II. LE CIRCUIT DE COMMERCIALISATION
Dans la majeure partie de la zone d'étude,
l'agriculture se réduit au maraîchage qui constitue la source
principale de revenu des terroirs. La commercialisation des produits issus de
cette activité se fait selon différentes modalités.
Figure13 : Filière de commercialisation des
produits maraîchers dans la zone de Diogo et Mboro Source
: S. NDJEKOUNEYOM -2007
On a d'abord la vente sous contrainte qui est le fait de paysans
qui dépendent des bana bana
fournisseurs d'intrants à crédit et
auprès desquels ils se voient dans l'obligation de passer pour
écouler leur récolte. Ensuite nous avons la vente libre qui est
le fait de producteurs bana bana qui assurent eux mêmes
l'écoulement de la production. Nous notons aussi dans cette même
catégorie les producteurs qui sont devenus assez puissants pour ne pas
dépendre des bana banas et qui peuvent donc traiter
efficacement avec ces derniers. La figure 13 nous permet d'apprécier les
interrelations qui existent entre les acteurs dans cette filière.
L'organisation de l'écoulement de la production par
camion est assurée par des coxeurs qui ont pour rôle de
collecter les marchandises en fonction de leur destination et les
répartir dans les camions disponibles.
La filière crée ainsi un environnement favorable
à l'émergence d'activités informelles
oüdifférents acteurs interviennent de manière
indépendante mais cohérente depuis la production
jusqu'à la commercialisation et la distribution.
L'étude de cette filière implique l'analyse d'un circuit
économique complexe qui part du producteur aux bana banas en
passant par les coxeurs pour arriver aux semi-grossistes et enfin aux
petits revendeurs.
III. LES CONTRAINTES DE L'ACTIVITE MARAICHERE
De nombreuses contraintes pèsent sur l'activité
maraichère, l'une des plus importantes est celle qui est liée au
caractère périssable de la production. En dehors des oignons et
des pommes de terre qui autorisent un temps de conservation plus important, les
autres spéculations courent toutes le risque de se
détériorer.
Cette situation rend extrêmement vulnérables les
paysans qui sont soumis ainsi à la loi des marchands et revendeurs. Dans
la crainte d'une perte des récoltes, les exploitants sont contraints le
plus souvent de brader la production à des prix dérisoires pour
le plus grand bonheur des bana banas ou grossistes. C'est ce qui
explique les énormes fluctuations sur le prix des produits qui peuvent
aller du simple au triple ou au quintuple.
Comme autre source de difficultés nous pouvons
mentionner le manque d'écoute du marché par les producteurs. Les
principaux centres concernés à savoir Touba, Dakar, Tivaouane,
Nouakchott, Louga, Mboro, Kaolack ne sont pas consultés avant la
production ou la récolte, ce qui se solde souvent par une surproduction
et par conséquent une chute du prix des produits en
excédentaires. De plus les producteurs ne coordonnent absolument pas
leurs actions. Chacun est laissé à sa seule appréciation
et produit à sa guise ce qu'il estime profitable pour lui. A cela il
faut ajouter la saisonnalité de la production (malgré l'existence
de semences adaptées) et l'aversion au risque de diversification.
Tableau 9: Les contraintes de l'activité
maraîchère
Protection des plantes inadéquate
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Irrigation difficile
|
Qualité des intrants et dégradation
des sols
|
Commercialisation en Conséquence sur
la
produits maraîchers santé
difficile
|
-Disponibilité des produits
phytosanitaires inadéquate
-Suivi phytosanitaire inadéquat -Formation en
protection des plantes insuffisante
|
-Puits mal construits
-Ressource en eau insuffisante
pour l'irrigation
-Recharge de la nappe
insuffisante
-Salinisation croissante des eaux
-Nappe d'eau surexploitée -Moyens d'exhaure
inadéquate -Nombre de puits insuffisant pour utiliser d'autres
terres
|
- Qualité des fumiers insuffisante
- Qualité des engrains insuffisants
- Système de contrôle des engrains
déficient
-Disponibilité des intrants aux près des
commerçants irrégulier (Fumier engrain)
-Fertilisation du sol en diminution -Qualité du
fumier utilisé insuffisant
-Utilisation de la jachère
insuffisante
-Salinisation croissante des sols -Salinisation croissante
des eaux -Ensablement de cuvette maraîchère
|
-Information sur la filière -Non utilisation
des
maraichère déficiente équipements de
protection
-Information sur les prix -Formation en
méthode
d'application insuffisante
indisponible
-Utilisation fréquente de
-Calendrier de culture
produits dangereux
uniforme
-Prix de vente trop bas
- Importation autorisée
-Absence de règlementation des prix
-Arrivée massive des produits locaux
-Système de rémunération des sourga
contraignant
-Moyen de conservation
inexistant
-Route de Mboro Diogo peu praticable
|
Source : Enquête (S. NDJEKOUNEYOM
2007)
Le manque d'entente et de concertation entre les agriculteurs
est l'une des principales causes de la mauvaise rentabilité du
maraîchage à l'heure actuelle. A Diogo, les seuls groupements qui
sont signalés dans ce cadre sont des coopératives villageoises ou
des sections villageoises auxquelles d'ailleurs la plupart des cultivateurs du
terroir n'adhèrent pas. Par ailleurs si à Diogo les terres
dominantes sont convexes, à Mboro la situation est inverse. Dans l'un
comme dans l'autre des cas les sols ne sont pas appropriés pour le
maraîchage qui préfère, nous l'avons vu, les sols ni trop
sableux ni trop argileux des bas-versants ou khours. D'autres
contraintes comme l'érosion des sols, l'enclavement de certains
villages, l'insuffisance des revenus ou encore le niveau d'instruction faible
sont résumées dans le tableau ci-dessus.
Cette étude nous permet une double observation. D'abord
on constate d'une part que le système défini fonctionne, d'un
point de vue spatial, largement au dessus de ses potentialités avec un
dopage des cultures mais d'autre part, d'un point de vue cette fois ci
organisationnel, il y a des failles évidentes qui empêchent la
valorisation et l'optimisation de la production.
Le circuit de commercialisation est inutilement alourdi par le
nombre d'intervenants et d'acteurs au statut d'ailleurs très
inégal. Dans ce système le principal concerné, à
savoir le producteur, a les mains liées40 et ce sont les
bana banas et les coxeurs, acteurs pourtant
improvisés, qui finissent par avoir la maîtrise de
l'écoulement de la production.
Le maraîchage dans le cadre de ce chapitre a
été étudié en faisant abstraction, autant que
possible, des impacts des cultures maraîchères sur la
végétation ligneuse afin de resituer cette activité dans
son contexte spécifique. Les chapitres suivants se chargeront
d'établir les relations existantes entre ces deux composantes du
milieu.
40 -Même si celui-ci constitue le
première maillon de la chaine, force est de constater qu'il n'est pas
indépendant financièrement.
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