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Savoirs et savoir- faire locaux face aux politiques agraires: diagnostic d'un système agraire dans un village Khamou ou du Nord Laos

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par Pierre- Yves Heurtier
Université Aix-Marseille 1 - Master 2 anthropologie sociale et culturelle 2006
  

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2.4.2.2. Les taxes :

Impôt foncier sur les rizières irriguées : 33.000 kips par an par personne de plus de 15 ans. Impôt sur la collecte de bois : 20.000 kips par an par famille.

Impôt sur le revenu (même si il n'y a pas de revenu) : 30.000 kips par an, non proportionnels aux salaires.

Impôt animalier : 6000 kips par an

Impôt foncier de la maison : 15.000 kips par an.

2.4.2.3. Un personnage charismatique :

Malgré les bons rapports avec ses voisins Monsieur Paeng agit de manière marginale. Son expérience d'agriculteur et sa connaissance des terres de Bouamphanh restent limitées. Contrairement à son voisin, le chef du village, il persiste à semer du maïs en saison sèche qui ne servira qu'à nourrir ses cochons pour deux semaines. De plus, il a déjà perdu par le passé une récolte de maïs et deux récoltes de riz irrigué. Enfin, cette saison il fut à la limite de pouvoir semer. Il attendit trop longtemps pour brûler son essart-jardin et dû attendre encore que l'essart sèche à nouveau après les premières pluies. Il sarcla deux fois son essart-jardin alors que normalement un sarclage des adventices suffisait. Ce sarclage de trop lui coûta cher en payes des salariés, énergie et temps. Il tente pourtant de relativiser, ne reconnaissant pas être différents de ses voisins. Il dit <<travailler en fonction des habitudes de leurs ancêtres et des habitudes prises à Bouamphanh». Cependant il fut l'un des derniers à brûler, à sarcler, deux fois, et à semer.

Une autre preuve de son inexpérience est la prévision de bons rendements au début de la coupe. Il disait avoir trouvé une bonne parcelle contenant une végétation riche pour la fertilité de son sol qui l'était déjà par sa couleur rouge et sa dureté bénéfiques à la culture du maïs. Il regrettait même à l'avance de ne pas avoir assez de débouchés commerciaux pour pouvoir vendre toutes ses productions. A l'arrivée, le bilan est beaucoup moins glorieux et la << bonne terre » avec assez d'arbres dessus est devenue une << mauvaise terre » avec insuffisamment d'arbres.

Les raisons de ces erreurs ne sont pas uniquement dues à sa relative inexpérience de ses terres. Il travaille souvent seul dans ses champs. Ses enfants vont souvent pêcher, ne loupent aucun cours car leur mère institutrice veille au grain. Comme ses enfants, elle n'aide pas beaucoup son mari faute de douleurs au ventre. Alors qu'au moment de la coupe, il disait n'avoir besoin d'aucune aide, il se retrouve obligé d'accepter pour le second sarclage de trop, les aides de la jeune infirmière et d'un jeune étranger français qui ne travaillent jamais aux champs d'ordinaire. Ceci marque une situation critique des travaux agricoles de la famille.

Ancien gradé dans la police, marié à une des institutrices de l'école, homme d'affaires locales dans les marchés du maïs et du bois, il se comporte différemment des autres villageois. Il pu déterrer deux enfants d'une forêt-cimetière et défricher pour créer un champ. Il ironisait souvent par rapport aux croyances animistes des voisins et par rapport au chamane. Sans suivre la tradition, il réussit à devenir un homme important à Bouamphanh. Son succès social est aussi du à son investissement auprès des villageois. Il a pris la responsabilité de l'adduction de l'eau après avoir été formé par l'O.N.G. «Quaker». Les voisins doivent le payer 10.000 kips par an pour ce travail mais ils préfèrent souvent l'aider une journée de travail dans son champ.

Il a intégré les raisonnements des responsables lao qui demandent de faire cesser les sacrifices animistes, les rituels médicinaux, la perception d'une vie meilleure avec des essarts et promulguent la hiérarchie ethnique avec à sa tête les groupes ethniques Lao et Khamou, reléguant les autres groupes ethniques à des rangs inférieurs. Monsieur Paeng n'hésite cependant pas à inviter chez lui les voisins de toutes ethnies confondues. Avec son ancien statut de gradé dans la police, il garde des liens étroits avec les autorités et se permet donc d'être le chef officieux du village, critique en vers ses voisins. Il ne veut toutefois pas être candidat aux élections du village. Ses informations m'ont été d'un grand intérêt pour pouvoir percevoir quels étaient les perceptions des autorités dont il se faisait souvent le porte parole (vis à vis de la religion animiste, des productions paysannes peu intensives et productives...) et quel était sa différence d'approche par rapport aux autres villageois. Il rationalise beaucoup plus que ces voisins toutes ses méthodes de travail et son mode de vie (il souhaite avoir plus de potentiels de vente pour épuiser ses productions de légume ; il est devenu l'intermédiaire locale pour la commercialisation des productions de maïs ; il se rend à Sayaburi pour défricher « en fonction des besoins en bois du marché chinois » ; il serait d'accord pour abandonner sa pratique agricole d'abattis-brûlis si il pouvait être formé à une autre activité ; il n'a soit disant pas peur des esprits en forêt, étant officiellement athée et ce malgré ses origines locales) comme le voudrait un « laotien moderne ».

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard