V. LE CADRE SOCIO-ECONOMIQUE
En 1878, l'annuaire du Sénégal décrit
les Niayes comme une région où se rencontrent une
végétation forte, des lacs, des mares et des fontaines. Mais les
années passant, les ressources végétales ont fortement
régressé à mesure que s'affirmait l'emprise humaine sur le
milieu15. Cette situation suscite pour nous des interrogations de
fond. En effet comment légitimer une réflexion qui s'exerce sur
une population à majorité rurale dont la principale
activité agricole commence à poser des questions de plus en plus
poignantes pour le devenir de l'écosystème naturel ?
Il semble de bon sens que nous commencions par comprendre la
dynamique, la structure et l'organisation de cette population. Nous nous
permettons de restreindre les considérations démographiques et
socioéconomiques à la communauté rurale de Darou Khoudoss
dans laquelle est entièrement logée notre zone d'étude et
dans une moindre mesure à la commune de Mboro.
5.1 L'hiérarchisation sociale
Les sociétés de la Grande Côte ont
hérité de leur tradition des modes d'organisation sociale qu'ils
adaptent plus moins aux contraintes et réalités actuelles. Ces
sociétés pour la plupart rurales sont structurées autour
de codes hiérarchiques qui les consolident. Le pouvoir est détenu
par un notable (par délégation), l'aîné de la
famille issue de la génération la plus ancienne. Il appartient
à ce chef d'exercer certaines prérogatives dont notamment
l'organisation sociale de la vie, la gestion du patrimoine foncier de la
communauté, la résolution de problèmes internes, la
représentation du village devant les autorités administratives
etc. D'autres personnes, Marabout, imam, notables ont un rôle
d'assistants et de conseillers et peuvent dans certains domaines intervenir
dans la gestion du village.
L'organisation des sociétés wolofs se fait selon
une hiérarchisation en castes. On a donc la caste des «
geer » autrement dit la caste supérieure constituée
d'agriculteurs de pêcheurs et
15 -Rappelons tout de même que la
sécheresse et le déficit pluviométrique y sont pour
beaucoup
d'éleveurs. Ensuite on a la caste des «
neeon » qui est celles des artisans spécialisés. Chez
les peuls le principe est sensiblement le même. Ainsi on a les hommes
libres non « castés » qui dominent les groupes subalternes
(pêcheur, artisans).
5.2 Le peuplement et l'occupation du sol
Actuellement très attractive la Grande Côte
sénégalaise n'a pas toujours drainés les populations
surtout dans les zones rurales. C'est au 13eme siècle que les
premiers occupants, que certains disent originaires du Mandingue et d'autres du
Niger, sont signalés. Vers 1680 des peul profitent de l'humidité
estivale de cette zone pour transhumer avec leurs bétails et repartent
durant la saison des pluies. Au 18eme siècle, les
instabilités dans le Djolof conjuguées aux razzias des
esclavagistes conduisent les wolof à se fixer sur la Grande Côte.
Ensuite la période coloniale avec le passage du courrier de Dakar
à Saint Louis par la Grande Côte est à l'origine de la
naissance de la piste des Niayes.
Les postes fortifiés à Mboro, Lompoul, Pout et
Mbidje attiraient de plus en plus la population. Des minorités
s'ajoutent à ces ethnies pour constituer la population de la
région des Niayes. Notons que la grande mobilité qui
caractérisait les populations de la région qui se
déplaçaient d'une zone écologique à une autre dans
le but de tirer partie des ressources variées est aujourd'hui
considérablement réduite par les contraintes foncières et
l'appauvrissement de la zone en ressources.
Le peuplement humain d'une manière
générale est plus important au Sud (vers le siège de CR et
vers Mboro) qu'au Nord (avec des terroirs isolés comme Lompoul ou
Mbétèt I) et à l'Est (à cause de la
régionale70) qu'à l'Ouest (où il ya surtout des hameaux).
Par ailleurs, le type d'habitat diffère que l'on soit à
l'intérieur ou sur la côte. « La distribution des habitats
dans la zone des Niayes reste fortement corrélée aux
systèmes dunaires et aux conditions écologiques.» (J.M
Chastel. 1982)16. Sur les dunes blanches, s'égrainent les
hameaux peuls comme keur Samba Radié, Lite ou encore Keur Alle Mar dont
la forme rappelle leur tradition nomade. Les hameaux sont marqués par
une très forte dispersion et leur position sur les dunes littorales
s'explique par le souci d'échapper aux moustiques. Plus à l'Est,
on assiste à une densification de l'occupation par rapport aux dunes
blanches. Les populations à majorité wolofs occupent alors les
bords des niayes les plus fertiles, perchés au sommet des dunes.
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