III-2- PRESENTATION DE L'HABITAT DES
BAKOLA/BAGYELLI
III- 2-1-Habitat traditionnel
L'habitat permanent se caractérise par sa forme
quadrangulaire, héritée du modèle de construction bantoue.
La superficie de l'habitat varie de 6m2 à 20m2.
Par le passé, l'habitat traditionnel (mbasa)
qu'on rencontrait habituellement dans les campements de forêt
était fait à base de larges feuilles de maranthacées ou
d'Anthocleista, qui étaient fixées à l'ossature
végétale de l'habitat : une encoche était faite sur la
nervure, près du pétiole, et les feuilles étaient
crochetées en rang. Cette disposition conférait à
l'ensemble un aspect en « écailles de pangolin ». Mais de nos
jours, les feuilles de maranthacées ou d'Anthocleista ont
cédé la place aux panneaux de raphia ou aux rameaux de palmier.
L'emploi de panneaux de raphia ou de rameaux de palmier constitue un bon
compromis : moins éphémères que la simple feuille de
maranthacées ou d'Anthocleista, ils restent d'une grande
disponibilité. Les panneaux de raphia sont d'un usage polyvalent et
demandent peu de temps de travail. Les Bakola/Bagyelli au contact avec les
Bantou ont maîtrisé la technologie du tissage des panneaux de
raphia. Il n'existe pas de hameaux où on ne retrouve un Pygmée
qui ne sache pas tisser les panneaux de raphia. La maîtrise de cette
technique constitue de nos jours une source de revenus non négligeable
pour ces derniers. Ils confectionnent des panneaux de raphia qu'ils vendent aux
Bantou qui n'ont pas les moyens financiers pour pouvoir se construire une
maison avec une toiture en tôles d'aluminium. Le terre-plein autour de la
case est gratté de sorte à surélever la construction et la
ménager ainsi des eaux de ruissellement dues aux violents orages
tropicaux.
Photo 10 : Hutte traditionnelle bakola Source :
Aristide Bitouga (Matsindi 2009)
Bien que faites pour durer, ces huttes n'ont pas la
longévité des maisons des Bantou. La structure totalement
végétale leur confère une certaine fragilité ; en
l'absence de clous, l'ossature de l'ensemble est maintenue par des ligatures de
liane qui, à moyen terme, ne peuvent s'opposer à l'affaissement
de la case. La mise en chantier de la case de remplacement avant l'abandon
définitif de la demeure croulante explique la mouvance relative de
l'habitat Bagyelli au sein du village.
III- 2-2- Habitat moderne (ndabo)
L'habitat moderne Bakola/Bagyelli repose en majeure partie sur
le modèle de construction bantoue, l'utilisation de glaise (mur en
poto-poto ou mortier indigène) est présente dans l'ensemble des
campements pygmées que nous avons eu à visiter. Un hameau est
constitué de plusieurs modèles d'habitations. On peut observer
des cases qui sont à la fois un mélange de traditionnel et de
moderne. A l'observation, c'est le cas d'une bonne frange de maisons
appartenant aux Bakola des hameaux de Ngoyang dont les murs sont faits à
base de glaise et la toiture en panneaux de raphia (ndula
mbasa).
C'est le modèle le plus présent dans les
campements visités à Ngoyang et à Bidjouka grâce
à son coût relativement très faible et la
disponibilité des matériaux qui entrent en jeu dans la
construction de ce type d'habitat. Toutefois, il faut souligner ici le fait que
ce type de construction n'est pas propre aux seuls Bakola. Les Bantou peu
nantis se construisent ce même modèle à la seule
différence que les leurs sont un peu plus hautes et plus spacieuses que
celles des pygmées. A côté de ces cases
semi-traditionnelles, on note une amélioration de l'architecture des
cases ou des maisons appartenant à des Pygmées sur le terrain.
L'accès à l'habitat moderne fait partie aujourd'hui des signes de
distinction et de richesse chez les
Bakola/Bagyelli des localités de Bipindi et de Lolodorf.
La possession d'une maison aux normes modernes donne droit à son
détenteur beaucoup d'estime de la part de ses pairs.
Grâce à leurs moyens propres, certains
Bakola/Bagyelli ont réussi à bâtir des maisons modernes
avec des tôles en aluminium (ndula bikwembe).
Ceux des Bakola qui ont pu se construire ce type d'habitat sont devenus des
cultivateurs et qui, par la suite, sont devenus des vendeurs de cacao. C'est le
cas de certains Bakola/Bagyelli que nous avons identifiés à
Matsindi et Nkouonguio à Ngoyang et Maschouer-Maschouer et Binzambo
à Bidjouka.
Photo 11: Maison moderne bakola appartenant à Bang
Bang Roger, cacaoculteur Source : Aristide Bitouga (Matsindi 2009)
Un autre groupe de Bakola qui ont « ouvert les yeux
» grâce à leur niveau de scolarisation, se sont lancés
dans l'exploitation forestière et ont engrangé des
bénéfices qui leur ont permis de se construire des maisons
modernes. C'est le cas de NGALLY Sadrack, qui est exploitant forestier dans le
village de Ngoyang et dont l'activité a permis qu'il puisse se
construire une maison qui fait la fierté du hameau de Nkouonguio. A
côté de ces pygmées qui sont devenus de grands agriculteurs
et de ceux qui s'exercent dans l'exploitation forestière, il y a une
infime frange d'entre eux qui ont pu se construire une maison grace à
leur réputation de tradipraticiens « très puissants
».C'est le cas du chef NKORO de Nkouonguio qui a
bénéficié des largesses d'un patient qui a
matérialisé sa reconnaissance par la construction d'une
bâtisse qui figure parmi les plus respectables du village Ngoyang.
Le dernier groupe de Bakola/Bagyelli qui sont
propriétaires d'habitations modernes le sont devenus grâce aux
actions sociales et philanthropiques de certaines ONG qui portent un
intérêt particulier sur les questions liées à
l'habitat des Pygmées. Parmi ces Organisations Non Gouvernementales qui
oeuvrent dans le secteur de l'habitat des Bakola/Bagyelli nous pouvons citer :
RAPID, CBCS, FEDEC, SAILD, GRSP. Ces actions ont contribué à
améliorer les
conditions de logements de quelques uns des Bakola qui ont
été éligibles à ces différents projets de
construction de maisons d'habitation. La photographie ci-dessous montre une de
ces nombreuses cases qui ont été construites aux Bakola de
Ngoyang.
Photo 12: Maison crépie appartenant à NZIE
Simon construite par la CBCS Source: Aristide Bitouga (Mimbiti I,
2009)
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