2.1.2 Motifs de la migration des jeunes gens et des
femmes.
Les nouvelles générations d'arrivants sont
d'avantage mues par des ambitions résolument orientées vers la
recherche d'emploi non agricole même si ce type d'emploi s'impose comme
un passage obligé pour les jeunes migrants.
Dans les années 80 et 90, les jeunes gens et les femmes
migraient vers Parakou, " pour faire de jobs ". Les filles viennent avec la
permission du père et sous l'incitation de la mère ou de la
grande soeur. Elles sont à la recherche de revenus pour réaliser
leur trousseau de mariage et pour apprendre un métier valorisant. Les
femmes quant à elles, sont venues généralement avec un
enfant
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ENVIRONNEMENT URBAIN ET CHAGEMENTS
FAMILIAUX
au dos en vue d'accumuler des revenus leur permettant de
renouveler les pagnes déjà usés ou pour se faire un
capital pour le petit commerce. Aussi, parmi les filles, il y en a qui viennent
à Parakou exercer l'emploi domestique parce que très tôt
orphelines de mère, elles sont orientées par leurs tantes
maternelles vers cette activité. Cette autonomisation des forces
productrices familiales concerne également les jeunes gens qui dans leur
grande majorité, viennent à Parakou pour apprendre un
métier comme la maçonnerie, la menuiserie, la soudure, et la
couture. Pour y parvenir, ils font le plus souvent un détour de 6
à 12 mois dans la région de
N'dali-Bembèrèkè, à Tchaourou, à Kilibo et
au Nigeria afin de réunir les frais de contrat d'apprentissage au
métier de leur choix. Cet itinéraire professionnel répond
aux aspirations des migrants qui, tout en cherchant un emploi, veulent
élargir leur répertoire de localités visitées. Seul
un petit groupe s'insérait directement, avec le statut de manoeuvre dans
les services publics comme les TP, la SBEE, ou encore dans les
dépôts de ciment. Ils sont généralement
célibataires avant de venir à Parakou.
A partir des années 90, les jeunes filles qui viennent
à Parakou pour `'faire des jobs» de vacance ou les travaux
domestiques, le font juste pour avoir de l'argent et aller apprendre la
couture, la coiffure ou le tricotage. Elles viennent souvent avec l'accord des
parents biologiques avec qui elles entretiennent d'étroites relations
d'entraide. Elles sont accueillies par les parents du village
déjà établis et utilisent ces réseaux relationnels
pour trouver rapidement du travail dans les restaurants locaux et dans des
ménages.
2.1.3 Organisation de l'accueil
La fonction d'accueil que remplissent souvent les familles
urbaines, maintient les solidarités familiales et diversifie les
réseaux relationnels. Dans les années 60, 70 et 80, les migrants
étaient accueillis par un frère du village qui se charge en moins
d'une semaine de leur trouver un logement dans les familles autochtones. Chaque
migrant en ce temps était adulte, 20 ans environ et marié
à
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ENVIRONNEMENT URBAIN ET CHAGEMENTS
FAMILIAUX
une ou deux femmes. Mais en venant, il se déplace avec
la première qui a parfois un enfant au dos. Les migrants à leur
arrivée sont généralement installés dans une
chambre à deux pièces. Ils travaillent dans les champs des
autochtones, en particulier leurs cohabitants pour mieux s'intégrer
à la famille hôte. Au fil du temps, généralement en
une saison agricole, ils obtiennent des terres sous forme de prêt ou de
don ou même exploite sans contrat une forêt pour en faire un champ.
Pendant la saison sèche, ils travaillent comme aide maçons sur
les chantiers de construction pour remédier à la réduction
des activités agricoles.
Si les premiers groupes servaient comme manoeuvres dans les
champs de leurs hôtes autochtones, propriétaires de logements et
de terres, les seconds sont accueillis par un parent Lokpa du village
exerçant un métier souvent non agricole. Ceux-ci répondent
souvent en termes de parenté sociale (parenté non fondée
sur des relations de consanguinité ou d'alliance) et non en termes de
parenté biologique. Ils viennent individuellement ou à deux et
sont plus jeunes que les chefs de ménages qui les accueillent. Ainsi,
les parents qui accueillent cette catégorie de migrants ont souvent un
emploi stable ou occasionnel. Ceci s'explique à travers ces propos :
« Compte tenu des problèmes de vie sociale,
j'ai laissé l'école malgré moi. C'est ainsi que je me suis
dirigé vers Parakou en 83 malgré moi auprès de l'oncle de
ma mère, un ingénieur des TP. Avant de venir à Parakou, je
n'en entendais pas parler. C'est en 86 que j'ai commencé la soudure
à Zongo. J'ai été guidé par l'oncle ». (B.A.,
42ans, soudeur et zémidjan, EPP centre, 13.04.07)
Ce discours décrit l'une des nombreuses stratégies
utilisées par les jeunes migrants pour s'intégrer dans la famille
d'accueil et dans les secteurs d'activité urbains. Ceci prouve qu'il y a
eu évolution dans les conditions d'accueil des migrants.
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