Paragraphe 2 : Contexte expérimentale
L'expérience allemande du crédit populaire
: Raiffaisen
L'expérience allemande des coopératives
financières Raiffaisen marque le renouveau du crédit populaire.
La réussite de ce modèle coopératif repose sur plusieurs
principes fondamentaux (Hollis et Sweetman, 1998).
Les associés ont une responsabilité
illimitée partagée. Ils sont collectivement responsables des
dépôts, ce qui permet de lever des fonds à un coût
raisonnable du fait des garanties importantes apportées. Ce principe
tend à homogénéiser le statut social et la richesse des
associés appartenant à une même coopérative dans la
mesure où ce sont les membres les plus riches qui supportent
effectivement le risque.
La présence de multiples coopératives de petite
taille conduit à la formation de banques centrales
fédératives qui sont habilitées à recevoir des
prêts subventionnés de l'Etat et qui apportent du capital pour
aider à la création de nouvelles coopératives. De plus, du
fait de la présence d'une banque fédérative capable de
débloquer des prêts d'urgence aux « agences », les
coopératives possèdent des fonds propres limités - 4,5% en
moyenne (Wolff, 1910 in Hollis and Sweetman, 1998).
Les banques Raiffaisen sont également
caractérisées par leur capacité à être
viables du fait de forts taux de remboursement. Ce phénomène est
expliqué par le fait que les membres se connaissent ; les prêteurs
savent donc qui emprunte et dans quel but. Les mécanismes incitatifs de
remboursement sont également plus faciles à mettre en place car
la proximité géographique - liée à la taille
limitée de la zone d'opération de la coopérative -
réduit l'asymétrie d'information.
Enfin, les statuts des coopératives prévoient que
le profit - produit net bancaire - doit être réinjecté dans
les fonds propres. Si tel n'est pas le cas, dans un investissement
d'utilité sociale.
Les coopératives Raiffaisen ont inspiré de
nombreux intermédiaires financiers en Europe et au Etats-Unis. En
France, la Banque Populaire, le Crédit Agricole et le Crédit
Mutuel constituent des réplications du modèle Raiffaisen. Le
passé composite du crédit populaire a abouti à la richesse
actuelle du secteur mutualiste et coopératif. Une des
spécificités du crédit populaire en France est la forte
implication de l'Etat dans son développement. Ainsi les banques
populaires alors qu'elles stagnent auparavant connaissent un fort
développement quand l'Etat les utilise comme relais des prêts aux
artisans et commerçants pour la reconstruction en 1919 (Vallat,
1999).
Le Crédit Mutuel et le Crédit Agricole sont
issus des multiples crédits agricoles. Le Crédit Agricole n'est
pas basé sur une solidarité religieuse comme le Crédit
Mutuel mais sur une solidarité syndicale. Il semble important de noter
qu'après 1871, le crédit populaire a perdu de sa substance au
sens où les ouvriers n'en sont plus les principaux
bénéficiaires (Vallat, 1999). Cette tendance se confirme et prend
de l'ampleur au 20ième siècle. Ce retour dans le passé
montre que ces banques coopératives ou mutualistes sont comparables aux
expériences de microfinance développées aujourd'hui dans
les pays du Sud et de plus en plus dans les pays du Nord. Ainsi, il peut
être pertinent d'identifier les facteurs de succès des initiatives
lancées durant le 19ième.
Au préalable, il est nécessaire de rappeler que
les leçons héritées du passé ne peuvent être
appliquées en l'état sans la prise en compte de l'environnement
culturel. Pour illustration, des systèmes de microcrédit du type
Raiffaisen ont échoué en Irlande alors qu'ils ont connu le
succès en Italie. La conclusion la plus frappante émergeant de
l'étude de Hollis et Sweetman(1998) est que les systèmes de
microcrédit basés sur des mécanismes d'incitation à
l'épargne tendent à être plus pérennes. En effet,
ils alignent les intérêts des différentes
parties-prenantes(Stakeholders) dans la mesure où les emprunteurs
peuvent à terme être prêteurs et vice-versa.
Aussi, la clé de la réussite réside
davantage dans la qualité de la structure organisationnelle que dans le
montant de capital dédié au projet. L'intervention
étatique peut être salutaire dans le lancement de
l'activité dans les zones où aucun riche épargnant ne veut
déposer son argent dans une telle institution. Par contre, l'attribution
de subventions publiques non justifiées peut nuire à la
viabilité financière du programme en étouffant les
mécanismes d'incitation à l'épargne
|