7-1.2. COMPORTEMENT DE LA VEGETATION
L'incendie agit sur le dynamisme végétal, c'est
un facteur important de perturbation des formations végétales
dans la région méditerranéenne. TRABUT, 1970).
KUHNHOLTZ-LORDAT (1938-1952-1958) décrit les différents stades
des successions régressives ou progressives et avance approximativement
le temps qu'il faut pour qu'un taillis de Quercus ilex
se reconstitue. Il cite les espèces les plus courantes
(Quercus, Arbutus, Cistus, Pinus) reconnues comme
pyrophytes et indique les caractéristiques végétatives qui
leur permettent de survivre et de coloniser les espaces incendiés. Pour
une pinède dont la composition floristique regroupe 50 espèces
dont 33 sont vivaces (66%), 9 vivaces à semences (18%), 8 annuelles
(16%). Sur les 30 espèces de la garrigue à chêne
kermès avec 26 vivaces (86,6%) ,2 à semences (6,7), 2 annuelles
(6,7). Dans cette
73
« Aspects physionomico- structuraux de la
végétation forestière ligneuse face à la pression
anthropozoogène dans les
monts de Tlemcen et les monts de Dhaya (Algérie
occidentale)
gamme 66% d'espèces peuvent donner des rejets dans la
pinède et 86% dans la garrigue à chêne kermès.
TRABUT (1970) note:" Le cas de la garrigue à
chêne kermès est typique: 86% des espèces recensées
peuvent se régénérer immédiatement per rejets de
souche; la garrigue se reconstitue donc elle-même, telle qu'elle
préexistait, avant le passage du feu".
Les dommages causés par les incendies sur toute
formation végétale sont importants,
hétérogènes et se manifestent différemment selon le
type de végétation où la structure et la composition et le
degré de dégradation jouent un rôle déterminant. Les
incendies de forêt représentent une des perturbations majeures
auxquels sont soumis les écosystèmes
méditerranéens. Leur évolution dans le temps a
été étudiée par AMOURIC (1985) qui a montré
que la modification des usages des écosystèmes ou leurs
non-usages a été à l'origine de variations dans les types
de formations végétales soumises au feu.
" La connaissance de la structure de la
végétation et donc de la densité des différentes
espèces dans les formations végétales est capitale pour
apprécier les risques d'inflammabilité. Plus l'architecture du
tapis végétal et sa stratification est complexe et plus les
risques de montée en puissance des feux sont aggravés " conclu
BARBERO (1988). Il existe une liaison directe entre l'intensité du feu
et les structures et architectures de la végétation, cette
liaison est d'autant plus marquée qu'il s'agit
d'écosystèmes préforestiers à sclérophylles
comme les pinèdes de pin d'Alep. Le même auteur ajoute: " Dans ces
forêts appartenant au modèle expansionniste dominent souvent des
espèces à stratégie `R' adaptées par
sélection géographique et écologiques. Il s'agit de
plantes aromatiques colonisant les sous-bois (genévriers,
labiées, cistacées) dont les gommes, les résines du tronc,
les hydrocarbures s'enflamment successivement et contribuent à
l'embrasement général ".
7-1.2.1. Groupement du pin d'Alep dans le
semi-aride
Les zones incendiées présentent
généralement un état de dégradation avancé
où les espèces feuillues ne sont r représentées que
faiblement dans les strates sous-arbustive et buissonnante. Les espèces
résineuses dominent la composition notamment au niveau de la strate
arborescente et arbustive avec un pourcentage relativement élevé
dans les autres strates. C'est des formations ouvertes ne présentant
aucune faculté naturelle de résister aux incendies. La futaie
n'occupe qu'un faible pourcentage, moins de 30% de la surface tandis que les
espèces des trois autres strates dominent avec 45% en moyenne.
Après incendie toute la végétation est
détruite et ce n'est qu'à la deuxième année que la
strate buissonnante commence à se développer avec un taux de
recouvrement avoisinant les 20% où dominent les cistes suivis du
romarin, de la globulaire et des hélianthèmes. Leur
précocité dans l'occupation de l'espace se justifie par le
pouvoir de régénération par semis dont elles sont
dotées et favorisées par les conditions écologiques
parés incendie (lumière, cendre, absence de concurrence,
dissémination des graines, recouvrement de semences). Les genêts
occupent les vides et les clairières; l'alfa, grâce à sa
faculté de rejeter de souche s'impose également sous forme de
petites touffes dispersées. L'incendie favorise toutes les
espèces feuillues rejetant de souche telle que le chêne
kermès, le lentisque, la filaire en plus des espèces se
multipliant rapidement par semis après le passage du feu comme le
romarin, la globulaire, le genêt, le calycotome et les cistes. Les
observations faites confirment que les espèces de la strate buissonnante
occupent dés la deuxième année le même coefficient
d'abondance-dominance que dans les forêts adultes de
référence.
Un aspect important sur lequel une multitude de travaux ont
été faits semble de nos jours encore peu maîtrisé:
la régénération naturelle. Dans différentes
conditions de localisation topographique, climatique, bioclimatique,
édaphique et floristique, la régénération naturelle
du pin d'Alep à l'année 4 après incendie varie de 1.1
à 4.3 soit une densité moyenne de 20 à 400 par 100
mètres carrés avec une hauteur oscillante entre 15 et 70 cm.
La régénération naturelle se
caractérise par une lenteur de croissance, une
hétérogénéité dans sa présence et sa
densité ainsi que par une fragilité élevée.
L'origine de ces causes se retrouve
« Aspects physionomico- structuraux de la
végétation forestière ligneuse face à la pression
anthropozoogène dans les
monts de Tlemcen et les monts de Dhaya (Algérie
occidentale)
dans la densité des espèces colonisant en
premier l'espace, la qualité du lit de semence, la nature du sol et son
taux de recouvrement par les débris organiques brûlés, les
possibilités d'enfouissement naturel des graines et la
disponibilité de semences fertiles. A l'inverse les espèces de la
strate buissonnante et arbustive, les semis de pin d'Alep n'atteignent leur
maximum de densité et d'accroissement qu'à partir de la
5ème année après incendie; une fois les autres strates
stabilisées après avoir rejeté et coloniser le terrain.
Cette dynamique est dépendante de plusieurs facteurs le
plus souvent non maîtrisables par l'homme, notamment les facteurs
climatiques et édaphiques et d'autres anthropiques tel que les travaux
forestiers (sylviculture) et le parcours. Dans tous les cas la
résistance des espèces aux diverses mutilations est
déterminante pour la recolonisation de l'espace et le
développement de formations végétales
forestières.
Le feu ne modifie pas de façon notable la composition
floristique lorsqu'il ne se répète pas au même endroit
plusieurs fois de suite, très peu d'espèces sont
étrangères au cortège floristique habituel de
l'association. Cependant il agit directement sur le coefficient
d'abondance-dominance par le biais d'une activation des rejets de souche et de
l'accélération du processus de germination des semences de
quelques espèces.
Les espèces dont le nombre augmente après le
passage du feu dans des temps de 2, 7 et 10 ans sont (Tableau annexe
n°53):
Tableau 14 : Comportement de quelques espèces face au
feu.
AGE
|
2 ans
|
7 ans
|
10 ans
|
|
A
|
B
|
A
|
B
|
A
|
B
|
Rosmarinus
|
21
|
26
|
21
|
27
|
19
|
18
|
Pistacia
|
13
|
23
|
4
|
8
|
6
|
11
|
Globularia
|
4
|
22
|
15
|
13
|
17
|
15
|
Cistus
|
3
|
19
|
9
|
6
|
15
|
13
|
Stipa
|
3
|
17
|
15
|
24
|
6
|
11
|
Quercus
|
2
|
8
|
10
|
21
|
14
|
22
|
Ampelodesma
|
-
|
-
|
8
|
11
|
11
|
14
|
Phillyrea
|
-
|
-
|
7
|
12
|
9
|
16
|
Tétraclinis
|
-
|
-
|
3
|
11
|
6
|
15
|
Génista
|
-
|
-
|
7
|
9
|
11
|
12
|
Chamaerops
|
-
|
-
|
6
|
11
|
10
|
14
|
A: Végétation non brûlée B:
Végétation brûlée
Tous ces éléments permettent une recolonisation
rapide de l'espace dés la deuxième année. Les
espèces composant le groupement du pin d'Alep dans le semi-aride
survivent et un fort pourcentage marque une présence accentuée
après le passage du feu. L'effet de l'incendie peut être
comparé à une coupe rase qui oblige la végétation
à s'adapter à des perturbations temporaires. Les espèces
caractérisées par une faculté de rejeter de souche, celles
dont quelques semenciers ont été épargnés par le
feu envahissent en premier l'espace détruit et transforment la formation
végétale en agissant négativement sur la
régénération naturelle des espèces principales et
secondaires formant l'ossature du groupement végétal initial
(Tableau N° 55). Ainsi le feu perturbe essentiellement la structure et la
pérennité de la formation.
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