La protection des enfants contre les violences physiques émanant de leurs parents( Télécharger le fichier original )par Didier KOYA MATENDO Université libre des pays des grands lacs - Graduat en droit privé et judiciaire 2010 |
SIGLES ET ABREVIATIONSArt : Article Al : Alinéa CPP : Code de Procédure Pénale CP : Code Pénal COCJ : Code d'Organisation et Compétence Judiciaire CCCLI : Code Civil Congolais Livre I MP : Ministère Publique Me : Maitre ONU : Organisation de Nations Unies O-L : Ordonnance-Loi OMP : Officier du Ministère Publique OPJ : Officier de Police Judiciaire PNC : Police Nationale Congolaise RDC : République Démocratique du Congo TGI : Tribunal de Grande Instance Tripaix : Tribunal de Paix INTRODUCTION1. PROBLEMATIQUE. Pendant des siècles, l'enfant n'était pas considéré comme une personne à part entière, ses droits étaient quasi-inexistants. Chez les romains par exemple, le père avait le droit de la vie et de mort sur ses enfants. Cette tendance se traduisait par des concepts comme « puissance paternelle » à lieu et place de « l'autorité parentale » utilisée actuellement. D'ailleurs le concept enfant, de par son origine reflète cette conception romaine, car il vient du concept latin « infans » qui signifie celui qui ne parle pas. C'est avec le temps que les droits attachés à la personne de l'enfant seront pris en considérations. 1(*) Cette évolution s'inscrit dans le cadre de la Révolution et de la reconnaissance des droits de l'homme en général. Au XIXe siècle, avec l'avènement de la révolution industrielle, de nombreux enfants commencent à travailler dans les usines. Les gouvernements des pays concernés commencent aussi à faire des lois pour protéger l'enfant contre les conditions de travail difficiles et les mauvais traitements. C'est également à cette époque que la scolarité obligatoire est introduite dans les pays industrialisés. Toutefois, il faudra attendre le XXe siècle pour que l'enfant soit considéré comme une personne à part entière, avec des droits spécifiques. Cette reconnaissance s'opère sur le plan international. C'est en 1924, qu'un texte international définit pour la première fois les droits spécifiques des enfants : c'est la Déclaration de Genève. Cette déclaration précise notamment que « l'enfant qui a faim doit être nourri » et qu'il « doit être protégé contre toute exploitation »2(*). Mais la portée de ce texte très court n'est pas considérable, puisque les États ne sont pas obligés de le respecter. Ce n'est qu'après la fin de la Seconde Guerre mondiale que la question des droits de l'enfant devient une préoccupation majeure. En 1946, l'ONU crée alors une agence spéciale pour l'enfance, l'Unicef, chargée d'améliorer les conditions de vie des enfants. Dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948, puis dans la Déclaration des droits de l'enfant de 1959, l'ONU précise que l'enfant a droit à « une aide et une assistance spéciales » en raison de son « manque de maturité physique et intellectuelle »3(*). On commence alors à se référer à la convention internationale des droits de l'enfant, adoptée trente ans plus tard, en 1989. Car, elle était élaborée en tenant compte des différents systèmes juridiques et traditions culturelles. Bien plus qu'une simple déclaration, cette convention est ratifiée par la quasi-totalité des pays membres de l'ONU, ce qui signifie que ces États s'engagent à l'appliquer4(*) . Ainsi un comité des droits de l'enfant est créé pour veiller à l'application de la Convention. Pour la première fois, des droits civils, économiques, politiques, sociaux et culturels sont reconnus à l'enfant. L'enfant n'est plus seulement considéré comme un être à protéger, il est aussi, comme les adultes, acteur de sa vie. Ses parents et l'État doivent lui permettre de se développer physiquement, mentalement et socialement pour qu'il puisse lui-même exercer ses droits. Et la plupart des États du monde se sont engagés à faire respecter la Convention5(*) . Cependant, il est très difficile pour l'ONU de les contraindre à l'appliquer et, malgré certains progrès, la condition des enfants reste difficile dans la plus part des pays signataires de ladite convention Avant même l'adoption de la Convention, les pays industrialisés avaient, pour la plupart, déjà légiféré sur le travail des enfants, l'âge de scolarisation ou la protection des mineurs. « Les pays les moins avancés, trouvent beaucoup plus de difficultés à garantir les droits de l'enfant. Chaque année, près de 11 millions d'enfants meurent dans le monde de causes que l'on aurait pu éviter (malnutrition, maladies du type rougeole, diarrhée, vagabondage, bandes criminelle, pauvreté, guerre, etc.) ; le continent africain est particulièrement touché par la maladie et la famine. Plus de 500 millions d'enfants vivent avec moins d'un euro par jour. Environ 100 millions d'enfants vivent dans la rue, surtout en Amérique du Sud et en Asie ; au Brésil, des milliers d'enfants des rues sont assassinés chaque année. Près de 300 000 enfants participent encore à des conflits armés. 121 millions d'enfants dans le monde ne vont pas à l'école. Mais les pays en voie de développement ne sont pas les seuls concernés par les violations des droits de l'enfant. En France, par exemple, la maltraitance est un fléau persistant ».6(*) Cas extrême, les États-Unis ont signé cette Convention, mais ne l'ont pas ratifiée car certains États refusent d'abolir la peine de mort pour les mineurs. De nombreuses causes peuvent expliquer la situation actuelle des enfants dans le monde. La République Démocratique du Congo, par l'Ordonnance - Loi n° 90-048 du 21 aout 1990 portant autorisation de la ratification de la convention relative aux droits de l'enfant est partie à la convention relative aux droits des enfants. Ladite Ordonnance reconnait que la meilleure protection de l'enfant c'est au sein de la famille. Car, il est stipulé que, considère que, conformément aux principes proclamés dans les chartes des Nations Unies, la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine ainsi que légalité et le caractère inaliénable de leurs droits dont le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde.7(*) C'est donc la famille, unité fondamentale de la société et milieu naturel des enfants, que l' enfant doit recevoir la protection et l' assistance dont elle a besoin pour pouvoir jouer pleinement son rôle dans la communauté, car l' enfant, pour l' épanouissement harmonieux de sa personnalité, doit grandir dans le milieu familial, dans un climat de bonheur, d'amour et de compréhension. Il importe de préparer pleinement à avoir une vie individuelle dans la société, et d'élever dans l'esprit des idéaux proclamés dans la Charte des Nations Unies, et en particulier dans un esprit de paix, de dignité, de tolérance, de liberté, d'égalité et de solidarité. La nécessité d'accorder une protection spéciale à l'enfant a été énoncé dans la Déclaration de Genève de 1924 sur les droits des enfants et dans la Déclaration des droits de l'enfant adoptée par les Nations Unies en 1959, et qu'elle a été reconnue dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, dans le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques(en particulier les articles 23 et 24) dans le Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels(en particulier à l'article 10) et dans les statuts et instruments permanents des institutions spécialisées et des organisations internationales , entre autre ; Save the Children ; War Child ; Unicef ; qui se préoccupent du bien être de l'enfant. Comme indiquée dans la Déclaration des droits de l'enfant, adoptée le 20 novembre 1959 par l'Assemblée Générale des Nations Unies «l'enfant en raison de son manque de maturité physique et intellectuelle a besoin d'une protection spéciale et des soins ns spéciaux, notamment d'une protection juridique appropriée, avant, comme après la naissance »8(*) Les dispositions de la Déclaration sur les principes spéciaux et juridiques applicables à la protection et au bien être des enfants, envisagées surtout sous l'angle des pratiques en matière d'adoption et de placement familial sur les plans national et international(résolution 41l85 de l'Assemblée Générale, en date du 03 décembre 1986, de l'ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l'Assemblée Générale, en date du 29 novembre 1985) et de la déclaration sur la protection des femmes et des enfants en période d'urgence et de conflits armés9(*) (résolution 3318(XXIX)de l'Assemblée Générale en date du 14 décembre 1974), reconnaissant qu'il y a dans tous les pays du monde les enfants qui vivent dans des conditions particulièrement difficiles, et qu'il est nécessaire d'accorder à ces enfants une attention particulière, compte tenu de l'importance des traditions et valeurs culturelles de chaque peuple dans la protection et le développement harmonieux de l'enfant, l'importance de la coopération internationale pour l'amélioration des conditions de vie des enfants dans tous les pays et en particulier dans les pays en développement : « La condition de l'enfant dans le monde en raison de sa vulnérabilité, de sa dépendance par rapport au milieu, de son manque de maturité physique, intellectuelle et émotionnelle, nécessitant des soins spéciaux et une protection particulière n'a cessé d'interpeler depuis un certain temps la communauté internationale et nationale »10(*). La situation de l'enfant en République Démocratique du Congo suscite autant d'appréhension que d'inquiétude quant à sa protection juridique et judiciaire lorsque sa personne est menacée par ceux là qui sont naturellement censés le protéger. En effet, il est certes vrai que la naissance d'un enfant au sein d'une famille ne puisse être qu'un événement heureux sans même que la loi l'exige, il incombe aux parents de celui-ci de l'entourer affection, protection et éducation. Puisque le mariage est aussi une institution dont l'existence transcende la volonté individuelle de ceux qui la composent, le législateur protège l'enfant contre toutes formes de violences d'où quelles proviennent. C'est du moins ce qu'on retient de l'article 57 initio de la loi de 2009 sur la protection de l'enfant évoquée précédemment qui dispose que « l'enfant a droit à la protection contre toute forme d'exploitation et de violences ». Et l'alinéa 2 du même article rajoute que ; les parents ont le devoir de veiller à ce que la discipline familiale soit administrée de telle sorte que l'enfant soit traite avec humanité mais aussi avec dignité. Par ailleurs, les parents en tant que premiers responsables légaux et légitimes de l'enfant, exercent entre autre l'autorité parentale qui se résume notamment en administration des biens de l'enfant et à veiller à la protection de sa personne, à son éducation et mieux à sa discipline. Néanmoins, il arrive que l'enfant soit l'objet de maltraitance ou de violences physiques dirigées contre lui par ses propres parents. Or cette violence est précisément un acte incriminé par la loi pénale réprimant les atteintes contre l'intégrité physique. Les controverses s'invitent au débat quant à savoir apprécier la légitimité et mieux la légalité des corrections et réprimandes exercées sur et contre l'enfant par ses propres parents. Aussi, l'alinéa 4 de l'article 326 du code de la famille autorise aux parents d'infliger des corrections à leurs enfants dans le cadre éducationnel. La préoccupation est de savoir, quand est ce que les corrections et réprimandes sur l'enfant par ses parents, peuvent elles être incriminées ? Quelles sont les moyens juridiques, mis à la disposition de l'enfant pour intenter une action fondée sur les violences physiques exercées par ses parents ? C'est aux questions soulevées ci- dessus que nous allons répondre tout au long de notre travail. * 1 Global Witness, la situation des droits de l'enfant en Afrique.org. Consulté ce mercredi 02 février à 11 heures 40' * 2 www.hrw.org, bilan de l'ONU en matière de la promotion des Droits Humains. Consulté ce mercredi 02 février à 11 heures 55' * 3 www.hrw.org, Déclaration des Droits des Enfants de 1959 consulté ce jeudi 03 février 2011 à 15 heures 35' * 4 Global Witness, Déclaration de Genève de 1924 sur la protection de l'enfant, op. cit. Consulté ce mercredi, 6 avril 2011 à 12h 15min. * 5 http://wikipedia/wiki/ Conventions relatives aux Droits de l'Enfant de 1989, consulté ce lundi, 9 avril 2011 à 16h 17min. * 6 Idem * 7 L'ordonnance - loi n° 90-048 du 21 aout 1990 portant autorisation de la ratification de la Convention relative aux droits de l'enfant in Journal Officiel. de la RDC, 2009 * 8 «La déclaration des droits de l'enfant du 20 novembre 1959, Assemblée Générale des Nations-Unies», recueils des textes sur les droits de l'enfant in Journal Officiel ., de la RDC, 2009 * 9 www.hrw.org; Résolution 41185 de l'Assemblée Générale des Nations Unies du 03decembre 1986 consulté ce jeudi 03 février 2011 à 15 heures 35' * 10 Exposé des motifs de la loi n° 09/001 du 10 Janvier 2009 portant protection de l'enfant, in Journal Officiel de la RDC N° Spécial 25 Mai 2009, P.5 |
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