3.2 Nuptialité et mariage
3.2.1 Nuptialité
Le processus d'entrée en union en milieu immigré
lokpa a évolué dans le temps. Les groupes de migrants qui
venaient à Parakou dans les années 60-70et 80 étaient
constitués en majorité de personnes mariées. L'homme
était
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FAMILIAUX
généralement de la vingtaine et son
épouse un peu moins. A partir des années 90, cette tendance s'est
inversée avec un passage tardif des jeunes en mariage et une
recomposition des stratégies de mariage. Les jeunes migrants en
direction de Parakou, viennent à l'âge de 25 à 30 ans,
célibataires sans enfant.
Suivant les étapes de leur socialisation, ils passent
par l'école, cadre formel d'instruction,et les activités
agricoles intenses,après avoir échoué à
l'école. L'expérience des activités agricoles intenses, en
rapport avec la modestie des avantages obtenus de ces activités par les
jeunes, incite ces derniers au départ pour aller chercher
(måtå yala). Aller chercher fortune ailleurs, telle est la
mission que s'assignent les jeunes en allant « faire de jobs »
(travail agricole rémunéré) dans les régions de
Djougou, de Bassila, de Savalou, de Savè, de Tchaourou, de N'dali ou de
Bembèrèkè ; avant de venir à Parakou. Ce temps
passé pour `' faire de jobs`' retarde l'âge d'entrée en
union matrimoniale des jeunes à tel point qu'il y en a jusqu'à
l'âge de 35 ans qui vivent sans compagne. Ceux-là disent :
« Je n'ai pas de femme car je n'ai pas trouvé
à manger, je
peux chercher femme ? C'est Dieu qui sait comment et quand
je vais me marier. Je cause avec toutes les filles. Mais elles ne sont pas
mes
copines ».
Alors que l'âge au premier mariage des parents variait
entre 20 et 25 ans, celui des jeunes hommes de la dernière
génération varie entre 25 et 35 ans selon les interlocuteurs
rencontrés. Ces derniers attendent d'abord de finir d'apprendre un
métier et de s'installer avant de s'engager dans le mariage. De
même, les filles après l'exercice de l'emploi domestique,
apprennent un métier pendant en moyenne 3 ans avant de se marier
à 25 ou 26 ans. Les jeunes migrants ayant grandi à Parakou,
vivent la période de célibat relativement moins longtemps que
leurs aînés compte tenu de la rapidité de leur insertion
professionnelle. A ce propos un jeune migrant témoigne :
« J'ai une copine avec qui nous avons fait deux ans.
C'est à
cause de mon diplôme que nous ne nous sommes pas encore
mariés.
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Si j'obtiens mon diplôme et que j'ouvre mon atelier,
nous allons nous marier. Elle-même est en congé de
libération pour la couture. Quand
elle aura pris son diplôme et que j'aurai pris le
mien, nous pourrons
nous entendre ». (IBRAHIM Awali, 30ans, coiffeur,
zémidjan,
célibataire, Ladji Farani, 03.04.2006)
Les jeunes filles, quant à elles, en même temps
qu'elles économisent de l'argent pour apprendre un métier, elles
achètent également les nécessaires du trousseau de mariage
: les pagnes, les bols, les chaussures et les bijoux. Pour la grande
majorité très peu sont instruites et demeurent
célibataires jusqu à l'âge de 28 ans, pour de rares cas
avec enfants. Cette augmentation de l'âge au premier mariage se constate
le plus dans le groupe des anciennes domestiques. Celles qui ont migré
vers Parakou exercent les travaux domestiques ou parfois contraintes par les
parents biologiques à l'âge de 15 ans à exercer l'emploi
domestique. Quant aux filles nées à Parakou, elles migrent
souvent vers Cotonou après avoir échoué à
l'école primaire. A l'âge adulte, celles-ci, après trois ou
cinq ans de séjour, reviennent présenter leurs amis qui ne
tardent plus à demander leur main.
Dans le choix des conjoints, contrairement à l'ancienne
génération qui oriente généralement son choix vers
la grande famille, la jeune génération fonde son choix
relativement sur les critères d'appartenance ethnique et religieuse.
L'exogamie est plus prononcée dans leur groupe que dans celui de leurs
parents. Mais, si ce sont les parents qui font le choix ou qui orientent le
choix de leurs fils, ce choix est toujours orienté vers l'endogamie. Le
père peut proposer une fille de sa famille maternelle à son fils.
La tante maternelle peut également proposer une fille à son
neveu. Cette pratique renforcerait durablement les liens familiaux selon eux.
Les jeunes migrants épousent en majorité des Lokpa, les Yom, les
Baatombu, les Dendi, les Yorouba et les Bètamaribè.
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Les jeunes migrants vivent en union libre pendant 2 ou 4 ans.
Certains conjoints font leur rencontre au village lors des séminaires ou
au cours des funérailles au village, d'autres chez un ami à
Parakou.
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