Paragraphe 2 : LA CONSECRATION DU DROIT A LA SANTE PAR
L'ASSURANCE SOCIALE DANS LES INSTRUMENTS DES INSTITUTIONS SPECIALISEES DE L'ONU
ET DANS LES CONVENTIONS REGIONALES DES DROITS DE L'HOMME
Si dans les textes à valeur universelle on ne peut
trouver qu'une consécration du droit à la santé dans sa
généralité, dans les autres instruments internationaux on
peut trouver des Conventions ou des déclarations ou des
résolutions consacrant soit explicitement soit implicitement un droit
à la santé par l'assurance sociale.2
Parmi ces textes on trouve ceux des organisations
régionales (B), et ceux des organisations
spécialisées de l'O.N.U.3
(A).
A. Les instruments des organisations
spécialisées de l'O.N.U. Il s'agit des instruments de l'O.I.T.
(1) et ceux de l'O.M.S. (2).
1 Art. 18.
2 Cf. R. BONNET, Droit international de
la sécurité sociale, Litec, 1983. Cf. N. VALTICOS,
Droit international du travail, Dalloz, 1970.
3 V. à ce propos : R. Ben Achour,
Institutions Internationales, C.R.E.A. 1995, et pour le même
auteur Institutions de la société internationale, p.
209. C.P.U, 2004.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 22
1. Les Conventions de l'Organisation Internationale de
Travail1
S'intéressant à différentes
catégories de travailleurs, ces Conventions touchent au droit à
la santé à travers l'assurance sociale. Il s'agit, notamment, des
Conventions n° 24 et 25 de 1927 relatives respectivement à
l'assurance maladie en industrie et en agriculture, et la Convention n°
103 de 1952 modifiant la Convention n° 3 de 1919 sur la protection de la
maternité.
Ces Conventions assurent un droit à la santé
à des catégories de citoyens et de travailleurs. Il s'agit des
enfants2, des femmes3, des dockers4, des gens
de mers5, des adolescents6, des
pêcheurs7, des travailleurs agricoles8, des
travailleurs des mines9 et des travailleurs dans
l'industrie10.
A cela s'ajoutent des Conventions de portée
générale notamment la Convention n° 102 de 19542 concernant
la norme minimale de sécurité sociale et la Convention n°
130 de 1969 concernant les soins médicaux et les indemnités de
maladie.1
La Convention n° 102 de 1952 concernant la norme minimale
de la sécurité sociale adoptée le 28 juin 1952 dispose
dans son article 1er que « tout membre... doit garantir
l'attribution de prestations aux personnes protégées lorsque leur
état nécessite des soins médicaux de caractère
préventif ou curatif ... » et par application de l'article 9,
« les personnes protégées doivent comprendre :
a) soit des catégories prescrites de
salariés formant au total 50% au moins de l'ensemble des
salariés, ainsi que les épouses et les enfants des
salariés de ces catégories,
b) soit des catégories prescrites de la population
active, formant au total 20% au moins de l'ensemble des résidents, ainsi
que les épouses et les enfants des membres de ces
catégories,
1 Cf. M. ENNACEUR, Droits de l'homme et
Droit international du travail : l'apport de l'O.I.T. aux développement
des Droits de l'homme, R.T.D.S. n° 7,1995, Semaine internationale sur le
droit social et les droits de l'homme , organisée par l'A.T.D.S., le
27-28 Mai 1993 à Tunis, p. 13 à 51.
2 La Convention n° 90 de 1948.
3 La Convention n° 89 de 1948 et la Convention
n° 4 de 1919.
4 La Convention n° 28 de 1929 et la Convention
n° 32 de 1932.
5 La Convention n° 55 et 56 de 1936 et les
Conventions n° 164 et 165 de 1987.
6 La Convention n° 124 de 1965 et les Conventions
n° 77, 78 et 79 de 1946.
7 La Convention n° 113 de 1959.
8 La Convention n° 12 de 1921 et la Convention
n° 25 de 1927.
9 La Convention n° 176 de 1993.
10 La Convention n° 174 de 1995.
c)
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 23
2 Sur le rôle de l'O.I.T. dans la
législation de sécurité sociale V.
- P. LAROQUE, « L'organisation internationale du travail et
la sécurité sociale », in, RISS n° 4 , 1969,
p. 538 et s.
soit des catégories prescrites de résidents,
formant au total 50% au moins de l'ensemble des résidents,
d) soit lorsqu'une déclaration a été
faite en application de l'article 3 des catégories prescrites de
salariés formant au total 50% au moins de l'ensemble des salariés
travaillant dans des entreprises industrielles qui emploient 20 personnes au
moins, ainsi que les épouses et les enfants des salariés de ces
catégories »2. C'est ce qui permet d'accorder des
prestations différentes à l'affilié à un
régime de sécurité sociale et ses ayants droits dans des
éventualités diverses dont notamment le cas d'un accident de
travail ou d'une maladie professionnelle le cas de grossesse, d'accouchement et
leurs suites.
Ces risques sociaux sont couverts pour l'assuré social
et pour son épouse ainsi que ses enfants, ce qui permet d'étendre
le droit à la santé par l'assurance sociale à une tranche
encore plus importante de la population.
Dans le même sens la Convention concernant les objectifs
et les normes de base de la politique sociale adoptée le 22 juin 1962
considère qu' « en fixant le niveau de vie minimum, il faudra
tenir compte des besoins familiaux essentiels des travailleurs y compris ...
les soins médicaux ».
Ces soins aux termes de l'article 14 (4) de la même
convention peuvent, si « l'autorité compétente jugera
nécessaire ou opportun », favoriser les travailleuses en vue
de sauvegarder la maternité et d'assurer leur santé, leur
sécurité et leur bien être, ce qui renvoie par la suite
à poser la question relative à l'égalité de
traitement en matière de santé entre homme et femme,
résident et non résident.
D'une part, consacrant l'égalité de traitement
entre nationaux et non nationaux, la Convention n° 19 dans son article
1er oblige les Etats membre ratifiant la Convention à «
accorder à tous les victimes des accidents du travail sur son
territoire ou à leurs ayants droit, le même traitement qu'ils
assurent à leurs propres ressortissants en matière de
réparation des accidents du travail ». De même, la
Convention n° 102 prévoit explicitement dans son article 68 (1) que
« les résidents
.áÛÔáá
ÉíáæÏáÇ
ÊÇíÞÇÊáÇ Ç
,Çááå ÏÈÚ äÈ
íÏÇåáÇ ÏãÍã
1
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 24
qui ne sont pas des nationaux doivent avoir les
mêmes droits que les résidents qui sont des nationaux
».
D'autre part, la Convention n° 118 dans son article 3
prévoit que « tout membre pour lequel la présente
Convention est en vigueur doit accorder sur son territoire aux ressortissants
de tout autre membre pour lequel ladite Convention est également en
vigueur l'égalité de traitement avec ses propres ressortissants
au regard de sa législation ».
La Convention n° 121 dans son article 27 dispose : «
tout membre doit assurer, sur son territoire aux non nationaux
l'égalité de traitement avec ses propres ressortissants en ce qui
concerne les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies
». Dans le même sens, l'article 32 de la Convention n° 130
reprend presque les mêmes mots et fait peser la même obligation de
traitement égalitaire entre nationaux et non nationaux.
D'autre part, consacrant l'égalité de traitement
entre homme et femme et hors la protection de la maternité qui est par
nature une protection spécifique pour les femmes, les autres Conventions
consacrant le droit à la santé ne font aucune distinction entre
homme et femme.
Ainsi, la Convention n° 17 relative aux accidents du
travail1 et la Convention n° 18 relative aux maladies
professionnelles1 s'appliquent aux victimes d'accidents du travail
et aux victimes des maladies professionnelles sans distinction à base de
sexe.
La Convention n° 24 relative à l'assurance maladie
consacre aussi « l'égalité des assurés des deux
sexes dans leur soumission à un régime d'assurance maladie commun
».
La recommandation n° 90 adaptée par la
conférence générale le 6 juin 1951 dans sa
35ème session concernant l'égalité de
rémunération entre la main d'oeuvre masculine et la main d'oeuvre
féminine pour un travail de valeur égale prévoit :
- G. PERRIN, « Le rôle de l'organisation
internationale du travail dans l'harmonisation des conceptions et des
législations de sécurité sociale », Dr. Soc., n°
9,1970.
1 La Convention n° 17 concernant la
réparation des accidents du travail adopté le 6/10/1925 et
révisée en 1964 par la Convention n° 121.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 25
« 6) En vue de faciliter l'application du principe de
l'égalité de rémunération entre la main d'oeuvre
masculine et la main d'oeuvre féminine... des mesures appropriées
devraient être prises...
c- En prévoyant des services sociaux et de bien
être qui répondent aux besoins des travailleurs notamment de
celles qui ont des charges familiales et en finançant des services, soit
par des fonds publics en général, soit par des fonds de
sécurité sociale ... dans l'intérêt des travailleurs
sans considération des sexes ».
D'autant plus, on trouve des Conventions protégeant des
catégories professionnelles bien déterminées on trouve des
Conventions spécifiant des catégories de travailleurs selon
l'activité qu'ils exercent.
Ainsi, la Convention n° 12 concernant la
réparation des accidents de travail dans l'agriculture adoptée le
12/11/1921 et révisée par la Convention n° 121 de 1964
s'étend à tous les salariés agricoles.
En plus, les Conventions n° 24 et 25 relatives
respectivement à l'assurance maladie en industrie et en agricole
instituent chacune une assurance maladie obligatoire, s'appliquant «
aux ouvriers, employés et apprentis des entreprises industrielles et
des entreprises commerciales, aux travailleurs à domicile et aux gens de
maison »2 et « aux ouvriers, employés et
apprentis des entreprises agricoles »3.
Les adolescents sont protégés dans les
Conventions n° 774 et 785 de 1946 qui, exigent un
examen médical d'aptitude à l'emploi et un contrôle
médical poursuivi jusqu'à l'âge de 18 ans pour les enfants
et les adolescents. Cet âge est élevé à 21 ans au
moins pour « les travaux qui présentent des risques
élevés pour la santé »6.
Les gens de mer sont protégés par les
Conventions n° 55 et 56 , la première concerne les obligations de
l'armateur en cas de maladie, d'accident ou de décès des gens de
mer adoptée le 24/10/1936 et qui pèse sur l'armateur l'obligation
de couvrir
1 La Convention n° 18 concernant l'assurance
maladie des travailleurs de l'industrie et du commerce des gens de maison,
adopté le 15/6/1927 et révisé en 1969 par la Convention
n° 130 concernant les soins médicaux et les indemnités de
maladie.
2 Art. 2ème de la Convention n°
24.
3 Art. 2ème de la Convention n°
25.
4 La Convention n° 77 concernant l'examen
médical d'aptitude à l'emploi dans l'industrie des enfants et des
adolescents adoptée le 9/10/1946.
5 La Convention n° 78 concernant l'examen
médical d'aptitude à l'emploi aux travaux non industriels des
enfants et des adolescents adoptée le 9/10/1946.
6 Art. 4 des deux Conventions n° 77 et 78 de
1946.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 26
les risques de maladie ou d'accident1, et la
deuxième concernant l'assurance maladie des gens de mer adoptée
le même jour assujettit « toute personne employée
à bord d'un navire autre qu'un navire de guerre, immatriculé dans
un territoire pour lequel la présente Convention est en vigueur et qui
pratique la navigation maritime ou la pêche »2
à un régime d'assurance maladie obligatoire.
Cette Convention a été révisé par
la Convention n° 165 concernant la sécurité sociale des gens
de mer adoptée le 9/10/1987, elle insiste sur le droit des gens de mer
à une protection de leur droit à la santé ainsi que pour
leurs ayants droit par l'une des branches de sécurité sociale
dont notamment les soins médicaux, les indemnités de maladie
professionnelles, les prestations de maternité ...
Les dockers, vu l'importance de leur rôle dans
l'économie internationale, se trouvent protégés contre les
différents risques possibles par la Convention n° 28 de 1929 sur la
protection des dockers contre les accidents et la Convention n° 32
adoptée le 27/04/1932 sur la protection des dockers contre les
accidents3 révisée par la Convention n° 152 sur
la sécurité et l'hygiène dans les manutentions
portuaires4.
Les travailleurs des mines sont aussi protégés
par la Convention n° 176 sur la sécurité et la santé
dans les mines adoptée le 22/06/1995, elle vise leur protection dans les
lieux de travail par des mesures visant à « encourager la
coopération entre les employeurs et les travailleurs et les
représentants en vue de promouvoir la sécurité et la
santé dans les mines »5. Qu'il s'agisse d'une
protection générale qui s'étend à tous les
travailleurs ou d'une protection spécifique de certaines
catégories socioprofessionnelles, la protection de la santé des
travailleurs s'effectue au niveau des textes par la consécration d'un
droit à la santé par l'assurance sociale.
Ainsi, si un droit à la santé a
été consacré dans les instruments de l'O.I.T. pour les
travailleurs6 qu'en est-il de leur protection dans les travaux de
l'O.M.S. ?
1 Art. 6 Al. 1er.
2 Art. 2 Al. 1er (a).
3 Cette Convention n'est plus en vigueur.
4 V. aussi la recommandation n° 16 concernant la
sécurité et l'hygiène du travail dans les manutentions
portuaires par la conférence générale de l'O.I.T.
adoptée le 6 juin 1979.
5 Art. 15 de la Convention n° 176.
6 Cf. M. ENNACEUR : Art. préc.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 27
2. Les instruments de l'Organisation Mondiale de la
Santé
L'assemblée mondiale de la santé adopte des
résolutions et des recommandations (c) pour
atteindre les buts prévus par la Constitution (a)
ainsi que les buts arrêtés par l'organisation en vue
d'assurer une politique de santé pour tous
(b).
a. La Constitution de l'O.M.S.
La constitution de l'O.M.S. a été adoptée
par la conférence internationale de la santé tenue à New
York du 19 juin au 22 juillet 1946, signée par les représentants
de 61 Etats le 22 juillet 1946 et est entrée en vigueur le 7 avril
1948.
Dans son préambule, cette constitution dispose que
« la santé est un état de complet bien être
physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de
maladie ou d'infirmité »1.
Ce meilleur état de santé est « l'un
des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race,
sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale
».
En vue d'amener tous les peuples du monde au niveau de
santé le plus élevé possible, l'O.M.S. exerce des
fonctions diverses, parmi lesquelles:
« c- aider les gouvernements, sur leur demande à
renforcer leurs services de santé. e- faire progresser l'action en
faveur de la santé et du bien être de la mère et de
l'enfant et favoriser leur aptitude à vivre en harmonie avec un milieu
en pleine transformation.
p- étudier et faire connaître en
coopération au besoin avec d'autres institutions
spécialisées, les techniques administratives et sociales
concernant l'hygiène publique et les soins médicaux
préventifs et curatifs, y compris les services hospitaliers et la
sécurité sociale.
1 A ce propos, C. SAUVAT évoque dans son
ouvrage ; Réflexions sur le droit à la santé,
Presses Universitaire d'AIX MARSEIL-P.U.A.M., 2004, p. 26-27, deux points de
vue :
- Ceux qui critiquent la notion de bien être social qui
est bien trop extensive pour pouvoir faire de la santé un concept
juridique.
- Ceux qui approuvent la définition donnée puisque
l'alinéa 11 du préambule vise la protection de la
santé.
Il résume par l'idée que « Quoi qu'il en
soit, il n'est pas réellement nécessaire de définir la
notion de santé pour mener à bien une étude sur le droit
à la santé. En effet, il n'est pas besoin de définir le
terme santé pour en comprendre le sens et pour en faire l'objet d'un
"droit à" ».
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 28
q- fournir toute information, donner tous conseils et
toute assistance dans le domaine de la santé ».
Il est nettement observable que certaines des fonctions de
l'O.M.S. en matière de santé peuvent être assurées
par les assurances sociales.
D'autres fonctions sont confiées à
l'assemblée de la santé dont notamment :
« i- étudier des recommandations ayant trait
à la santé, émanant de l'assemblée
générale, du conseil économique et social, des conseils de
sécurité ou de tutelle des nations unies et faire rapport
à ceux-ci sur les mesures prises par l'organisation en exécution
de telles recommandations ».
L'O.M.S. exerce aussi un contrôle vis-à-vis de
chaque Etat concernant « les mesures prises et les progrès
réalisés pour améliorer la santé de sa population
»1. Ce contrôle est effectué sur les «
lois, règlements, rapports officiels et statistiques importants
concernant la santé et publiés dans cet Etat
»2, que « chaque Etat membre communique
rapidement à l'organisation », et sur « les rapports
statistiques et épidémiologiques selon des modalités
à déterminer par l'assemblé de la santé
»3. Le contrôle s'effectue aussi sur les rapports
annuels et les mesures prises en exécution des recommandations de
l'organisation et en exécution des Conventions, accords et
règlements4, notamment les textes portant sur le droit
à la santé et à la sécurité sociale dans le
cadre d'une politique de santé pour tous.
b. La politique de la santé pour tous et ses
buts
L'O.M.S. s'est orientée depuis le milieu des
années 1970 vers l'adoption d'une stratégie appelée :
« la stratégie mondiale de la santé pour tous d'ici l'an
2000 », pour adopter ensuite une politique de santé pour tous
au XXIème siècle.
? La stratégie mondiale de la santé pour
tous d'ici l'an 2000
En vue d'assurer un état de complet bien être
physique mental et social, l'organisation s'est fixée en 1991 une
stratégie mondiale de la santé pour tous d'ici
1 Art. 61 de la constitution de l'O.M.S.
2 Art. 63 de la constitution de l'O.M.S.
3 Art. 64 de la constitution de l'O.M.S.
4 Art. 62 de la constitution de l'O.M.S.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 29
l'an 2000. Cette stratégie consiste à atteindre
38 buts qui présentent en réalité des obligations que fait
peser sur les Etats membres l'organisation mondiale de la santé.
Les buts de l'O.M.S. ont été révisés
en 1992, en proposant des objectifs chiffrés et des moyens à
mettre en oeuvre pour les atteindre avant l'an 2000. Parmi ces buts : ?
L'obligation « d'élaborer et de mettre en oeuvre des
politiques conformes aux concepts et aux principes de la politique
européenne de santé pour tous ... »1.
? L'obligation « de créer des
structures et des processus de gestion susceptibles d'inspirer, de guider et de
coordonner le développement sanitaire, conforment aux principes de la
santé pour tous »2.
? L'obligation « de garantir
l'adéquation des établissements hospitalier figurant dans la
planification avec les besoins en soins de la population concernée
»3.
L'assurance sociale peut paraître un moyen
approprié et efficace pour assurer et garantir une santé pour
tous, puisqu'elle peut servir de moyen de financement des établissements
hospitaliers4 garantissant ainsi les soins de santé pour une
large couche de la population à savoir les assurés sociaux et
leurs ayants droit. Certes, la santé est intimement liée au
développement économique, ce qui explique le manque dans certains
pays, notamment les pays les moins avancés, de nouvelles
compétences et capacités en matière de santé
publique. Ce constat ne peut que rendre « l'action de l'O.M.S.
éphémère et le droit à la santé incertain
»5.
? La politique de la santé pour tous au
XXIème siècle
Cette politique de santé adoptée par la
communauté internationale en mai 1998 vise à atteindre un but
général inchangé qui est de permettre à chacun de
réaliser pleinement son potentiel de santé.
Ce but a pour fondement trois valeurs fondamentales qui sont :
? La santé est un droit fondamental de la personne
humaine.
? L'équité et la solidarité en
matière de santé entre les pays et entre les groupes de
population dans les pays.
1 But 33.
2 But 34.
3 But 39.
4 On peut citer l'exemple des cliniques de la C.N.S.S.
en Tunisie.
5 N. De Grove VALDEYRON et S. HAMDOUNI, Tout le Droit
(collection dirigée par Philippe Seguin) 2002.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 30
? La participation des personnes, des groupes, des
populations, des institutions, et des organisations au développement
sanitaire.
Dans sa politique, l'O.M.S. vise l'équité en
matière de santé « en améliorant nettement le
niveau de santé des groupes défavorisés
»1, notamment la santé des nouveaux nés,
nourrissons, enfants d'âge préscolaire les jeunes jusqu'à
18 ans et les personnes âgées de plus de 65 ans2.
Ces objectifs ne peuvent être atteints que par
l'amélioration des services de soins en assurant, à tous, un
meilleur accès aux soins de santé et une meilleure qualité
des soins (buts 15 et 16).
Certes, il n'est pas facile d'aboutir à un tel
système de soins sans penser au financement des services de santé
et l'affectation des ressources3. A ce propos, le
17ème but exige aux Etats membres de se doter de «
mécanismes viables de financement des systèmes de
santé et d'affectation des ressources à ces derniers, reposant
sur les principes d'égalité d'accès aux soins,
d'efficacité en regard des coûts, de solidarité et de
qualité optimale »... Ainsi, « les systèmes de
financement des soins de santé devraient garantir une couverture
universelle, la solidarité et la viabilité ».
Pour les Etats membres, la sécurité sociale
présente le moyen le plus efficace pour atteindre lesdits buts puisque
la couverture sociale à toute la population va permettre d'assurer un
droit à la santé pour tous par le biais des assurances
sociales.
En effet, si les Etats membres de l'organisation ont
l'obligation d'agir en tant qu'acteur, l'organisation doit agir par son
rôle normatif.4
c. Les résolutions et recommandations de
l'O.M.S.
En harmonie avec sa constitution et les stratégies de
santé qu'elle élabore, l'O.M.S. adopte des résolutions et
des recommandations consacrant le droit de l'être humain à la
santé.1
1 But 2.
2 Buts 3, 4 et 5.
3 « Le vaste programme pris en charge par l'O.M.S. conduit
à l'éparpillement de ses efforts et à la dilution de ses
moyens financiers qui sont limités » N. De Grove VALDEYRON et S.
HAMDOUNI, Op. cit.
4 Cf. L. AYADI, L'hygiène de
l'environnement et la santé en Tunisie, mém. de D.E.A.,
Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales, 1998-1999, p.
12 et s.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 31
Ces travaux doivent être un moyen pour
concrétiser une utopie quasi universelle de l'O.M.S. qui est «
la santé pour tous », une utopie d'un «
état de complet bien être physique, mental et social
».
« Cette conception totaliste de la santé,
droit de l'individu au bien être, vaut affirmation du potentiel
étatique d'amélioration des conditions de vie, sorte
d'auto-proclamation de l'Etat de bien être (Welfare State)
»2.
En 1976, le directeur général de l'O.M.S.,
conscient du rôle de l'organisation, disait que « Si tout
paraît avoir été dit au sujet de la santé publique,
peut être tout doit être repensé ...
»3. A maintes reprises, l'assemblée mondiale de
santé insiste auprès des Etats membres pour qu'ils
prévoient des ressources et accélèrent l'application des
mesures nationales en vue d'assurer une couverture universelle en
matière de santé notamment la santé maternelle des
nouveaux nés et des enfants par la résolution n° WHA58-31 du
25 mai 2005, la santé des travailleurs par la résolution
n°WHA49-12 de 1996 et la résolution du conseil exécutif
n° CE124R49 du 6 mai 1999.
La protection de la santé des travailleurs fait l'objet
d'un plan d'action mondiale pour la santé des travailleurs adopté
par la résolution n° WHA60.26 du 23 mai 2007 pour la période
2008-2017.
Par cette résolution, l'assemblée mondiale de la
santé « invite instamment les Etats membres :
1) à concevoir des politiques et des plans
nationaux en collaboration avec les travailleurs, les employeurs et les
organisations qui les représentent dans le but d'appliquer le plan
d'action mondiale pour la santé des travailleurs... ;
2) à faire en sorte que tous les travailleurs y
compris ceux du secteur informel, des petites et moyennes entreprises du
secteur agricole, et les travailleurs migrants et travailleurs contractuels
soient couverts par les interventions essentielles et les services de
médecine du travail de base... ».
1 Pour plus de détails sur la structure
organique et les fonctions des organes de l'O.M.S., V. M. DIEAZ DE VELASCO,
Les organisations internationales, Collectif Droit International,
éd. Economica, 2002.
2 M. CAMU, H. ZAIEM et H. BAHRI, Etat de
santé ; Besoin médical et enjeux politiques en Tunisie,
éd. Centre National de Recherches Scientifiques ; Centre Régional
de Publication de Marseille, 1990, p. 14.
3 Enquête de thérapies : « Y
a-t-il des remèdes pour juguler l'explosion vertigineuse des
dépenses de santé ? », La Revue de l'Entreprise, n°
Spécial Hors Série, Décembre 2001, p. 28.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 32
1 V. Page Web du Bureau régional de l'O.M.S.
pour la Méditerranée orientale, consacrée à la
Tunisie ( http : //www.emro.who.int/emrinfo/index.asp ?ctry=tun).
Par la même résolution, l'assemblée
mondiale de la santé « prie le directeur général
:
1) de promouvoir la mise en oeuvre du plan mondial
d'action pour la santé des travailleurs 2008-2017 aux niveaux national
et international... ».
Il y a lieu de noter que l'O.M.S. dans un rapport sur la
stratégie de coopération de l'organisation avec la Tunisie met en
relief la réforme du système d'assurance maladie et vise par
cette stratégie « à renforcer le secteur de la
santé à travers un plaidoyer pour des politiques de promotion de
la santé, un appui technique et le renforcement des capacités de
pilotage du ministère de la santé publique afin qu'en
collaboration avec les autres partenaires, le système de santé
réponde mieux aux besoins de la population »1.
Pour développer mieux encore le potentiel de
santé des Etats membres, par la résolution n° WHA 58-33 sur
le financement durable de la santé, couverture universelle et
sécurité sociale, « l'assemblée mondiale de la
santé invite instamment les Etats membres :
1) à faire en sorte que les systèmes de
financement de la santé prévoient le recours au paiement
anticipé des cotisations financières pour les soins de
santé... ;
2) à veiller à une réparation
adéquate et équitable d'infrastructures de soins et de ressources
humaines pour la santé de qualité de sorte que les assurés
bénéficient de services de santé équitables et de
qualité conformément aux prestations prévues ;
4) à prévoir la transition vers la couverture
universelle de tous les citoyens pour contribuer à répondre aux
besoins de population en matière de soins de santé ... et
à instaurer la santé pour tous ;
5) à reconnaître que lors de la transition
vers la couverture universelle chaque option devra être mise en place
compte tenu du contexte macroéconomique socioculturel et politique
particulier de chaque pays ;
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 33
7) à mettre en commun leurs données
d'expérience sur les différentes méthodes de financement
de la santé, y compris la mise en place de système de
sécurité sociale et de système privés, publics et
mixtes... ».
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