I-2-La publication par les journaux édités
par les nationalistes des sujets liés aux
réclamations de l'indépendance
Pendant la période de décolonisation, les
nationalistes camerounais vont réclamer la souveraineté du pays
à travers plusieurs événements qu'ils vont organiser. Ce
paragraphe présente ainsi l'intérêt porté par les
journaux fondés par les nationalistes aux manifestations majeures de
revendication de l'autonomie du Cameroun. Leur importance tient notamment du
fait qu'ils ont été repris plus tard par des historiens ayant
écrit sur cette période, de leur caractère populaire et
des sujets qu'ils ont abordé et qui constituaient des thèmes
assez importants dans le contexte sociopolitique de cette période. Parmi
les principaux événements indépendantistes de la
période allant de 1949 à 1957 et qui en raison de leur importance
étaient susceptibles d'être relayés dans les colonnes des
périodiques édités par les nationalistes on a :
· Le premier Congrès ordinaire de
l'UPC
Il se tient à Dschang du 10 au 13 avril 1950. Pendant
les travaux, les participants réaffirment leur souhait de voir le
Cameroun indépendant. À la fin de ce congrès, des
responsables de l'UPC dont MM. Um Nyobé, Ngom Jacques, Ntehep Jean et
Kingué Abel se rendent chez le juge de paix pour y déposer une
motion de protestation de la présence française au Cameroun
(Victor Julius Ngoh, 1990 :123).
· La conférence publique de l'UPC du 12
juillet 1951
Après les élections à l'Assemblée
nationale française de juin 1951, M. Um Nyobé, organise une
conférence publique dans la salle des fêtes d'Akwa pour
dénoncer ce qu'il qualifie de tripatouillage électorale
orchestré par l'administration coloniale. À l'issu de ce scrutin,
l'UPC a obtenu 3081 voix 280.302 suffrages exprimés (Idem, P.125). Au
cours de cette conférence plusieurs dirigeants de l'UPC dont MM.
Djoumessi Mathias et Um Nyobé Ruben respectivement Président et
Secrétaire général du parti prennent la parole pour
condamner la fraude massive enregistrée pendant les élections et
pour réitérer la nécessité pour le pays
d'accéder à son indépendance.
· La Première
intervention de M. Um Nyobé à l'ONU
Le 17 décembre 1952, le Secrétaire
général de l'UPC, M. Um Nyobe Ruben s'exprime devant les membres
de la 4ème Commission de l'Assemblée
générale de l'ONU. Il sollicite la fixation d'un délai
pour l'expiration de la tutelle afin que le Cameroun soit indépendant
(Um Nyobé Ruben, « programme politique »,
1953). L'événement est assez important dans le contexte
sociopolitique de l'époque car c'est la première fois que l'ONU
accorde aux Camerounais l'opportunité de s'exprimer sur la
présence française dans le pays.
· La tournée de compte rendu du
Secrétaire général de l'UPC
Après son intervention à l'ONU, M. Um
Nyobé effectue une tournée de compte rendu qui le conduit dans
plusieurs villes du Cameroun en janvier 1953. Il entend donner aux populations
à travers les réunions publiques qu'il organise les grandes
lignes de son intervention aux Nations unies. Comme le dit Victor Julius Ngoh
(1990 :123), Il se rendit ainsi dans les villes de
Ngaoundéré, Tignère, Sa'a, Okola, Esse, Kribi et
Nkongsamba.
· La deuxième intervention du
Secrétaire général de l'UPC devant l'Assemblée
générale de l'ONU
Le 5 décembre 1953, M. Ruben Um Nyobé se rend
une fois de plus au siège de l'ONU à New-York où il prend
la parole devant les participants à la 8ème session
de l'Assemblée générale. Cette fois, il fait un
état des lieux de l'administration du Cameroun par la France et conclut
que seule une indépendance est nécessaire pour le pays (Ferdinand
Chinji-Kouleu, 2006 :94).
· Le premier congrès du Mouvement d'Union
Nationale
Le 9 juin 1956, à Dibombari, des nationalistes
réunis autour du Mouvement d'Union Nationale tiennent leur premier
congrès. Ils réclament l'amnistie des Camerounais
arrêtés à Douala en mai 1955 et ceux qui ont
été amenés à entrer dans le maquis,
l'indépendance et la réunification du Cameroun.
L'événement tient son importance en ce sens que c'est la
première fois depuis la dissolution prononcée de l'UPC le 13
juillet 1955 que des Camerounais tiennent une rencontre d'un tel niveau pour
réclamer l'indépendance et la réunification du pays (Idem,
P.128).
· La prise de parole de l'UPC dissoute à
l'ONU en 1956
Malgré l'interdiction de l'UPC par l'administration
coloniale le 13 juillet 1955 et après la visite de la mission
d'évaluation de l'ONU au Cameroun (Victor Julius
Ngoh ,1990 :130), l'UPC est de nouveau admise en 1956 à l'ONU
pour revendiquer l'indépendance du Cameroun. Le journal Kamerun mon
pays (No 0019 des Samedi 10 et dimanche 11 novembre
1956 :8) qui relaie cette information indique que :
« La commission de l'Assemblée des
Nations unies a examiné les problèmes des pays sous tutelle et,
en ce qui concerne le Kamerun, après de longs débats, a admis la
présence de l'UPC à New-York. M. Bargues, représentant de
la France s'est opposé et a déclaré que
ce mouvement a été dissout ».
Entre 1949 et 1957, les journaux fondés par les
nationalistes ont accompagné leurs propriétaires dans
leur lutte pour l'indépendance du Cameroun. Pour cela, ces organes de
presse vont relayer comme faits d'actualité plusieurs
événements organisés par les nationalistes pour
réclamer l'autonomie complète du pays. Parmi les
événements que nous venons de présenter voici ceux qui ont
été effectivement publiés dans les colonnes de ces
journaux.
Tableau 7 : Les principaux
événements anticoloniaux relayés par les
journaux
Fondés par les
nationalistes
Manifestation liée à la
réclamation de l'indépendance
|
Date
|
Couverture de ladite manifestation par La voix du
Cameroun
|
Couverture de ladite manifestation par Kamerun mon
pays
|
Le premier Congrès ordinaire de l'UPC
|
10-13avril 1950
|
X
|
Pas encore fondé
|
La conférence publique de l'UPC
|
12 juillet 1951
|
Non
|
Pas encore fondé
|
La Première intervention de M. Um Nyobé à
l'ONU
|
17décembre 1952
|
X
|
Pas encore fondé
|
La tournée de compte rendu du Secrétaire
général de l'UPC
|
Janvier 1953
|
X
|
Pas encore fondé
|
La deuxième intervention du Secrétaire
général de l'UPC à l'ONU
|
5décembre 1953
|
X
|
Pas encore fondé
|
Le premier congrès du Mouvement d'Union Nationale
|
9 juin 1956
|
X
|
X
|
La prise de parole de l'UPC dissoute à l'ONU en 1956
|
novembre 1956
|
X
|
X
|
Légende : X=
événement effectivement relayé par le journal
À la lecture de ce tableau, on se rend compte que les
journaux publiés par les nationalistes ont affiché un réel
intérêt à couvrir et à publier les principaux faits
d'actualité liés aux revendications d'indépendance.
Toutefois, si on comprend que le journal Kamerun mon pays,
fondé en 1956 n'a pas pu publier les faits qui se sont
déroulés avant son lancement, on peut néanmoins constater
que La voix du Cameroun, organe de l'Union des Populations du
Cameroun, n'a pas relayé tous les événements malgré
l'intérêt qu'il portait à la lutte pour
l'indépendance du Cameroun. En effet, la conférence publique
organisée par ce parti le 12 juillet 1951 n'a pas fait l'objet d'un
article dans les colonnes de ce journal.
Cette section a donc permis de présenter les principaux
organes de presse édités par les nationalistes et qui servent
d'illustration dans ce travail. D'où l'intérêt porté
par eux aux événements concernant les réclamations
d'indépendance. Seulement, on se serait attendu à ce que ces
organes de presse relaient toutes ces manifestations. Il n'en a pas
été le cas ; en effet l'information liée à la
conférence publique organisée le 12 juillet 1951 à Douala
par l'UPC pour protester contre les résultats des élections
à l'Assemblée nationale française et réclamer le
départ de la France n'a pas été publiée dans les
colonnes de cette publication. Il s'agit donc par la suite de comprendre
pourquoi même les journaux fondés par les nationalistes ne
publiaient pas tous les sujets liés aux grandes manifestations de
réclamation de l'indépendance organisés pourtant par leurs
propriétaires.
La section qui va suivre est une présentation des
informations recueillies auprès de sources diverses sur l'attitude des
autorités coloniales après la publication dans les colonnes de
La voix du Cameroun d'un article portant sur les résolutions du premier
congrès de l'UPC.
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