2.9.4. Conclusion sur les
commémorations de Liège et Mons.
Les commémorations montoises et liégeoises se
situent à mi-chemin entre les commémorations nationales et la
multitude des commémorations locales. En effet, ces
célébrations sont tantôt grandioses, tantôt
élégantes dans leur simplicité, Grandiose de par
l'importance de ces deux villes durant la guerre, simple dans leur
réalisation. Cette simplicité peut également s'expliquer
par le fait que ces commémorations ne doivent pas prendre le dessus sur
les célébrations nationales. Elles sont, toutefois,
représentatives d'une époque, d'une réponse sociale. C'est
parce que la population réclamait une reconnaissance pour ses disparus,
pour les souffrances qu'elle a enduré durant cinquante-deux mois que ces
commémorations ont vu le jour. Elles ont donc une fonction au sein de
ces communautés : rappeler aux concitoyens les heures de
solidarité qui les ont unis, les patriotes qui ont perdu la vie pour
qu'ils vivent.
Cependant ces commémorations plus locales sont loin
d'être similaires. Certes, elles sont organisées par des
associations d'Anciens Combattants avec l'aide des instances communales mais
nous avons vu que la signification qui s'y rattache n'est pas du tout
identique. Tout comme lors des débats menant au choix de la date
commémorative, les significations données à ce jour faste
vont de l'allégresse de la Victoire à la tristesse du deuil.
Toutefois, le cérémonial est le même : un
cortège funèbre parcourt la ville, par un itinéraire fixe,
pour se rendre au cimetière communal ainsi qu'aux divers monuments
commémoratifs qui se trouvent sur le territoire de la commune. Suite
à cela, des thés ou des bals sont organisés. La
différence fondamentale entre ces deux villes se situent à un
autre niveau. Si les Liégeois ont tendance à donner un sens plus
festifs à leur commémoration, nous pensons que c'est en raison de
la reconnaissance et le prestige que le monde reconnaît à la
défense des forts liégeois. N'oublions pas qu'ils sont
présentés comme les héros sans qui les forces
alliées n'auraient pas pu s'organiser. De son côté, Mons
est quelque peu oubliée par l'historiographie et la reconnaissance
internationale, laissant ainsi sa population entièrement
dévouée au culte de ses morts et de ses libérateurs.
Tout comme pour les cérémonies bruxelloises,
nous avons pu constater qu'une ritualisation a bel et bien eu lieu ici aussi.
Que ce soit le parcours, les participants du cortège, les
mémoriaux visités,... tout semble se répéter
d'année en année. Hommage imposant ou obligations sociales ?
Nous ne saurions l'affirmer. Les comptes rendus se font de moins en moins
présents et précis mais ils sont toujours là parfois
seulement sous forme photographique. Une chose est sûre : le culte
des morts et du souvenir est très tôt considéré
comme un devoir sacré. C'est ce qui rend cette question
épineuse : d'un côté, cela est considéré
comme un devoir, de l'autre, nous pourrions penser que progressivement ce
souvenir, entretenu tant bien que mal, ravivé au gré des
évènements, pèse sur une société
déjà éprouvée par les diverses crises qui jalonnent
l'entre-deux-guerres. Ces commémorations représentent, selon
nous, la continuation annuelle d'une pratique initialement prévue afin
d'exorciser un manque, celui du corps de l'être aimé.
|