II. L'INTRODUCTION DE L'ELEMENT PERTURBATEUR : LE
MARAÎCHAGE
Dans la région des Niayes, la végétation
subguinéenne qui est l'élément le plus atypique est
isolée du fait de l'évolution climatique. La flore qu'elle
comprend est caractéristique, comme nous venons de le voir, d'un domaine
forestier dense (sec ou humide) auquel la majorité du pays n'appartient
pas. Elle constitue par conséquent un stock riche et varié mais
instable et fugace. Du fait de son caractère résiduel, elle a
survécu grâce à des conditions bioclimatiques
particulières que nous avons déjà évoquées
plus haut. L'homme par son action a clairement accentué la
fragilité de cette végétation relictuelle et fait pencher
la balance en faveur des essences sahéliennes et soudaniennes
très peu denses.
2.1 Le contexte d'apparition du maraîchage
48 -Etude d'impact projet Zircon de la Grande
Côte
49 -Cité par Raynal -1962
50 -La terminologie « niayes« a subi une
évolution sémantique qui a conduit à son utilisation pour
designer toute la région du Cap-Vert. Alors qu'elle était
primitivement associée aux palmiers à huile en wolof, son
acception s'est largement étendue aux boisements où cette
espèce domine. Mais à partir d'Adam l'expression s'est
généralisée à toutes les dépressions humides
douces ou salées de la zone. Aujourd'hui elle est ramenée
pratiquement à l'unité morphologique que constitue la cuvette,
qu'elle soit du reste humide ou pas. On peut dire à l'instar de Raynal
que « la niayes est suffisamment original au point de vue physionomique,
floristique et écologique pour qu'on conserve un substantif
spécial pour le désigner » et que la polysémie dont
elle fait l'objet actuellement ne peut que contribuer à répandre
la confusion.
51-d'où la place exceptionnelle que nous lui
accordons dans cette étude
En l'absence de toute intervention humaine, le fonctionnement
de l'écosystème52 reste relativement complexe mais
néanmoins autorégulé. L'intervention de l'homme contribue
à la simplification et la fragilisation du système naturel en
réduisant l'importance démographique de certaines populations
végétales (mais aussi animales) qui jouent un rôle
clé. Cette action anthropique se résume à la recherche
d'une meilleure productivité sans tenir compte des risques qu'elle
apporte. Une essence comme Acacia raddiana (tortilis) que nous avions
croisée en 2006 mais qui cette fois-ci s'est faite plus rare fait
l'objet (avec d'autres essences bien sûr) d'un défrichement
systématique de ses individus sur les versants mis en culture. Or on
sait de cette espèce qu'elle a d'extraordinaires capacités de
remontée de l'eau située à des profondeurs de 20 voire 30m
de fond pour la distribuer sous la surface53. Porter atteinte
à une telle espèce dans un environnement comme celui des niayes
c'est compromettre dangereusement la survie des autres.
A cet effet la majorité des essences observées
par Trochain sont aujourd'hui introuvables et de la forêt sèche de
Raynal seules trois espèces caractéristiques émergent
encore (Parinarimacrophylla, Aphania senegalensis et
Detarium senegalensis) et se rencontrent uniquement à l'état
d'individus isolés.
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