Conclusion partielle
Toute activité nécessite des outils, mais des
outils qui répondent aux exigences du travail à accomplir et qui
le facilitent. A Dimori, les outils utilisés sont encore rudimentaires
et consommateurs de temps et d'énergie (houe, daba, coupe-coupe
etc.) ; ce qui ne permet pas l'accomplissement des différentes
opérations culturales en temps voulu et compromet ainsi la bonne
réussite des activités de la campagne agricole même si
l'ingéniosité de ces opération ne sont plus à
discuter. Mais le dioscorea sp est une plante qui épuise vite
les sols, et avec l'accroissement de la population du canton qui est à
98 % paysanne, le producteur n'arrive plus laisser sa terre au repos pendant 5
ans au moins. Résultat, crises foncières et réduction des
parcelles d'exploitation apparaissent dans les habitudes des paysans et
conduisent même à l'utilisation de l'expression de
« paysans sans terre ».
Dans ces conditions, comment continuer par cultiver les
espèces locales de Dioscorea sp qui ne connaissent que les
terres fertiles de Dimori telle laboco, une espèce locale trop exigeante
en matières minérales et qui change de saveur dès que le
sol change de composition ? Faut-il alors seulement se calquer sur les
espèces améliorées et importées ? Et que fait
ont des valeurs de ce tubercule ?
CHAPITRE 3 : LA VALEUR SOCIALE CULTURELLE ET
ECONOMIQUES DU DIOSCOREA SP DANS LE CANTON DE DIMORI
3.1- Le Dioscorea sp, une plante à valeur
sociale reconnue à Dimori
La valeur sociale du Dioscorea sp n'est plus à
démontrée car, que ce soit à Dimori ou partout ailleurs au
Togo, le Dioscorea sp tient une place importante dans les
comportements sociaux des paysans cultivateurs de cette denrée et dans
les habitudes alimentaires des populations consommatrices.
3.1.1-Les comportements sociaux des paysans
A Dimori, le Dioscorea sp a une valeur inexprimable
depuis la nuit des temps, c'est-à-dire depuis sa découverte et
son adoption comme aliment de base. Dans presque tous les ménages (soit
98 % des enquêtés), se trouve au moins un paysans qui s'adonnent
à cette culture. À la question de savoir pourquoi tant
d'enthousiasme pour cette culture, les paysans répondent que c'est
à cause de sa valeur nutritive et économique.
3.1.1.1- Importance nutritive du Dioscorea sp
Sur le plan alimentaire, le Dioscorea sp occupe une
place privilégiée dans les habitudes alimentaires de la
population. En effet, selon la taille du ménage et selon l'importance de
la production, tous les ménages consomment le Dioscorea sp,
surtout pilée, pendant une majeure partie de l'année comme le
montre le tableau n°13.
Tableau n°13 : Répartition des
enquêtés selon la fréquence de consommation de
Dioscorea sp
Modalité
|
Effectifs
|
Pourcentages
|
2 à 4 mois/an
|
38
|
31,67
|
5 à 7 mois/an
|
24
|
20,00
|
Toute l'année
|
58
|
48,33
|
Total
|
120
|
100,00
|
Source : Travaux de terrain ;
2011.
En effet, selon le tableau n°13, près de la
moitié des enquêtés soit 48,33 % consomment le
Dioscorea sp toute l'année ; 20 % la consomment entre 5
et 7 mois dans l'année et 31,67 % en consomment entre 2 et 4 mois. Cela
traduit l'importance de la place que tient le Dioscorea sp dans les
habitudes alimentaires des populations de la région.
De plus, la composition nutritive du tubercule justifie cette
consommation abusive du Dioscorea sp car, malgré cela, les
populations n'ont aucun problème de nutrition. En effet, la composition
chimique des tubercules de Dioscorea sp est voisine de celle de la
pomme de terre avec environ 25 % d'amidon, mais un peu plus de protéines
(environ 7 %, quatre fois plus que le manioc). Ils sont très pauvres en
matière grasses et en minéraux et assez riche en vitamine C.
Tableau n°14 : Répartition des
enquêtés selon le nombre de repas à base
De Dioscorea sp par jour
Nombre de repas par jour
|
Effectifs
|
Pourcentages
|
1 repas
|
23
|
19,17
|
2 repas
|
66
|
55,00
|
Plus de 2 repas
|
31
|
25,83
|
Total
|
120
|
100,00
|
Source : Travaux de terrain,,
2011.
L'analyse du tableau n° 14 révèle que 55 %
des enquêtés consomment le Dioscorea sp en repas au moins
deux fois par jour. 25,83 % le prennent plus de deux fois par jour contre
seulement 19,17 % qui en consomment une fois par jour. Ils les consomment en
tranches cuites le matin avant le départ pour le champ, en pâte
pilée (foufou) au déjeuné et au dîné.
- Le revenu issu du Dioscorea sp et la
santé des producteurs
Les revenus de la vente de Dioscorea sp ont permis en
partie à bon nombre de ménages de retrouver la vitalité,
la joie de vivre et de travailler en toute quiétude. Au cours de nos
investigations, 9,16 % des enquêtés ont reconnus s'être
servis de ces revenus dans les cas extrêmes tels que les
césariennes, les opérations d'hernies et les morsures de
serpents. D'autres ont affirmés qu'ils ont contractés des dettes
à l'USP (Unité de Soins Périphériques) de Dimori et
ce n'est qu'après la vente du Dioscorea sp qu'ils ont pu les
éponger. Certains même sont allés jusqu'à emprunter
de l'argent auprès de la seule institution de micro finance de la place
à savoir l'IDH (Investir Dans l'Humain) pour résoudre non
seulement les problèmes de capitaux agricoles mais aussi celui de la
santé. En un mot, les revenus du Dioscorea sp ont permis dans
une certaine mesure aux producteurs de Dioscorea sp de faire face
à certains problèmes de santé qui exigeaient des sommes
quasi importantes.
- Le revenu issu du Dioscorea sp et l'achat des
équipements
Se distraire et être à l'écoute des
informations de son pays et du reste du monde est un idéal à
atteindre par tout homme soucieux du progrès. Les paysans de Dimori
l'ont vite compris en se dotant des appareils électroménagers
tels que les poste radios, quelques postes téléviseurs, quatre ou
cinq tout au plus disséminés dans tout le village à cause
du manque de l'électricité et des téléphones
portables.
- Le revenu issu Dioscorea sp et l'habitat
L'habitat amélioré qui a marqué le
paysage de la région pendant la période d'avant la
libéralisation de cette économie autour des années 1970
est tombé en désuétude. Les murs des bâtiments
souvent en banco se fendillent et s'écroulent en partie sous le poids
des pailles surannées, vielles et pourris par endroits devant
l'incapacité notoire des propriétaires de les moderniser.
Aujourd'hui, ceux qui arrivent à se construire un
habitat relativement moderne grâce à la vente des tubercules de
Dioscorea sp ou grâce à leurs enfants partis en aventure
au Nigeria ou ailleurs (65 sur 120 soit 54,16 % de nos enquêtés),
le font souvent en banco couvert de tôles ondulées sans
crépissage ni cimentage. (Figure n°8).
Figure n° 8 : Répartition des
enquêtés ayant construits selon le type de
construction
Source : Travaux de terrain ;
2011
Au regard la figure n°8, parmi les constructions
réalisées, 18,46 % sont en dure et 81,54 % sont en banco. Par
ailleurs, il faut souligner que la majorité des constructions en dure
est essentiellement l'oeuvre des producteurs commerçant ou
exerçant une activité parallèle très rentable.
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