II- Intérêt de la recherche
L'importance majeure de cette thématique sur la
Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est qu'elle
constitue l'un des sujets phares de la recherche en sciences de gestion en ce
début de troisième millénaire. De plus, ce travail vise
à rapprocher deux concepts qui ont jusqu'ici, très peu fait
l'objet d'une recherche particulière dans notre contexte.
De manière spécifique, l'intérêt de
ce travail apparait principalement à deux niveaux :
· Sur le plan théorique, ce travail va contribuer
au renforcement et à l'enrichissement de la recherche sur les
thématiques de la RSE et de la création de valeur,
particulièrement dans le contexte camerounais. En effet, la
littérature abonde ailleurs sur ces deux concepts, mais au niveau
camerounais, il existe encore un vide à combler ;
· Sur le plan empirique, ce travail révèle
l'importance des activités extra économiques (environnementales
et sociales) comme leviers possibles de création de valeur
ajoutée économique. En plus, ce travail servira d'outil de
positionnement stratégique aux entreprises, par rapport à leur
environnement endogène et exogène, permettant de se
démarquer des entreprises concurrentes et de créer de la valeur
pour tous les partenaires économiques et sociaux de l'entreprise.
III- Objectifs de la recherche
Ce travail de recherche vise principalement à
mettre en exergue l'impact des pratiques de responsabilité
sociétale des entreprises sur la création de valeur.
Pour ce faire, il s'agira spécifiquement pour nous de :
- Déterminer les spécificités des
activités de responsabilité sociétale des entreprises au
Cameroun ;
- Découvrir l'approche de création de valeur
dominante au Cameroun ;
- Dégager le lien de causalité entre
Responsabilité Sociétale et Création de Valeur.
IV- Base des hypothèses et hypothèses de
la recherche
Les recherches sur la thématique de la
responsabilité sociétale des entreprises sont de plus en plus
nombreuses à travers le monde. Certains travaux établissent
d'ailleurs un lien positif entre RSE et performance de l'entreprise.
Orlitzky M., Schmidt F.L. et Reynes S.L.,
(2003), après avoir fait une synthèse de
plusieurs études menées avant eux sur les interactions entre la
RSE et la performance ont révélé que dans la plupart des
cas (pris dans différents contextes), on a décelé des
liens positifs et aussi quelques liens négatifs et que par
conséquent, on peut mesurer cette performance.
Les recherches empiriques tentant de cerner le lien entre la
RSE et la performance financière se sont ancrées dans la
littérature anglo-saxonne depuis une trentaine d'années
(Zeribi-Benslimane O. et Boussorra E., 2008). Toutefois, il
est à remarquer que la littérature empirique ne fait pas
état d'un consensus sur la nature du sens du lien de causalité.
L'examen des résultats des études existantes traduit pour une
part l'influence de la RSE sur sa performance financière, et pour une
autre part, le sentiment d'un lien fragile voire inexistant et quelque peu
contrasté (Allouche J. et Laroche P., 2005).
Cependant, nous constatons que ces liens positifs ou
négatifs, enrichissent ou appauvrissent uniquement les
propriétaires de capitaux sans tenir compte des autres partenaires
commerciaux et sociaux de l'entreprise. La performance de l'entreprise n'est
qu'un aspect de la création de valeur. Il s'agit en effet de la
conception actionnariale de la valeur qui est démotivante pour
l'ensemble des stakeholders. L'analyse de l'impact du lien entre RSE et
création de valeur s'inscrit dans une perspective d'élargissement
du système de gouvernance d'entreprise des seuls actionnaires à
l'ensemble des parties prenantes.
En effet, comme le soulignent Charreaux G. et
Desbrières P. (1998), dans la mesure où la notion de
valeur créée ne se réduit pas à la seule
transaction entre la firme et les actionnaires, l'analyse du processus de
création de valeur ne se limite pas à la seule relation avec les
actionnaires et à l'étude de l'influence du contrôle
exercé par ces derniers sur les dirigeants. Nos auteurs veulent ainsi
souligner l'importance des stakeholders dans le processus de création de
valeur et donc, de partage de la valeur créée. Autrement dit, la
relation RSE et création de richesse doit désormais
dépasser son seul aspect financier pour s'inscrire dans une logique de
création de valeur.
C'est d'ailleurs ce que soulignent Steurer R et al.
(2005) lorsqu'ils appuient que dans une économie
mondialisée caractérisée par des marchés de
capitaux de plus en plus compétitifs, l'objectif de création de
valeur constitue un objectif incontournable et légitime que les
dirigeants d'entreprises se doivent d'atteindre sur le long terme.
A ce titre, l'approche pluraliste (partenariale) de la valeur offre
des perspectives intéressantes puisqu'elle oblige le management de
l'entreprise à prendre en compte non seulement les intérêts
des actionnaires, mais également ceux des autres parties prenantes qui
participent activement au processus de création de richesse.
L'objectif ultime n'est donc plus de créer de la valeur
à tout prix pour les détenteurs de droits de
propriété (les stockholders), mais plutôt d'intégrer
une culture managériale orientée vers la satisfaction de
l'ensemble des stakeholders. Cependant, si tout le monde s'accorde pour
souligner l'intérêt d'une vision pluraliste de l'entreprise, la
mise en oeuvre pratique d'une telle acceptation se heurte à des biais
culturels qui réduisent considérablement sa validité
opératoire (Reynaud E. et al., 2008). Cette
pensée de Reynaud E. souligne l'incidence indéniable du contexte
sur les pratiques managériales.
Cependant, quelque soit le contexte, Charreaux G.
(1997) souligne que toute firme dont l'objectif est
de créer durablement de la valeur, doit disposer d'un savoir-faire et
d'un avantage compétitif difficilement imitable par ses concurrents.
C'est la raison pour laquelle, nous dépassons ces biais culturels et
voulons apprécier dans quelle mesure, la responsabilité
sociétale des entreprises pourrait constituer un levier fort et propice
de création de valeur.
La RSE pourrait ainsi induire un changement de paradigme
susceptible de jeter les bases d'un modèle de gouvernance responsable
dont l'objectif consisterait à créer de la valeur tout en
respectant les contraintes économiques, environnementales et sociales
(Gond J-P., 2006). Cette pensée de Gond, bien
qu'adaptée à notre objectif, semble négliger un aspect
important souligné par Charreaux G. et Desbrières P.
(1998). Ces derniers pensent en effet qu'un stakeholder ne peut
s'approprier davantage que la valeur qu'il contribue à créer,
sans provoquer de réactions défavorables des autres partenaires
qui se verraient spoliés.
Toutefois, il est clair que seule une évaluation
objective des différentes approches de création de valeur
permettra aux différentes parties prenantes de s'assurer du bien
fondé de l'engagement sociétal des entreprises. Cela serait rendu
possible grâce à une harmonisation de l'opérationnalisation
des concepts clés de notre recherche que sont la RSE et la
création de valeur. Mais en prélude à cette
opérationnalisation harmonisée, nous émettons les
propositions suivantes :
H1 : « Les activités extra
financières de l'entreprise contribuent positivement à
créer du surplus »
H2 : « Une meilleure pratique RSE
en interne est un préalable à des flux de ressources
additionnelles pour l'entreprise »
H3 : « Les stakeholders influencent
significativement le partage de la valeur créée en
entreprise ».
La vérification de ces hypothèses requiert au
préalable que l'on collecte et analyse des données. Cette
étape de la recherche repose sur un construit méthodologique bien
élaboré.
|