa et les autres services du même type n'enregistrent pas le
même succès.
D'introuvables liquidités. Dans les zones rurales et
les régions reculées, les services de transfert de fonds n'ont
pas toujours suffisamment de liquidités à remettre aux
bénéficiaires des transferts. Pour remédier au
problème, OwurekuOsare d'Ecobank (Ghana) explique que sa banque cherche
à former un partenariat « avec une institution de microfinance qui
a déjà une expérience du terrain pour renforcer la
trésorerie des agents de ces régions ». Au Kenya, le service
Paynet offre une solution différente en proposant des retraits sans
carte aux guichets automatiques de banque.
Méfiance et méconnaissance. De nombreux
habitants des zones rurales se méfient des banques ou n'y ont pas
accès. Misant sur la popularité des téléphones
portables, des banques et des opérateurs téléphoniques
envoient des représentants sur le terrain, même dans les
régions les plus reculées, pour expliquer aux gens comment
effectuer des transferts de fonds par téléphonie mobile. D'autres
forment des agents locaux, qui touchent une commission pour recruter des
clients.
Obstacles techniques. Bien que présente dans 30 pays
africains, Ecobank n'a toujours pas réussi à trouver un
opérateur disposant d'une plateforme unique qui lui permette d'offrir
des services bancaires transfrontaliers par téléphone
portable.
Obstacles réglementaires. Les lois et
réglementations relatives aux transferts transfrontaliers de sommes
modestes varient d'un pays à l'autre et leur application au cas de la
téléphonie mobile prête parfois à confusion. La
banque centrale du Kenya élabore actuellement un projet de
réglementation pour les émetteurs de monnaie électronique
et les transferts électroniques au détail et la banque centrale
de Tanzanie a annoncé qu'elle préparait un nouveau projet de loi
régissant ce type de transactions.
Contrôle des opérations. En Afrique du Sud, les
transferts de fonds par téléphonie mobile ne se font pour le
moment qu'à l'intérieur du pays, et toutes les transactions
transfrontalières, même d'un montant modeste, doivent être
soumises à un contrôle. Conformément à la
législation nationale contre le blanchiment des capitaux, seuls les
banques et les courtiers agréés sont habilités à
effectuer des transferts de fonds avec l'étranger. Ce qui exclut les
détaillants, qui sont au coeur de la stratégie des banques en
matière de transfert d'argent par téléphone mobile. En
attendant, les banques elles-mêmes hésitent à effectuer un
grand nombre de transactions internationales d'un montant modeste. Le
coût de la déclaration de ces opérations aux
autorités est en général élevé. Lorsqu'un
expatrié se rend à sa banque pour transférer des devises
dans un pays étranger, il ne sait jamais combien cela va lui
coûter réellement. Infiltration dans un milieu où
l'opacité demeure.
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