2- Manifestation de la contrebande au plan local (cas
pratique du distriFt d'Abidjan)
Aux entrées routières du territoire douanier du
district d`Abidjan, la majeure partie des populations interrogées
donnait des réponses qui ne répondaient pas à nos
préoccupations et aspirations. En grande majorité la gente
féminine se cachait derrière la loi du silence. On ressentait
fortement de la résistance de leur part, un manque de confiance et de la
peur. Il se peut qu`elles voient en nous une menace pour la bonne marche de
leur activité. Il a fallu les rassurer et les mettre en confiance. Et
pour cette raison, nous leur avons exposé le but de la recherche et les
finalités qu`elle poursuit. On leur a promis et assuré de les
garder dans l`anonymat.
Les guides ont été les agents des forces de
l`ordre tout secteur confondus (douaniers, gendarmes et policiers nationaux et
municipaux aux différents corridors routiers d`Abidjan et sur les
marchés du district d`Abidjan). Ils ont montré un
intérêt à notre enquête, ils nous ont donné de
nombreuses informations sur les techniques utilisées (mode
opératoire) par les contrebandiers pour faire passer les marchandises et
les différents sites de prédilection dans le district d`Abidjan
où se pratique la contrebande par exemple celle de l`alcool et des
cigarettes. Cependant, pour des raisons de sécurité d`Etat, ils
ont refusé poliment qu`on participe aux opérations de nuit, ou
aux arrestations des contrebandiers en pleine activité. Ils ont
justifié ce refus par le fait qu`on ne maîtrise pas le maniement
des armes à feu et les techniques d`arrestation des délinquants.
En fait notre situation de civil et non de militaire a été
l`élément principal de cette opposition.
Les difficultés du terrain, se résume autour de
: (manque d`argent, problème de transport, difficile
accessibilité aux contrebandiers car très discrets et
difficilement visibles). On a eu à visiter les 13 communes du district
d`Abidjan.
L`on a constaté que la contrebande des marchandises
n`était pas propre à une d`entre elles précisément.
Elle touche toutes les 13 communes du district d`Abidjan sans exclusive.
Aussi, on a approché certains services officiels en
l`occurrence : (les douanes, la police économique et la gendarmerie
nationale) pour recevoir un certains nombres d`informations en rapport avec le
sujet d`étude. Nous avons su qu`avant tout, que ces services ont une
mission particulière, qui consiste à la recherche d`infractions
à caractère douanier. Ils ont en principe des missions
complémentaires, même si sur le terrain les rapports entre eux ne
pas sont assez francs et claires.
Les douanes autant que la police économique ou la
gendarmerie, se trouvent en première ligne des enquOtes
douanières c`est-à-dire aux portes frontalières
terrestres, maritimes, portuaires et aéroportuaires, mais la police
économique et la gendarmerie nationale interviennent le plus souvent au
moment de l`enquOte physique de l`inspecteur des douanes, elles font comme les
douanes des contrôles à posteriori qui consistent à
vérifier les procès verbaux de constat, (annexe 17), des agents
situés en première lignes des enquêtes
douanières.
Grâce à leurs différentes aides nous
avons su que la contrebande est la toute première infraction en
matière douanière et qu`elle représente à peu
prés 90% des dossiers à traiter. A sa suite se greffe les fausses
déclarations d`espèce et les importations sans
déclaration. Nous disons que se procurer une marchandise
étrangère sans la déclarer à une porte
douanière est une contrebande, aussi toute circulation de
marchandise sans documents justificatifs est un produit de contrebande
réprimé par
L`article 290 du code des douanes<<toute
évaluation de marchandises faite en dehors des droits de douanes :
redevance statistique, TVA ou taux de valeur ajoutée est soumise
à une amende douanière>>.
Et tout ce trafic fait perdre au moins par an plus de trois
milliards de francs CFA à l`économie nationale (source douanes
ivoiriennes). Il existe selon les services des douanes et de la police
économique trois types de contrebandes et ils tiennent comptent des
moyens humains, matériels économiques, techniques misent en ~uvre
dans la réalisation de la contrebande.
Si ces moyens sont limités on parle de contrebande de
premier type, lorsqu`ils sont plus significatifs on parle de contrebande de
second type, enfin lorsqu`ils sont sophistiqués exemple : moyens de
transports excellents (voitures, avions, bateaux) on parle de contrebande de
troisième type.
Le premier type est plus pratiqué par le bas peuple
(les pauvres), le second et dernier type est exercé par des
professionnels avec des moyens énormes à tous les niveaux
(économique, humain, et technique). La contrebande prend au fil du temps
de l`ampleur à cause des opérateurs économiques
malhonnêtes toujours qui cherchent à maximiser leur gain
financier. En ce qui concerne par exemple, les filières des cigarettes
nous avons les guinéens en première ligne du trafic, ils sont les
plus appréhendés. Quant aux filières d`alcool ce sont les
ghanéens (source police économique). Ces opérateurs
utilisent les techniques de camouflages (emballage du produit de contrebande
dans des cartons ou sacs n`ayant aucun rapport avec les cigarettes ou
l`alcool), pour faire passer leurs marchandises qui contournent les portes
douanières et atteignent le marché Abidjanais. Ce sont ces
opérateurs
économiques qui sont les grands fournisseurs mais ils
sont très mal connus tout ce que l`on sait c`est que l`arrestation d`un
grand contrebandier bloque seulement un circuit de livraison. Les entreprises
locales (SITAB, SOLIBRA) en collaboration avec les services de douanes et de la
police économique tentent de lutter contre la floraison des produits
(cigarettes, alcool) de mauvaise qualité qui inondent les marchés
provoquant la baisse de leur chiffre d`affaire. La contrebande est en
perpétuelle mutation et les instruments actuels de lutte ne peuvent rien
contre son avancée, ils sont eux même dépassés et on
chercherait plutôt à les améliorer qualitativement. Ce qui
impose une concurrence déloyale aux marchandises légales.
Après des entretiens avec certains directeurs d`entreprises
privées et d`institutions publiques. Il ressort que la contrebande a
toujours existé dans l`économie nationale. On ne peut donc pas
situer son apparition à une date précise, autrement dit la
contrebande à commencer peut-Otre avec l`essor économique de la
Côte d`Ivoire voire les années 70. L`on parlait du miracle
économique ivoirien. Seulement, depuis les différentes
conjonctures économiques des années 80 à 90
l`économie ivoirienne se fragilise et crée des pertes d`emplois.
La pauvreté se renforce, les injustices sociales aussi et à cela
s`est ajoutées les différentes crises politico militaires de (99
à 2002) qui ont abouti au coup d`état puis à la guerre.
Tous ces facteurs réunis ont rendu les
frontières du pays perméables d`où un flux de marchandises
illicites en provenance des pays voisins et plus loin les Emirats arabes unies
(Doubaï), les indes ou la chine.
Progressivement les produits de contrebande vont côtoyer
les produits licites en leurs livrant une concurrence déloyale.
Au départ stigmatisé comme les plus nombreux
dans le trafic, les immigrants en Côte d`Ivoire se sont fait rejoindre de
nos jours par de nombreux nationaux.
Ainsi la contrebande n`est plus l`affaire d`une catégorie
de population.
Elle est observable partout, dans tous les secteurs
d`activités où il y a une présence de marchandises,
où l`on peut faire un commerce, ou des échanges (sucre,
café, bois, caoutchouc etc.).
Chaque jour, des politiques de lutte s`élaborent dans les
cabinets mais la réalité sur le terrain est autre chose.
En fait la pauvreté, la situation de conflit, et de
crise à répétition n`est pas faite pour arranger les
choses. On est dans un laisser-aller dans lequel tous les coups sont permis,
où il y a de l`argent qui circule il y a corruption et de grande
tentation, c`est pourquoi il est très difficile de faire face à
la contrebande car elle arrange beaucoup de personnes tant au bas qu`au haut de
l`échelle sociale.
La contrebande tue l`économie des Etats et il faut la
combattre à travers des campagnes de sensibilisation, de prise de
conscience du phénomène, de mise en place de mesures
législatives répressives, de mise en place de mesures de
contrôle des frontières, de mise en place d`une politique
économique souple et intégrante les couches les plus faibles. Car
trop de droits et taxes de douane imposée par l`état contraignent
les populations et les encouragent à contourner les lois
économiques. Par exemple : les différents chiffres disponibles
sont les suivants : ABOBO courant 2001-2004 saisie de prés 1500 tonnes
de cigarettes et de 500 tonnes d`alcool prohibé. ADJAME on a presque le
double soit 3200 tonnes pour les cigarettes et 1150 tonnes pour l`alcool.
Yopougon 800 tonnes pour les cigarettes et 3500 tonnes pour l`alcool on voit
là qu`en moins de trois ans les saisies de cigarettes et alcool de
contrebande se chiffrent en milliers de tonnes. (Source police
économique).
Après la présentation des données il nous
faut les analyser, afin d`y apporter des critiques dans la discussion.
On a effectué des calculs, des comparaisons, des
croisements à l`aide de tableaux pour comprendre les données en
présence.
C`est à travers un travail de manipulation qui a
donné un sens à nos résultats.
Les Tableaux qui suivent récapitulent les opinions des
33 individus de l`échantillon en face de différentes variables
indépendantes qui se présentent à eux en l`occurrence :
les restrictions douanières, la
défaillance du système de surveillance des corridors routiers et
les limites réglementaires en matière de fraude
douanière.
Tous les tableaux montrent que le genre, les tranches
d`âges, le milieu socio-économique et la profession ne justifient
pas forcement le phénomène de contrebande mOme s`ils sont des
facteurs à risque. Les tableaux ont aussi servi à
démontrer que les contrebandiers ont une nette opinion et connaissance
du caractère illégal de leur activité. Enfin, les tableaux
ont servi à démontrer que sur toute l`étendue du district
d`Abidjan on observe le phénomène avec différentes
nationalités qui se retrouvent au centre de ce trafic illicite. Les
hommes ne sont pas moins contrebandiers que les femmes, les jeunes que les
vieux, les riches que les pauvres. On rencontre presque tout le monde sans
exception au centre du phénomène. Tout l`espace Abidjanais est
touché par la contrebande et les contrebandiers ont une parfaite
connaissance de l`illégalité de leur activité. Ainsi,
après analyse nous disons que la contrebande arrange une grande frange
de la population même si elle est négative pour les caisses de
l`Etat, qui doit trouver des politiques de lutte contre le
phénomène dans le but de protéger les industries locales
qui subissent une concurrence déloyale de la part des produits de
contrebande.
Tableau 4: l'acteur face aux défaillances du
système de contrôle
Variable indépendante
Variable dépendante
|
très grandes failles dans le
système de contrôle de douane ou de police
|
grandes failles dans le système de contrôle de
douane ou de police
|
petites failles dans le système de
contrôle de douane ou de police
|
TOTAL
|
|
Petite intentionnalité
|
2
|
2
|
6
|
10
|
Grande intentionnalité
|
4
|
3
|
2
|
9
|
très grande intentionnalité
|
9
|
4
|
1
|
14
|
TOTAL
|
15
|
9
|
9
|
33
|
|
Commentaire :
Le tableau 5 montre que, lorsqu`il n`existe pas de grandes
failles dans le système de contrôle aux différents
corridors routiers, l`effectif de personnes ayant l`intention de passer
à l`acte est faible soit 3 individus c`est-à-dire 2 individus
ayant une grande intention et 1 individu une très grande intention de
passer à l`acte et 6 individus ayant une petite intention.
Cependant, lorsqu`il existe de très grandes failles et
des frontières routières poreuses, (9) acteurs ont une
très forte intention de passer à l`acte, (4) ont une grande
intention et (2) ont une petite intention.
En face des grandes failles du système de
contrôle, 4 individus reconnaissent avoir une forte envie de passer
à l`acte, 3 acteurs reconnaissent avoir grande envie de passer à
l`acte et enfin 2 acteurs reconnaissent avoir moins envie de passer à
l`acte. En définitive, 23 acteurs sur 33, soit (69,69%) de
l`échantillon, reconnaissent avoir très
envie de passer à l`acte en cas de failles dans les
systèmes de contrôles routiers. 10 acteurs sur 33, soit 30,31% de
l`échantillon, reconnaissent pouvoir s`abstenir au passage à
l`acte en cas de défaillance du système de surveillance.
Opinions des acteurs confirmant le
précédent commentaire (des noms fictifs ont été
attribués aux acteurs pour respecter leur anonymat)
A la question de savoir : quelles idées, les acteurs
du phénomène se font en face de système de contrôle
en vigueur aux abords des entrées routières d`Abidjan ?
Les enquêtés donnent les réponses suivantes
:
- « Nous (Mamadou et Fulgence) reconnaissons avoir
une forte envie à opérer dans la contrebande, lorsque les failles
sont très grandes ou grandes au niveau des contrôles douaniers ou
policiers».
- « Par contre, nous (Junior et Morgan)
reconnaissons avoir moins l'envie à commettre de la contrebande et
à prendre des risques inutiles lorsqu'il existe moins de failles dans
les contrôles douaniers ou policiers et si la surveillance aux
entrées routières des différents corridors routiers du
district d'Abidjan est efficace».
- « en définitive, nous
(enquêtés) reconnaissons que plus le système de
contrôle douanier ou de police, aux différents corridors routiers
du district est efficace, moins nous avons envie de frauder les
autorités locales et par contre lorsque les contrôles ou
surveillances sont inefficaces notre envie ou appétit à passer
dans l'illégalité s'accroît énormément
».
L`analyse du tableau 5 et les paroles des enquOtés
montrent que plus sont grandes les failles dans les contrôles de douane
et de police aux frontières routières du district d`Abidjan, plus
les acteurs ont tendance à participer au phénomène de
contrebande (69,69%) de l`échantillon de 33. Et si les failles du
système de contrôle sont moindres, les acteurs ont moins envie de
participer à la contrebande (30,31 %) de l`échantillon de
33. Cette situation s`explique par le fait que, plus les
mesures de sécuritéaux entrées routières sont
efficaces, moins les individus ont envie de se
faire prendre ou tenter l`aventure. Donc ils tentent de rester
dans la légalité. Malheureusement, si les mesures
sécuritaires aux corridors routiers sont moins efficaces, l`acteur
contrebandier ne cache pas sa grande envie et détermination à se
trouver à opérer dans de la contrebande.
En définitive, nous disons que les intentions des
individus augmentent au fur et à mesure qu`ils prennent conscience de la
faiblesse du système de contrôle aux différentes
entrées routières du district d`Abidjan. Par contre, ils se
risquent moins à la contrebande s`ils ont conscience que la
sécurité est renforcée ou rigoureuse.
Considérant, l`estimation des droits et taxes de douane
comme facteur de contrebande, elle devient dans ce contexte une variable
indépendante. Ensuite la variable dépendante est le degré
de participation de l`acteur à la contrebande.
Qualification de la variable indépendante par niveau
d`estimation :
a) Droits et taxes de douane surestimés
b) Droits et taxes de douane proportionnellement
estimés
c) Droits et taxes de douane sous estimés
Qualification de la variable dépendante par niveau de
participation :
Peu de contrebande
a) contrebande occasionnelle
b) beaucoup de contrebande
Tableau 6 : Droits et taxes douane en rapport avec
l'explication de la présence de l'acteur dans la
contrebande
Estimation des droits et taxes de douane
niveau de participation des acteurs
|
droits et taxes de douane surestimés
|
droits et taxes
de douane proportionnellement estimés
|
droits et taxes de douane sous estimés
|
TOTAL
|
Effectif
|
beaucoup de contrebande
|
10
|
3
|
2
|
15
|
Contrebande occasionnelle
|
2
|
5
|
3
|
10
|
Peu de contrebande
|
1
|
2
|
5
|
8
|
TOTAL
|
13
|
10
|
10
|
33
|
Commentaire :
Le tableau 6 présent, nous montre que si les droits et
taxes de douane sont surestimés, (10) acteurs participent beaucoup au
phénomène, (2) participent occasionnellement et (1) acteur
participe peu à la contrebande.
Lorsque les droits et taxes de douane sont moyennement
estimés, on a (3) acteurs qui participent énormément, (5)
qui participent occasionnellement et (2) qui participent peu.
Enfin, en ce qui concerne les droits et taxes de douane sous
estimés le tableau présente (2) acteurs qui participent
énormément, (3) qui
participent occasionnellement et enfin (5) qui participent peu
à l`activitéde contrebande
Opinions des enquêtés sur les droits et
taxes de douane en vigueur aux différents corridors routiers
d'Abidjan
A la question de savoir quelle est leur position en face des
droits et taxes de douane, les enquêtés donnent les
réponses suivantes :
« Ma présence (Sylvie), dans la contrebande se
justifie par le fait que les droits et taxes de douane légalement en
vigueur sont surestimés, ils réduisent considérablement
mes marges bénéficiaires et si je veux m'aligner sur la
légalité je cours à ma ruine ».
«je reconnais (Sylvie), par contre au cas
où, les droits et taxes de douane sont raisonnablement appliqués,
la majeur partie d'entre nous les contrebandiers est prête à
s'aligner sur la légalité, même si je suis consciente que
malgré tous les efforts consentis par l'Etat, dans la
l'amélioration des droits et taxes de douane, certains acteurs parmi
nous continuerons dans cette activité illégale».
En analysant, le tableau 6 et les propos des
enquêtés on se rend compte que plus les droits et taxes de douane
sont surestimés, plus les acteurs sont nombreux à contourner les
mesures de contrôle en vigueur aux frontières donc à
commettre de la contrebande. Cette situation s`explique par le fait que trop de
taxe tue la taxe, comme le disent certains économistes. En fait, les
acteurs exerçants dans les secteurs d`activité liés au
trafic illicite de marchandises y sont, car ils supportent difficilement les
restrictions des droits et taxes de douane appliquées aux
frontières.
Ils trouvent que cela à une incidence sur leur
rentabilité économique. C`est pourquoi, ils mettent en place un
vaste réseau pour contourner toutes les mesures contraignantes aux
différentes frontières ou corridors routiers.
Par contre, en présence de droits et taxes de douanes
appropriées, les auteurs vont s`inscrire pour la plupart dans la
légalité, même si malgré les allègements
fiscaux, on va toujours rencontrer des contrevenants.
Considérant, la variable indépendante : application
de sanctions pénales aux infractions contrebandières. Nous allons
qualifier celle-ci :
a) Faible sanction pénale
b) Forte sanction pénale
c) Très forte sanction pénale
Considérant, la variable dépendante suivante :
degré de dissuasion de l`acteur
d) Moins dissuasif
e) Dissuasif
f) Très dissuasif
Tableau 7 : sanctions pénales en rapport
avec les acteurs
Sanctions pénales
degré de dissuasion
|
Très forte sanction pénale
|
Forte sanction pénale
|
Faible sanction pénale
|
TOTAL
|
Effectifs
|
Très dissuasif
|
6
|
5
|
1
|
12
|
Dissuasif
|
4
|
2
|
3
|
9
|
Moins dissuasif
|
2
|
1
|
9
|
12
|
TOTAL
|
12
|
8
|
13
|
33
|
Commentaire :
Le tableau 7 nous montre qu`en face d`une très forte ou
d`une forte sanction pénale, (11) acteurs se sentent très
dissuader, (6) se sentent moyennement dissuader et (3) ne se sentent pas
dissuader.
Par contre en face de faibles sanctions pénales, (1)
acteur est peu dissuadé, (3) se sont dissuadés et (9) ne se sont
pas dissuadés.
Opinions des enquêtés sur les sanctions
pénales en vigueur
A la question de savoir si les acteurs se trouvent dissuader
par les sanctions pénales et le système judiciaire ivoirien en
place en matière de contrebande, les acteurs touchés par nos
questions ont donné les réponses suivantes :
« Nous nous sentons (Konin, Eugénie, et
Amadou) largement dissuadés, si les sanctions applicables ou le
système judiciaire est rigoureux et efficace, ainsi nous revoyons
à la baisse nos ambitions ».
« Par contre, au cas où le système
pénal est défaillant, moins efficace, nous nous sentons moins
impressionner et dissuader quant au passage jà l'acte.
Nous réévaluons nos ambitions car nous savons que nous ne courons
pas de grands risques d'être appréhendés par les services
de douane, de gendarmerie ou de police, c'est le champ libre à nos
activités illicites».
Les règlements des contentieux au niveau des douanes se
font par transaction le plus souvent. Le contrebandier appréhendé
transige avec l`autorité, dans le cas où la transaction
échoue sa marchandise est vendue aux enchères ou même
détruite. Nous voyons très rarement des procédures
pénales en matière de contrebande. Mais cette situation ne nous a
pas empêché d`évaluer les opinions des intervenants de
l`enquête (propos des enquêtés ci-dessus) sur le
caractère dissuasif de l`application de sanctions pénales
à la contrebande.
L`analyse du tableau 7 et les paroles des acteurs
révèlent que : plus les sanctions pénales sont fortes,
efficaces et appliquées, moins les acteurs s`essayent à la
contrebande. Par contre, lorsque les sanctions pénales sont
insuffisantes ou même absentes et difficilement appliquées, les
acteurs s`adonnent à la contrebande à leur aise. Cette situation
s`explique par le fait que l`absence ou l`insuffisance de mesures
pénales confortent les contrebandiers dans leur trafic illicite. Ils
n`ont pas en présence d`eux une vraie politique de justice
criminelle.
En définitive, ce que l`on peut retenir dans cette
analyse, c`est qu`un contrebandier n`a pas d`éthique. Très
souvent, il est moins condamné par la société,
différemment de d`autres types de délinquants. Cette attitude
sociale semble être une caution morale donnée par la
société au contrebandier. Son activité est du domaine
d`une économie souterraine qui évolue à côté
d`une autre économie officielle.
Malgré que l`acte de contrebande à des
incidences regrettables sur l`économie, tout le monde semble se faire
complice du phénomène soit par la demande ou par l`offre de
marchandises de contrebande qui va toujours croissant.
C) Illustrations de la contrebande a travers les
propos de certains enquêtes d'Adjamé roxy
RUBRIQUE 1 : raisons explicatives de leur
présence dans la contrebande
A la question de connaître les motivations des
enquêtés, pour ce qui peut expliquer leur présence dans
cette activité, nous avons reçu comme réponse de Madame
Awa Coulibaly de nationalité Burkinabé,
résidant à ATTECOUBE : « je n'ai subi aucune contrainte
à exercer la contrebande de cigarettes ; je l'exerce volontairement
».
Pour madame NAGALE, ivoirienne et originaire de
Touba :
« Je suis contrebandière par
nécessité économique, je suis présente dans cette
activité depuis le déclenchement du conflit armé en
Côte D'Ivoire (19 sept 2002) ».
On voit bien que les motivations des sujets à
l`étude sont différentes les unes des autres. Cependant, ce qu`il
y a à retenir c`est que ce n`est pas la pression extérieure qui
est la cause exclusive de leur participation au phénomène de
contrebande.
ELO Amy, malienne d`origine explique sa
présence à ROXY (marché à ciel ouvert où
cigarettes de contrebande côtoient médicaments prohibés)
: « j'aide ma grande soeur qui est la vraie propriétaire des
marchandises ; je justifie ma présence ici à cause du manque
d'emploi ».
RUBRIQUE 2 : Les techniques d'approvisionnement
des intervenants
A la question de savoir qui sont leurs fournisseurs, les
enquêtés orientent leur doigt accusateur vers de grands
trafiquants disséminés sur tout l`étendue douanier
d`Abidjan et très mal connus.
A la question de savoir comment s`effectuent les
opérations d`échanges, certains sujets disent contacter
eux-mêmes leurs fournisseurs par contre d`autres affirment le
contraire.
A la question de savoir d`où viennent les produits de
contrebande les enquêtés pointent du doigt les pays limitrophes et
vont plus loin en indiquant les Emirats Arabes unis (Doubaï), la Chine,
les Indes etc.
RUBRIQUE 3 : connaissance du phénomène par
des acteurs
A la question de savoir si les sujets pensent se reconvertir,
tous ont répondu par l`affirmatif : Madame Coulibaly en exemple :
«je pense vendre des pagnes », Mlle ZERBO
(Burkinabé) ; « je vais me reconvertir en gérante de cabine
téléphonique qui était mon ancien métier
».
Quant à la question de savoir si les
enquêtés connaissent le caractère illégal de leur
activité, ils ont répondu par l`affirmatif : Madame
NAGALE Ivoirienne : « je reconnais vendre des cigarettes de
contrebande, mais comment faire si je n'ai rien d'autre à faire ?
».
A la question de savoir les marques de cigarettes les plus
fraudées, par ordre On a : Excellence 4500fcfa le
prix légal et 3000fcfa celui de contrebande, DUNHILL
9200 FCFA la cartouche légale et 7000fcfa celle de contrebande,
CRAVEN (A) 6500 FCFA la cartouche légale et 5000f cfa
celle de contrebande.
RUBRIQUE 4 : Opinion des acteurs sur
l'efficacité du système de contrôles
A la question de savoir si elles sont contrôlées
par des agents de police ou de douane ou tout autre inspection de
contrôle assermenté, elles ont répondu que cela se fait
rarement et dans le cas où la situation se présentait, elles se
cotisaient pour soudoyer les agents.
A la question de savoir qui sont leurs clients, les
enquêtés ont répondu que toutes les catégories de
populations sont concernées (jeunes, femmes, hommes, vieux, fumeurs,
policiers, etc.).
Nous aurons à présenter maintenant le terrain
d`étude, la population d`enquOte et l`échantillon.
A la suite de notre illustration ci-dessus, nous
présentons les causes, les mesures en vigueur, les manifestations et
conséquences de la contrebande au plan international, national et au
plan local pour ce qui concerne le district autonome d`Abidjan.
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