WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La coopération sécuritaire dans le golfe de Guinée à  l'épreuve de la criminalité transfrontalière. Etat des lieux et esquisse de solution

( Télécharger le fichier original )
par Vernuy Eric SUYRU
Université de Yaoundé II Cameroun - Master en relations internationales, option intégration régionale et management des institutions communautaires 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CHAPITRE IV : LA CONCRETISATION D'UN SYSTEME AUTONOME DE SECURITE COLLECTIVE : UN MOYEN DE RENFORCEMENT DE LA COOPERATION SECURITAIRE ENTRE LES ETATS DANS LE GOLFE DE GUINEE

Parmi les voies et moyens de prévention et de lutte contre les pratiques criminelles transfrontalières dans le golfe de Guinée, figure en bonne place la nécessité de concrétiser dans la réalité un véritable système autonome et inclusif, de caractère interrégional, de sécurité collective. Celui-ci aurait l'avantage de renforcer la coopération sécuritaire entre tous les acteurs étatiques impliqués dans la croisade contre l'insécurité et la criminalité transfrontalières dans le golfe de Guinée. Ce qui permettrait également de responsabiliser les Etats de la région en faisant d'eux les acteurs de leur propre sécurité.

La mutualisation des initiatives escomptée, en tant qu'instrument consensuel, intégrée et homogène de prévention et de lutte contre les actes de criminalité dans la région, donnerait lieu à l'adoption d'un cadre stratégique concrétisant une vision globale de toutes les formes de criminalité et une fédération transversale des synergies de tous les acteurs impliqués dans la sécurisation du golfe de Guinée. Cette mutualisation se réaliserait sous l'observation scrupuleuse d'une double condition intimement liée : la construction d'une capacité autonome régionale et ou interrégionale de sécurité collective dans le golfe de Guinée (section I) et la nécessité de coordonner le soutien de la communauté internationale (section II).

SECTION I : DE LA CONSTRUCTION D'UN SYSTÈME AUTONOME DE SÉCURITÉ COLLECTIVE191(*) DANS LE GOLFE DE GUINÉE

L'un des éléments structurant la mise en oeuvre d'un système de sécurité collective endogène et autonome capable de prévenir et de lutter efficacement contre les actes de criminalité transfrontalière dans le golfe de Guinée, c'est sans doute la responsabilisation de tous les acteurs étatiques de la région dans la sécurisation de leurs propres espaces de vie (Paragraphe I). En faisant des Etats de la région les acteurs de leur propre sécurité, il convient de mettre en exergue la nécessité d'un leadership unipolaire, bipolaire et multipolaire capable de donner corps, sens et consistance à cette responsabilisation (Paragraphe II).

Paragraphe I : Faire des Etats de la région les acteurs responsables de leur propre sécurité

La nature transfrontalière des actes de criminalité dans le golfe de Guinée fait de « la coopération bilatérale, régionale et interrégionale un élément clé d'une réponse globale »192(*). Responsabiliser les Etats de la région dans la préservation de leur propre sécurité passe donc par le renforcement de leur coopération sécuritaire. Celle-ci vise à atteindre deux principaux objectifs globaux : définir et adopter une vision commune (A) ; mutualiser et coordonner les ressources (B).

A. Adopter une vision stratégique commune et intégrée : définir les priorités et rationnaliser les initiatives en cours de mise en oeuvre

Il nous semble opportun d'envisager une stratégie innovante de mutualisation de toutes les initiatives de sécurisation du golfe de Guinée, qui aurait le double avantage de définir les priorités et de rationnaliser ces initiatives. Cette stratégie, qui s'apparenterait à un renouveau de la coopération sécuritaire dans la région, serait une nouvelle donne stratégique permettant l'adoption d'une vision commune uniforme intégrant les différentes facettes de la criminalité transfrontalière ainsi que les champs d'action possibles de sa pleine opérationnalisation.

Concrètement, cette nouvelle vision stratégique, en tant qu'instrument-cadre de prévention et de lutte contre toutes les formes de criminalité transfrontalière dans le Golfe de Guinée, permettrait de ne plus envisager séparément les questions de sécurité maritime et terrestre dans la région. Elle permettrait désormais, au regard de leur complémentarité évidente du fait du continuum d'insécurité qui règne dans les zones frontalières terrestres, lacustres et maritimes au sein du golfe de Guinée, de les aborder et de les traiter de manière holistique ; c'est-à-dire comme un bloc homogène, afin d'en avoir une vision globale, même si sa mise en oeuvre opérationnelle serait modulée en fonction des spécificités du milieu géophysique considéré. Dans ce sens, la globalisation des questions sécuritaires d'ordre maritime, terrestre, spatiale, voire cybernétique, ne pourra être une réalité effective que les différentes stratégies sécuritaires nationales (Etats du Golfe de Guinée) et communautaires (CEDEAO, CEEAC notamment) sont fédérées au sein d'une vision stratégique uniforme. Pour cela, il faudrait que la coopération en matière de sécurité dans le Golfe de Guinée entre la CEDEAO et la CEEAC soit formalisée sous la supervision de l'UA, par la signature effective de deux documents clés : le Mémorandum d'entente entre la CEDEAO et la CEEAC relatif à l'appui de la sécurité maritime régionale dans la région maritime de l'Afrique de l'ouest et du centre et l'Accord multilatéral relatif à la coopération visant à éradiquer les activités illicites dans la région maritime de l'Afrique de l'ouest et du centre193(*). Cette coopération ainsi formalisée permettrait de rationnaliser les initiatives déjà mises en oeuvre dans chacune des deux CER et de définir, d'un commun accord, un mécanisme efficace de coordination. Ledit mécanisme pourrait se limiter à une coordination pure et simple de type intra régional, interrégional ou internationale, ou alors procéder à la fusion de ces initiatives au profit d'une structure de type supranational.

Dans cette dernière hypothèse, il est impératif que cette nouvelle vision stratégique soit mise en oeuvre par une structure réformée. D'où la question de l'avenir de la Commission du Golfe de Guinée (CGG) se pose avec acuité.

Militer pour la revitalisation de la CGG semble un exercice risqué. Tant la pertinence de son existence et l'évaluation de son bilan sont hypothétiquement péjoratifs. Car voici une organisation, à la terminologie fort évocatrice quant à son périmètre de compétences, sur laquelle beaucoup d'espoirs ont été fondés lors de sa création le 19 novembre 1999 à Libreville au Gabon. Mais qui, plus d'une décennie d'existence après, ressemble davantage à un projet avorté, un rêve évanoui, bref à un regard posé sur une illusion. En effet, créée pour s'occuper prioritairement de l'étude « des voies et moyens susceptibles de préserver la paix, la sécurité et la stabilité dans le Golfe de Guinée »194(*), la CGG s'est retrouvée rapidement sclérosée, dépassée et incapable de remplir précisément cet objectif, du fait de la croissance et de l'enracinement des actes de criminalité transfrontalière (piraterie maritime et trafics illicites de tous genres...) dans cet espace géographique.

Si la délimitation des frontières maritimes des Etats membres, abritant d'importants gisements de pétrole offshore, est à mettre à son actif, notamment dans la résolution des conflits frontaliers entre le Congo et l'Angola ou entre Sao-Tomé et Principe et le Nigéria, c'est précisément la cristallisation de l'essentiel de ses actions autour des questions pétrolières et halieutiques qui constitue paradoxalement la source de son inefficacité actuelle dans la sécurisation du golfe de Guinée. Car, étant essentiellement « un instrument diplomatique (...) pouvant encourager la coopération et canaliser les menaces de confrontation entre les pays de cette organisation qui sont tous dotés de capacités pétrolières »195(*), la CGG est restée confinée à cette tache en feignant d'ignorer que la principale menace sécuritaire qui pèse sur la région est celle de la criminalité transfrontalière. Plutôt, elle a davantage fait l'objet de tentatives d'instrumentalisation de la part de ses deux principaux concepteurs, le Gabon et le Nigéria, qui voulaient la mettre au service de leurs « desseins sous-régionaux »196(*).

A présent, il convient de la réformer structurellement afin de lui conférer une véritable capacité régionale de mutualisation des efforts en vue de la sécurisation globale et transversale du golfe de Guinée dans ses postures institutionnelle197(*) et géopolitique198(*). A cet effet, les actions suivantes sont à mener :

Tout d'abord procéder à la révision de son Traité fondateur. Cette révision permettrait de doter l'organisation d'une véritable capacité d'intervention de caractère supranational, en lieu et place de son rôle actuel de simple coordination et d'harmonisation peu efficaces des politiques des Etats membres199(*). Par le renforcement de son rôle, elle se verrait doter de compétences200(*) transversales contraignantes sur toute l'étendue de l'espace du golfe de Guinée en transcendant celles des organisations régionales qui s'y trouvent.

Ensuite, pour lui conférer une visibilité géographique et une pertinence géopolitique, il faudrait l'élargir aux autres Etats de la région sur la base d'un lien de continuité et de contiguïté géographiques. Pour ce faire, il conviendrait de faire sa promotion auprès des Etats non membres dont le lien géographique avec l'un des Etats membres actuels de la Commission est clairement établi afin qu'ils y adhèrent.

Enfin, il faudrait que la CGG réformée soit dotée de moyens conséquents pour fonctionner et remplir efficacement son objectif téléologique de sécurisation du golfe de Guinée. C'est dire l'importance de mettre à sa disposition un personnel civil et militaire compétent qui bénéficierait d'un traitement hautement compétitif ; de moderniser sa gouvernance interne par l'allègement des procédures, la responsabilisation des cadres et la facilitation du processus décisionnel ; de la doter de ressources financières propres par l'institution d'un mécanisme de financement autonome, avec prélèvement direct et disponibilité intégrale des fonds dont la gestion rationnelle et transparente devra être garantie par des contrôles d'audit réguliers.

Ces défis à relever et qui s'apparentent à une tache titanesque au niveau régional, ne pourront prendre forme que si les ressources sont mutualiser et coordonner.

* 191 Ce système de sécurité collective devrait s'appuyer sur la solidarité et la responsabilité de tous les Etats du golfe de Guinée et garanti par un leadership collégial structuré autour de l'axe Abuja-Yaoundé. A terme, il vise à mutualiser les efforts de prévention et de lutte contre la criminalité transfrontalière dans la région.

* 192 International Crisis Group, Le golfe de Guinée : la nouvelle zone à haut risque, op.cit., p.31

* 193 Idem, p.32

* 194 Etanislas NGODI et Mathias Eric OWONA NGUINI, op.cit., p.223

* 195 Idem, p. 223 et 224.

* 196 AWOUMOU Côme Damien Georges, op.cit.

* 197 Institutionnellement le golfe de Guinée se réduit aux Etats membres de la CGG.

* 198 Géopolitiquement, le golfe de Guinée s'étendrait des cotes libériennes jusqu'au Cap en Afrique du Sud et s'élargirait aux Etats pétroliers et miniers de l'hinterland de cette région.

* 199 Car comme le démontre Cyrille Serge ATONFACK GUEMO, Commissaire de la Marine camerounaise, les souverainetés des Etats membres sont un facteur préjudiciel au bon fonctionnement de la CGG. Voir Cyrille Serge ATONFACK GUEMO, op.cit., p.139 et 140.

* 200 La CGG doit de ce fait élaborer et mettre en oeuvre des politiques sectorielles de renforcement de la sécurité de la région en conformité avec la vision stratégique définie préalablement.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon