1.2.3. Économie : Un pays sous
développé :
En 1999, l'agriculture rapportait au Laos (pour les
résidents de plus d'un an au Laos), la somme de 556.199.000.000 kips par
an (environ 55.620.000 dollars)31. Les produits de la forêt
rapportaient 52.582.000.000 kips, l'élevage rapportait 197.498.000.000
kips et les plantations de bois commerciaux 306.119.000.000 kips.
Les prix ont eu tendance à augmenter depuis 1995 mais
malgré tout, trop sensiblement.
En 1995, l'agriculture rapportait 453.684.000.000 kips, les
produits de la forêt 216.031.000.000 kips, l'élevage
178.961.000.000 kips et les plantations 216.031.000.000 kips.
En 1997, l'agriculture rapportait alors 498.683.000.000 kips, les
produits forestiers 56.939.000.000 kips, l'élevage 188.325.000.000 kips
et les plantations 253.419.000.000 kips.
En 1999, les ressources forestières représentent
34 % des recettes de l'Etat et atteignent 50 % certaines années.
Près de 80 % de laotiens utilisent quotidiennement des produits
forestiers pour leurs subsistances.
Les produits forestiers non-ligneux32 comme la
cardamome, le rotin, les résines, le miel, les champignons, pousses de
bambou, poissons, légumes, représentent quant à eux 55% du
revenu des villageois33.
31 1 dollar = 10.000 kips.
32 NTFP : Non Timber Forest Products.
33 UNDP, 2001 : 78.
Les paysans qui représentent 85 % de la population
rapportent plus de la moitié du PIB national.
Le PIB laotien serait en 2002 de 370 dollars par habitant avec
une croissance de 2,1 % par an34. Les prix
d'achats moyens nationaux en kips (monnaie laotienne) :
|
1996
|
1999
|
1 kg de riz collant
|
338
|
1.535
|
1 kg de riz normal
|
434
|
2.521
|
1 L d'essence
|
525
|
1.807
|
1 kg de tabac
|
2.052
|
10.275
|
1 kg de porc
|
2.152
|
13.699
|
1 poulet
|
1.938
|
12.857
|
Les investissements au Laos
Ils rapportèrent entre 1999 et 2000 1.463.000.000.000
kips.
Les investissements les plus importants furent dans les
domaines de la communication avec 948.000.000.000 kips, de la santé avec
109.000.000.000 kips et de l'agriculture avec 103.000.000.000 kips.
Le total des investissements pour l'année 1994-1995 furent
de 182.000.000..000 kips et de 590.000.000.000 kips pour l'année
1997-1998.
Les investissements étrangers entre 1994 et 1995
atteignirent 145.000.000.000 kips et 436.000.000 .000 kips entre 1997 et
1998.
Les investissements nationaux atteignirent 37.000.000.000 kips
entre 1994 et 1995 et 154.000.000.000 kips entre 1997 et 1998.
Les investissements étrangers se portèrent plus
volontiers dans les domaines de la communication durant les années
1994-1995, 1997-1998 et 1999-2000.
Les investissements locaux se reportèrent dans la
communication pour l'année 1994-1995, l'agriculture pour l'année
1997-1998 et de nouveau sur la communication entre 1999 et 2000.
L'industrie du bois a pratiquement cessé toutes ses
activités depuis 1999 et la chute des investissements accompagnés
de l'absence de projets dans ce domaine.
Le Laos est désigné comme un Etat éponge
sur lequel coule l'aide internationale à haut débit puisque plus
de 250 millions de dollars lui sont versés chaque année depuis
1990, ce qui représente 20 % du PIB et 50 dollars par habitant par an,
montant le plus élevé de l'Asie du Sud-Est35.
Le nombre de projet en faveur de l'agriculture et des
forêts passa du nombre de 3 en 1990 avec 435.000 dollars investis
à 10 en 1997 avec 4.333.000 dollars investis à 12 projets en 2000
avec 87.859.000 dollars investis.
34 Lao People D.R.Papper, ministère du transport laotien,
2002.
35 Banque Mondiale, Lao Logistics Development and Trade
Facilitations in Lao P.D.R., working paper, 2002.
Les ventes nationales en 1995 :
85,5 % pour les produits de l'agriculture et la pêche. 4 %
pour le tertiaire.
2,9 % pour les techniques et associations professionnelles. 2,6 %
pour l'artisanat.
Les productions laotiennes36:
Les récoltes culturales (milliers par ha) en 2000 :
|
|
Produits manufacturés (tabac, coton, café,
thé, canne à sucre...)
|
71.600
|
Riz
|
690.000
|
Riz pluvial
|
500.000
|
Riz en rizière irriguée
|
110.000
|
Riz de montagne
|
80.000
|
Maïs
|
10.000
|
Racines (pommes de terres...)
|
8.000
|
Légumes
|
40.000
|
Céréales
|
708.000
|
Les semences (milliers par ha) en 2000 :
|
|
Produits manufacturés
|
246,9
|
Riz
|
2.230
|
Riz pluvial
|
1635
|
Riz irrigué
|
465
|
Riz de montagne
|
130
|
Maïs
|
23,6
|
Racines (pommes de terres...)
|
51,9
|
Légumes
|
255,9
|
Céréales
|
2.305.500
|
Productions de la province de Phongsaly en 2000 :
|
Hectares
|
Tonnes
|
Moyenne de la province
|
moyenne du pays
|
Riz pluvial
|
7.000
|
22.500
|
|
|
Riz irrigué
|
200
|
500
|
|
|
Riz de montagne
|
9.000
|
14.400
|
|
|
Maïs
|
4.421
|
10.206
|
2.310 tonnes par ha
|
3.360 tonnes /ha
|
Racines
|
200
|
1.204
|
6.020 tonnes /ha
|
6.180 tonnes /ha
|
Légumes
|
350
|
1.106
|
3.160 tonnes / ha
|
5.750 tonnes /ha
|
Phongsaly est la 3e province la plus pauvre au Laos
en terme de production (hectares et tonnes)
36 MAF, 2000.
de riz pluvial.
Elle est la plus démunie du Laos en terme de production
(hectares et tonnes) de riz irrigué. L'importation de riz dans la
province de Phongsaly : 45.000 tonnes en 1976, 26.731 tonnes en 1996 et 4.707
tonnes en 1999.
Consommation des habitants de la province de Phongsaly en
1997-1998 :
Pour une valeur de 64.222 kips par an, voici les consommations
des produits originaires de leur province par les habitants de la province de
Phongsaly :
Riz
|
20.8 %
|
Sésame
|
0,1
|
%
|
Viande
|
2.9
|
%
|
Poisson
|
5.2
|
%
|
Fruits
|
0,2
|
%
|
Légumes
|
3.3
|
%
|
Total
|
32,5 % des consommations de la province proviennent de la
province.
|
Consommation de riz en gramme par jour selon l'âge pour
l'année 1997-1998 dans la province de Phongsaly :
De 0 à 4 ans
|
299 g
|
De 15 à 19 ans
|
597 g
|
Plus de 50 ans
|
634 g
|
Si les indices de l'économie semble se redresser depuis
quelques années et montrent un pays autosuffisant depuis 2000, il ne
faut tout de même pas négliger la 135e place mondiale
sur 175 en matière de développement humain37 et sa
catégorisation dans les Pays les moins avancés (PMA) du monde. Le
Laos a de nombreux symptômes du sous développement : Forte
croissance démographique, un niveau sanitaire médiocre, des
infrastructures économiques et sociales très réduites, un
secteur agricole38 vitale pour le pays.
De plus, les indicateurs statistiques produis par le
gouvernement laotien sont très peu fiables. La collecte statistique
laisse à désirer et elle ne prend pas en compte la
perméabilité des frontières, l'incidence de grands projets
hydroélectriques qui masquent les flux réels d'importations et
d'exportations, les quantités de bois illégalement
coupées. Il faut savoir manier les statistiques laotiennes avec
précaution39.
La comparaison économique et sociale est assez
éloquente entre les données nationales, provinciales et celles
du district de la zone d'étude qui suivent. Elles montrent toutes les
points forts agricoles et les points faibles industriels et tertiaires. Les
données illustrent aussi les
37 Le développement humain inclus : l'espérance de
vie à la naissance, le taux d'alphabétisation des plus de 15 ans
: 65 % en 2001 selon PNUD 2003, le taux brut de scolarisation combiné de
la primaire au supérieur et le PIB/ habitant. Source : Rapport mondial
sur le développement humain 2003, Economica.
38 Sylviculture, élevage, pêche, plantations,
pisciculture, cueillette, agricultures.
39 Pholsena et Banomyong, 2004.
importantes sommes d'argents qui transitent dans
l'économie nationale sans que la majorité des laotiens ne
puissent en profiter. Cette situation n'est pas sans rappeler la
majorité des pays du Sud qui manquent essentiellement de personnes
sachant manier des gestions équitables et une meilleure
répartition des richesses.
1.2.3.1. La situation économique du village40
:
Ce sous chapitre n'est pas le lieux d'exposition des raisons
de la situation économique de Bouamphanh mais uniquement un portrait
économique du village accompagné de critiques à
l'égard de la construction statistique.
Les chiffres ont été calculés sur les
bases d'un accès à la nourriture avec un minimum fixé a 16
kg de riz par mois par famille41 ; d'une possession de
vêtements non abîmés ou neufs ; d'une salubrité de
l'habitation ; d'un accès aux soins et d'un accès à
l'éducation pour les enfants. Si les familles manquent d'un de ces
éléments de référence, elles sont
désignées comme étant «pauvres ». C'est pourquoi
l'addition du nombre de familles manquant de riz, de vêtements,
d'habitations salubres, de soins et d'accès à l'éducation
aboutit à la somme des familles pauvres dans chaque village.
1.2.3.1.1. Les statistiques :
En 2001, les statistiques comptabilisaient 11 familles
possédant moins de 16 kilogrammes de riz par mois par famille, 2
familles manquant de vêtements,10 familles manquant d'habitations
salubres, 3 familles manquant de soins et 7 familles manquant d'accès
à l'éducation. 33 familles étaient donc
considérées par les autorités comme étant
pauvres.
Le village de Bouamphanh est à la septième place
des villages les plus pauvres du district avec 33 familles dites «pauvres
» car manquant soit de riz, de vêtement, d'une habitation salubre,
de soins ou d'accès à l'éducation.
Malgré ce rang, les 33 familles ne
représentaient que 13 % de la population du village en 2001, ce qui
laisse à penser que les conditions de vie au village de Bouamphanh sont
majoritairement au dessus des limites fixées pour considérer les
villageois en crise humanitaire.
Aujourd'hui, il semble que les conditions de vie ne se soient pas
améliorées, mais aucune statistiques prenant en compte le village
entier n'a pu être réalisé depuis 2001.
Selon les autorités, le village de Bouamphanh
comptabiliserait 74 porcs (0,8 porc par famille en moyenne42), 70
boeufs, 60 buffles, 161 volailles (1,75 poule par famille en
moyenne43) et 7 chèvres. Ces chiffres sont le reflet d'une
volonté politique de développer ce chef lieu du canton
numéro sept. Tous ces animaux ne sont pas l'héritage des
générations précédentes mais un don d'une ONG
américaine (Quaker) venue après demande du gouvernement laotien
pour rendre
40 Sources du bureau au plan et à l'investissement de
Phongsaly : Données sur la pauvreté dans le district de Khoua,
2001/2002.
41 Limite officielle pour être considéré en
déficit alimentaire.
42 74 porcs / 92 familles = 0,8 porcs par famille.
43 161 poules / 92 familles = 1,75 poule par famille.
attractif ce village de bord de piste. Malgré ces dons
les villageois ne possèdent pas autant d'animaux d'élevage que la
moyenne provinciale qui comptabiliserait 7 porcs et 9 poules par famille.
La situation économique de Bouamphanh reste donc
aléatoire, voire à la limite de la crise alimentaire. La
consommation moyenne villageoise de riz serait de 300 à 700 g par jour
et par personne. Elle reste au dessus des limites fixées pour être
considéré « pauvre »44 (bien que ces limites
soient très basses). Cependant elle ne dépassent pas la moyenne
de consommation de riz de la province45, ce qui peut expliquer le
septième rang du village dans l'échelle de pauvreté de
2001 et qui pourrait encore aujourd'hui laissé penser à une
situation très délicate pour les ressources alimentaires
villageoises.
1.2.3.1.2. La ville comme modèle ? Deux analyses
:
Malgré un effort du gouvernement pour cerner
statistiquement les problèmes économiques et sociaux de sa
population, nous pouvons nous demander si ces chiffres correspondent bien
à la situation locale comme il est courant de faire à chaque fois
que des statistiques sont publiées dans le monde.
Selon le tableau statistique, les villes de Khoua et de Natoun
n'auraient aucun habitant pauvre, aucun manque. Les 11 villes du district
auraient proportionnellement moins de familles pauvres que dans les villages.
Les villes seraient donc, selon les statistiques, moins pauvres que les
villages. Leurs habitants auraient plus d'accès aux
éléments de bases. Les villes seraient donc des exemples de
réussites alors que les villages seraient des illustrations d'une vie
faite de manques, une vie de pauvreté.
Après plusieurs entretiens dans le village de
Bouamphanh, une autre analyse s'était pourtant
révélée différente. Les paysans déclaraient
la vie des familles parentes et amies plus difficile en ville, à Muang
Khoua, que chez eux, par manque de rizières irriguées,
d'essarts accessibles et par trop de pression foncière.
Il semble d'ailleurs que la ville de Khoua se soit
désormais tournée vers le tourisme et non l'agriculture.
Malheureusement, les touristes affluent selon la saison entre octobre et mai,
après la saison des pluies. Contrairement aux statistiques, on retrouve
en ville beaucoup plus d'alcooliques, de drogués et de mendiants, de
violences que dans les villages. La dépendance avec l'extérieur
est beaucoup plus marquée. Est-ce un modèle de réussite
?
1.2.3.1.3. Des manques dans l'étude statistique
:
Il est intéressant de constater qu'aucun chiffre n'est
présenté pour désigner le revenu moyen par famille et par
mois, le revenu par personne et par mois et le nombre de famille qui ont un
revenu inférieur à 82.000 kips par mois, par personne. Ces
données relatives au revenu qui étaient a priori prévues
pour caractériser la pauvreté sont restées vierges.
Nous pouvons ainsi penser que les enquêteurs n'ont, soit
pas eu le temps et / ou les moyens de référencer ces trois
données, soit qu'ils ont présenté volontairement un
tableau statistique ne
44 16 kg de riz par mois et par famille, c'est à dire 89 g
de riz par jour et par personne (pour une famille de 6 membres).
45 600 g par personne par jour.
chiffrant pas les revenus familiaux pour ne pas les rendre
publiques et / ou pour ne pas rendre les analyses complexes et ambiguës en
comparant les chiffres des revenus et les données sur la nourriture, les
vêtements, la vétusté de l'habitation, l'accès aux
soins et à l'éducation.
Il est vraisemblable que des données statistiques en
milieu rural basées uniquement sur des revenus pour caractériser
la pauvreté ne seraient pas fiables. Il est probable qu'en milieu rural
la pauvreté se manifeste autrement que par les revenus du fait d'un
accès plus facile à la collecte, à la pêche,
à la chasse et à l'entraide. Un tableau présentant des
données sur l'accès à 16 kg de riz par mois, à des
vêtements, à une habitation convenable, à l'accès
aux soins et à l'éducation paraît plus juste.
Nous ne connaissons rien des critères statistiques pour
décider qu'une habitation est vétuste et à partir de quoi
les enquêteurs ont pu décider que les villageois manquaient de
vêtements ou que les vêtements n'étaient pas <<
propres >>.
L'analyse officielle qui veut que les villes soient moins
sujets à la pauvreté par rapport aux village ne nous dit pas non
plus qui ont été les personnes enregistrées officiellement
comme habitants des villes du district puis sujets des enquêtes. Les plus
pauvres des habitants de ces villes ne sont peut être pas pris en compte
comme << habitants >> et donc non enregistrés par les
statistiques.
Les manques statistiques et la fiabilité réduite
des études sont des problèmes trop importants pour analyser la
pauvreté dans le district de Khoua. Nous ne pouvons qu'être
très relatifs dans l'utilisation de ces données pour nos
conclusions.
1.2.3.1.4. Illustrations de situations économiques
familiales : Trois familles. 1.2.3.1.4.1. Première famille :
L'interviewé est un jeune marié de 22 ans,
père de famille de deux enfants âgés de moins d'un an. Il
vit avec sa femme, ses enfants, son frère et ses deux parents, soit un
nombre de sept membres dans le foyer familial.
Lors de son mariage, quelques semaines plus tôt.
Il est installé dans la maison de ses parents depuis huit
ans, depuis 1998, date à laquelle ils ont emménagé dans le
village. Ils sont originaires de la ville de Khoua.
Leur chef de village actuel leur aurait demandé de
s'installer au village de Bouamphanh pour le développer.
Son expérience de jeune agriculteur récemment
installé dans un village recomposé est caractéristique
d'un nombre important de jeunes couples khamou venus avec les parents du
marié pour « développer Bouamphanh ». Très peu
d'entre eux connaissent les langues des autres groupes ethniques habitant leur
village. L'interrogé ne peut parler seulement que deux langues, sa
langue vernaculaire, le khamou, et la langue nationale, le lao.
A la différence des anciens ils ne côtoient pas
beaucoup les Akha ou les Pala. Ils restent entre jeunes khamou et
n'hésitent pas à critiquer les pratiques fantaisistes des groupes
montagnards.
N'étant pas originaire du village, il n'a pas pu
hériter d'une rizière irriguée et a donc
dül'acheter 500.000 kips par hectare pour finalement
posséder 1,5 ha.
Ils n'ont pas pu non plus acheter de parcelles lors de
l'allocation foncière. Aussi chaque année ils ont un droit
d'usure sur 0,8 ha d'essart-jardin de maïs et 0,7 ha d'essart pluvial,
tous situés à 50 minutes du foyer à l'intérieur du
finage de Bouamphanh. Chaque année ils exploitent donc environ 3 ha de
rizière irriguée, essart de riz pluvial et essart-jardin de
maïs.
Ils doivent attendre à chaque fin de saison des pluies,
les décisions du conseil des anciens distribuant les parcelles à
chaque famille. Depuis leur installation, ils ont toujours utilisé une
seule fois la plupart de leurs parcelles de riz pluvial car elles sont en
rotation sur 6 années et ils ont emménagé à
Bouamphanh il y a 8 ans. Les parcelles de maïs qu'il exploite sont en
rotation sur 4 années. Ils possèdent en complément un
animal de trait, un buffle46, 8 poules et des poussins.
Le terrain de sa maison (15m x 40m environ) leur a
coûté 50.000 kips et il doit s'acquitter des impôts à
hauteur de 15.000 kips par an.
Ils ne commercent pas d'herbes à teinture que les
Chinois pourraient pourtant leur acheter. Ces herbes poussent sur les bas
côtés des routes et des pistes désherbées. Ils ne
désherbent pas souvent les bas côtés de la piste ce qui ne
leur permet pas de commercialiser ces herbes.
Ses enfants n'étant pas encore en age d'être
scolarisés, il n'a pas de frais scolaire.
Selon l'interrogé, personne n'aide sa famille pour les
travaux des champs et ils ne peuvent avoir de salariés n'ayant pas
suffisamment de revenu pour payer des salaires.
Il avoue que les femmes travaillent plus que les hommes, que
se soit aux champs ou au foyer. Il considère qu'elles font des travaux
de résistances, de longue haleine, comme le désherbage ou le
débardage alors que les hommes s'occupent des travaux dangereux,
techniques et de force, abattant les arbres, s'occupant des grands
brûlis, débardant de lourds volumes de bois, construisant les
cabanes et barrières des champs.
Ils n'ont pas «besoin » d'engrais ou de
désherbants pour leurs cultures car ils
préfèrent travailler leurs cultures par eux-mêmes. Selon
eux, respecter les dates traditionnelles du
46 to couai en langue lao.
calendrier agraire, participer aux cérémonies
animistes avec le chamane, attendre qu'il plante le premier pour planter
ensuite, être respectueux des esprits du village et des défunts,
<<sont les meilleurs engrais ».
Il faut ajouter qu'ils n'ont pas accès à des
fertilisants et désherbants peu chers et proches. Il faut aller les
acheter au Viêt-nam et les utiliser sans connaissances. De plus des
histoires circulent sur les voisins akha qui en auraient utilisé et en
seraient décédés.
Ils ne plantent rien en saison sèche et ont donc des
difficultés alimentaires en période de soudure.
Ils doivent acheter du riz de mai à septembre car ils n'en
produisent pas suffisamment pour sept personnes et n'ont pas de stock
alimentaire.
Les sept membres de la famille consomment plus de trois
kilogrammes de riz glutineux chaque jour ce qui revient à plus de 428 g
de riz glutineux consommé par jour et par personne, juste au dessous de
la moyenne provinciale47 car les deux enfants en bas âge ne
mangent pas autant que leurs aînés.
Dans leur ancien essart de la ville de Khoua ils
réutilisaient le paddy non consommé pour le replanté
l'année d'après. A Bouamphanh, ils n'arrivent pas encore à
être autosuffisants et ne peuvent donc pas replanter le paddy de
l'année précédente. Ils espèrent bien arriver
à être autosuffisants dans les prochaines années et
replanter chaque année le surplus de paddy stocké qui est
considéré traditionnellement comme une richesse familiale dont un
jeune marié peut avoir besoin pour épouser une femme et vivre
avec elle.
Le riz glutineux est selon lui relativement plus cher mais de
manières coutumières et gustatives, ils ne peuvent pas manger du
riz normal.
Au village, un kilogramme de riz glutineux serait vendu d'environ
2700 kips à 3000 kips et le riz normal serait vendu d'environ 2500 kips
à 2700 kips.
Les prix varient selon les vendeurs, selon la qualité du
riz vendu, selon l'origine intra ou extravillageoise.
Le riz normal est ainsi plus cher que le riz gluant en ville
alors qu'il est moins cher que le riz gluant au village.
1.2.3.1.4.2. Seconde famille :
Monsieur Paeng, 39 ans, habite Bouamphanh avec sa famille depuis
2001.
Il a quitté le village de Salongxay, dans le district de
Khoua.
Il était alors gradé dans la police et a
abandonné cette profession pour devenir agriculteur comme ses
parents.
Il ne connaît parfaitement aucune langue
étrangère au lao hormis le khamou, sa langue natale et quelques
mots de vietnamien.
Sa femme, lui même et ses 4 enfants disaient être
athées même si ses parents pensaient que des âmes habitaient
les animaux, les objets naturels et les phénomènes.
Leurs dépenses annuelles comprennent majoritairement les
frais de scolarité et l'achat de nourriture pour une valeur
approximative de 3.500.000 kips.
47 Environ 600 g par jour et par personne. Voir le chapitre
<< Economie un pays sous-développé ».
Ils consomment généralement 3 repas par jour
dont 3,6 kg de riz48, 300g de poissons et des légumes de son
essart et de la collecte (pousses de bambou et légumes-feuilles au
quotidien) ce qui les placent bien au dessus des consommations moyennes
provinciales en riz.
Ils consomment moins de viande49 que de poisson
n'allant pas chasser, se réservant ses animaux domestiques (poules et
cochons) pour certaines occasions et n'ayant pas beaucoup d'offres de viande au
village.
Il doit acheter toute l'année du riz au marché
du village ou chez les voisins, parents et amis. Parfois il achète aussi
du poisson en conserve ou pêché par les autres lorsqu'ils n'ont
pas pu en pêcher eux-mêmes, ainsi que la viande de la chasse si les
voisins, parents et amis ne leur offrent pas.
Il doit aussi acheter des légumes s'il y a des
invités en nombres importants à nourrir. Ces moments là
(généralement les jours où des personnes viennent l'aider
aux champs et lorsque des officiers du gouvernement viennent loger au
village...) ne sont pas des jours de fête et ils ne consomment pas
forcément de viande, mais uniquement du riz et des légumes
(très fréquemment des pousses de bambous) qui sont les bases de
leur alimentation.
Durant l'année, il achète des légumes au
village pendant deux mois.
Il doit payer entre 15.000 kips par jour pour la consommation
alimentaire et 25.000 kips par jour si l'on prend en compte les frais
alimentaires et extra-alimentaires (payes des salariés, la valeur des
investissements que sont par exemple les transports commerciaux de ses semences
et récoltes, les outils agricoles et du foyer, les frais de
scolarité, les frais médicaux...). Cette année il du par
exemple payer une forte somme d'argent pour aider son frère à se
faire hospitaliser et opérer.
Il est le seul de la famille à travailler
quotidiennement dans ses champs. Sa femme, ses enfants et quelques villageois
lui portent assistance quelques jours dans l'année et il salarie chaque
année 250 villageois, payés chacun 10.000 kips par jour, pour
certains travaux.
Il travail en moyenne une demi-journée par jour.
Afin de pouvoir acheter du riz toute l'année, Monsieur
Paeng cultive et commercialise essentiellement du maïs, à hauteur
de 800 kg qui lui reviennent à 150.000 kips. Il achète les
semences de maïs au Viêt-nam qu'il revend à de nombreuses
familles appartenant à 5 villages voisins dont Bouamphanh.
Différents types de semences lui ont été proposé
lors de l'achat des semences à Dien Bien Phu. Il à
préféré choisir les semences à prix moyens (17 500
kips / 5 kg) qui permettent d'avoir deux grands épis au lieu d'un seul
ou de deux petits pour des prix légèrement plus bas. Il ne
pouvait acheter les semences plus cher qu'il ne l'a fait car les villageois
n'auraient pas eu l'argent pour les lui racheter.
Les villageois cultivent le maïs vietnamien puis Monsieur
Paeng leur rachète les récoltes qu'il revend en Chine et à
un laotien. Depuis trois années, il est le premier villageois de la
localité à avoir commencer un commerce important de maïs
entre le Viêt-nam, le Laos et la Chine. Selon des responsables
agroforestiers, ce commerce de maïs du Viêt-Nam à la Chine en
passant par la
48 600 g par jour et par personne.
49 Plus fréquemment leurs poules et leurs oeufs, du cochon
domestique pour les événements familiaux et villageois, du boeuf
et du buffle lorsqu'ils ne sont plus utiles aux travaux, des écureuils,
des oiseaux, des cervidés et des cochons de la forêt.
province, est de plus en plus pratiqué. Il semble que
Monsieur Paeng soit l'un des premiers de la région à avoir eu
cette idée.
Il vend aussi du bois aux chinois selon les besoins du
marché. Il va jusqu'à la province de Sayaburi pour couper des
espèces recherchées. Lors de son dernier voyage, il avait couper
274 arbres50 de 50 à 200 cm de diamètre allant de 15
à 40 m de hauteur. Dans la région, il n'y aurait plus d'anciens
arbres rentables et les autorités ne seraient pas conciliantes avec les
arrangements.
Il vend parfois un peu de légumes, parfois du poisson, des
pousses de bambous, les quelques poules et les deux ou trois cochons qu'il
élève.
Les voisins doivent le payer 10.000 kips par an pour son
travail de responsable de l'adduction de l'eau au village. Cependant ils
préfèrent souvent convertir ces 10.000 kips en une journée
d'aide au champ.
Le repas du midi durant la journée de travail
collectif.
Son commerce de rente de maïs est selon lui plus lucratif et
plus sécurisant que de s'auto alimenter en riz comme le font
traditionnellement bons nombres de familles au village.
Monsieur Paeng possède en 2006 deux essart-jardins d'un
hectare chacun et une rizières irriguée de 0,9 hectare qui lui
permettent d'avoir une surface totale d'exploitation de 2,9 hectares. Il
cultive sa rizière plane en saison sèche pour le maïs et en
saison des pluies pour le riz. Une partie de son champ est pour la
première fois occupée par deux bassins de pisciculture qui
contiennent des poissons entre le mois de juillet et le mois de novembre. Ses
essart-jardins sont exploités en saison des pluies uniquement
principalement pour le maïs.
Il possède aussi un emplacement pour une plantation de
mai sak (Teck) de 0,6 ha qu'il exploite pour une parente de sa famille
habitant dans un autre village. Il doit attendre 15 ans après avoir
planter le teck, pour pouvoir le vendre car les troncs doivent être de 30
cm de diamètre maximum. Ils sont vendus 13.000 bath le mètre
cube.
Le soucis de sa plantation est qu'elle se trouve sur le trajet
des villageois qui se rendent dans
50 Uniquement les espèces maï doù et
maï kràa (en langue lao) recherchées pour la
construction de maisons.
leurs champs. En passant, les adultes comme les enfants testent
les lames de leurs machettes sur les troncs et abîment ainsi beaucoup
d'arbres de la plantation.
Monsieur Paeng à rationaliser ses productions. Son
système de production agraire s'est développé, mais son
inexpérience lui fait défaut.
Les deux premières années d'installation à
Bouamphanh, il n'avait rien semé.
La troisième, quatrième et cinquième
année, il planta uniquement du maïs et des légumes.
Il sema 11 kg de maïs sur 0.6 ha en rizière
sèche en vallon la troisième année pour récolter
3,3 tonnes. Il sema 18 kg de maïs sur 1 ha d'essart-jardin la
quatrième année pour récolter 5,4 tonnes et 55 kg de
maïs sur 2.5 ha d'essart-jardin la cinquième année pour
récolter 16,5 tonnes. La sixième année il sema du
maïs, des légumes, du riz glutineux et planta des arbres pour le
commerce du bois. Il sema 50 kg de maïs sur 2.2 ha d'essart-jardin pour
récolter environ 15 tonnes. Il sema aussi 30 kg de riz irrigué
sur 0.75 ha.
La valeur des quantités de légumes ne lui
était pas connue.
Manquant de terre à cultiver, c'est dans ce dernier
0.75 ha de rizière irriguée qu'il avait préalablement
déterré de la forêt-cimetière, les corps de deux
enfants décédés. Les parents encore habitants de
Bouamphanh ne firent aucun commentaire...
L'évolution de ses semences sur six années
montre bien que Monsieur Paeng cherche la rentabilité. Il a fait
diminuer ses surfaces et ses quantités de semences de maïs pour
pouvoir augmenter celles vouées au riz et aux légumes. Ses
productions se sont donc complexifiées et diversifiées. Il a
désormais plus de chance de vendre ses produits différents et de
diversifier son régime alimentaire. Après ses deux
premières années infructueuses, il pense maintenant aux
débouchés qu'il voudrait nombreux pour pouvoir exploiter plus
intensivement ses terres «sous exploitées » selon lui. Il
voudrait bien vendre des surplus de légume et beaucoup plus de maïs
qu'à l'heure actuelle. Selon lui, il faudrait pour cela, plus
d'accessibilité aux marchés importants.
Cette augmentation de la production s'explique aussi par le
changement d'essart-jardin entre la cinquième et la sixième
année. Il pu ainsi acquérir en prime une rizière
irriguée au pied du nouvel essart-jardin, tout proche de la
rivière. Les premières années de culture, son champ
était limitrophe d'un champ de riz colonisateur réduisant ses
cultures de maïs.
1.2.3.1.4.3. Troisième famille :
Monsieur Thon à 28 ans. Il est célibataire et
habite toujours chez ses parents qui sont voisins de monsieur Leng et de
Monsieur Paeng.
Sa famille tire ses revenus de l'exploitation agricole et de
la collecte mais aussi de la préparation des outils villageois. Il
semble qu'ils ne soient pas les forgerons attitrés du village mais ils
retravaillent souvent les outils des voisins.
Ils possèdent 1 ha d'essart-jardin et d'assrt pluvial
ainsi qu'une petite plantation de Teck (moins de un hectare).
Ils ne plantent pas de maïs et ne possèdent pas de
rizière de vallon.
1.2.3.1.4.4. Conclusion :
A Bouamphanh, 10 familles au village vivent correctement
grâce à leur rizières irriguées et
leurs essarts. Toutes les autres familles (environ 82), comme
celles de Monsieur thon et du jeune marié, n'auraient pas toutes un
hectare de rizière irriguée en vallons et cultiveraient un
hectare en abatiis-brûlis pour cultiver du riz ou du maïs sans
qu'elles puissent vivre correctement de leur exploitation. Elles doivent
acheter du riz de deux à plusieurs mois dans l'année.
Le finage de Bouamphanh disposerait de 5 hectares par
habitant51 (comprennent les surfaces habitées, de collectes
et cultivées) et sa population permettrait de comptabiliser 1,54
habitant par hectare cultivé52 ce qui laisserait penser que
les habitants ont un potentiel de ressources forestières et agricoles
tout juste suffisant.
En revanche, la pression démographique de 19 habitants
par km2 et la quantité de travail par actif de 0,9 ha
cultivés par an et par actif53 semblent avoir atteins les
limites du raisonnable puisqu'ils ne devraient
théoriquement54 pas dépasser 0,9 ha par actif et 20
habitant par km255. Cette quantité importante de travail
à fournir associée à l'assolement dispersé et
à la réduction de l'entraide villageoise56 au profit
du développement d'un salariat intra-villageois57 ne
permettent pas aux exploitant de se sortir aisément de leurs obligations
agricoles.
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