Le risque pénal dans la constitution des sociétés commerciales en droit OHADA ( Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires )( Télécharger le fichier original )par El Hadji Abdoul Aziz FALL Université Gaston Berger de Saint- Louis Sénégal - Master 2 juriste d'affaires 2010 |
Section 2: La négociation d'actions constitutive d'une infraction.La négociation d'actions fait l'objet elle aussi d'une incrimination de la part du législateur OHADA qui, pour permettre aux acquéreurs de certains titres qui se trouvent dans une difficulté de vérifier la régularité, d'être protégés des éventuels vices, a prévu cette infraction. Seront ici successivement envisagés, la violation des prescriptions légales relatives aux mises d'actions non encore libérées au porteur (paragraphe1) puis la violation du délai de négociabilité (paragraphe2). Paragraphe1: La violation des prescriptions légalesLa négociation est doublement interprétée : Il s'agit tantôt de la vente de titres sur un marché public, en banque ou à la bourse nécessitant la participation d'un intermédiaire, mais dans son acception plus large, il s'entend de toute aliénation de titres dans la forme commerciale par transfert ou virement de compte à compte, endossement ou tradition manuelle suivant la nature du titre.63(*) L'action de numéraire étant nominative64(*), l'AUSC pose l'interdiction des négociations d'actions illicites du fait de certaines irrégularités. Aux termes en effet de l'article 888 de l'AUSC, « encourent une sanction pénale, ceux qui auront sciemment négocié: des actions nominatives qui ne sont pas demeurées sous la forme nominative jusqu'à leur entière libération ; des actions d'apport avant l'expiration du délai pendant lequel elles ne sont pas négociables; des actions de numéraire pour lesquelles le versement du quart du nominal n'a pas été effectué ». Mais la négociation d'action n'étant pas définie par le législateur, il incombe de recueillir la position de la doctrine. Selon l'auteur Michel Veron, la négociation fait appel à la transmission65(*). Le législateur se bornant juste à énumérer les catégories d'actes pouvant faire l'objet de négociations, il ne s'inscrit pas comme dans l'incrimination de l'émission d'actions66(*), dans une logique de sanction de l'inobservation de toutes les formalités de constitution. Il faut juste remarquer que la négociation irrégulière pouvant faire l'objet de transactions sur le marché financier est visée par cette incrimination. Dans une jurisprudence, la cour de cassation a décidé que la sanction frappe les auteurs de la négociation quels qu'ils soient, auxquels on ne saurait reprocher que l'inobservation des formalités qui leur sont imputables, visant les fondateurs et dirigeants sociaux, éventuels responsables des vices de la constitution des sociétés67(*). Cependant la lecture de l'article 888 al-1 renseigne beaucoup plus sur les irrégularités relatives à la forme des actions. Elle incrimine les négociations « des actions de numéraire qui ne sont demeurées nominatives jusqu'à leur entière libération ». De l'irrégularité formelle notée au porteur de tels titres donc, relève l'illicéité de la négociation. L'acte uniforme donne une idée donc sur la nature des irrégularités tendant à donner un caractère illicite. Il s'agit de façon générale de celles relatives à la forme des actions par rapport au défaut de libération, et celles relatives au délai de négociabilité. Par rapport aux irrégularités sur la forme, il faut ajouter que lorsqu'une régularisation postérieure intervient, elle effacerait le caractère délictueux de l'infraction. Cette pratique est à différencier de celle qui a lieu en France68(*) ou la règle de non négociabilité est une exception dans trois cas: la fusion ou apport par une société d'une partie de ses éléments d'actif à une autre société ; les actions remises par une société dont les actions sont admises à la cote officielle des bourses de valeurs ; l'apport de l'Etat ou d'un établissement public national à une société de biens faisant partie de son patrimoine. Concernant donc la forme, il s'agit principalement de cette violation en rapport avec la mise au porteur d'actions non encore libérées. Mais outre ces irrégularités relatives à la forme des actions il faut aussi envisager celles découlant du délai de négociabilité. * 63 Définition proposée par la doctrine même si la jurisprudence s'est successivement prononcée pour l'une et l'autre interprétation. Cf. THALLER, traité général théorique et pratique de droit commercial, 3e éd., n° 757; LYON-CEAN et RENAULT, traité de droit commercial, t. II, 5e éd. n° 800bis; ESCARRA et RENAULT, op.cit., n°941. * 64 Cela découle du caractère nominal de certaines sommes inscrites sur un effet de commerce, un titre, une monnaie, une créance. Cf. Dictionnaire de droit OHADA par HILARION Alain BITSAMANA. * 65VERON Michel qui définie la négociation comme toute transmission interdite par l'un des modes du droit commercial réalisé soit par le moyen d'un intermédiaire, soit de gré à gré. * 66 Cf. article 886 de l'AUSC précédemment cité dans les développements relatifs à l'émission d'action irrégulière. * 67 Cass. Crim., 15 février 1884, S., 1884, 1, p.199 * 68 En France est faite exception, la règle de non négociabilité dans les trois cas de fusion, d'actions remises et d'apport de l'Etat dans une société faisant partie de son patrimoine. |
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