b) Position du débat chez les universitaires
gabonais
Nous commençons notre discussion avec Germain OWONO
ESSONO qui a commis un mémoire au département de sociologie qui
s'intitule « le sexe et la mort ou la dénégation politique
du sida au Gabon : pour une analyse de contenu des images de 1986 à
2005112». Il s'inscrit dans un champ théorique
althussérien qui met à jour le rôle des appareils
idéologiques d'Etat dans le procès économique et politique
dans le but du contrôle de la conscience collective. Son terrain
d'étude a été Libreville. La réflexion sur `'le
sexe et la mort ou la dénégation politique du Sida au Gabon :pour
une analyse de contenue et des images sur le Sida de 1986 à 2005»
menée par Germain OWONO ESSONO montre comment le discours de l'Etat a
progressivement changé. En effet, un le discours politique disait que le
gabonais était naturellement immunisé contre le VIH/SIDA. Il,
s'agissait de rassurer la conscience collective .Cependant, Cette pseudo-
« immunité naturelle » n'a fait qu'augmenter le taux de
séroprévalence considérablement, ramenant logiquement
l'Etat vers une réalité celle de l'existence de la maladie.
Immédiatement le discours a changé pour alerter l'opinion quant
au danger de contamination durant les rapports sexuels par le VIH/ SIDA. En
cela, les spots publicitaires et les tags sur les murs des écoles, des
hôpitaux, des ONG, pour ne citer que ceux-là, ont servi à
faire naître le mot prévention dans le comportement sexuel des
Librevillois. Ceci nous permet de comprendre, à partir de notre travail,
comment l'image et la peur du VIH/Sida servent l'Etat afin, comme une
propagande, de mieux vendre le préservatif. En outre il permet de
comprendre comment les représentations sociales du Sida peuvent aggraver
une épidémie. Les images, par les médias (presse
écrite ou
111 Florence BERNAULT, Op cit, p 101.
112 Germain OWONO ESSONO, Le sexe et la mort ou la
dénégation politique du Sida au Gabon : pour une analyse de
contenue et des images sur le Sida de 1986 à 2005,
Libreville, UOB, Département de sociologie, 2005.
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télévisée, bande
dessinée113) servent à produire un rapport
illusion/allusion qui occulte la réalité du sida au Gabon. Il y a
une construction médicale du Sida qui permet de conscientiser les
individus.
Ce mémoire nous permet d'avancer sur la construction de
notre analyse. En fait, la dénégation politique ne nous
intéresse pas à proprement parlé. C'est plutôt la
qualité des données de terrain de ce mémoire qui vient
rejoindre notre analyse. En effet, les images ou les tags qui figurent ici et
là à travers la capitale nous illustre assez bien les
représentations sociales métaphoriques du Sida. Il y a une image
qui précise bien que « le sida ce n'est pas la sorcellerie ».
Si tant est le besoin de briser ce mythe, c'est pour cause d'idées
préconçues créée par les MHSB et la religion. Ceci
revient à dire que ces deux « organes " participent à
l'occultation biomédicale du Sida au Gabon. Toute cette occultation est
alors relayée par la politique dans des discours (pour le cas du
mémoire de germain OWONO ESSONO) qui consiste à faire croire que
le gabonais est « naturellement immunisé contre le Sida ". Nous
retenons de cette discussion avec notre auteur qu'il y a bien présence
d'images, de représentations, de métaphores sur le Sida au Gabon.
Et que les iconographies qui parcourent la ville sont des
révélateurs de la violence de l'imaginaire et du sens dans notre
société gabonaise.
Pour sa part, le travail de Perrin- Herman IKOUBANGOYE
intitulé Religion et maladie : le traitement pentecôtiste du Sida
à Libreville (Gabon)114 nous a aussi intéressé.
Il s'inscrit dans un cadre théorique du structuralisme
matérialiste, donc althussérienne, et son champ d'étude
est Libreville. Son hypothèse principale s'articule autour du fait que
les pasteurs pentecôtistes s'opposent à la conception scientifique
du Sida en pratiquant la guérison divine sur la base d'une double
opportunité : d'un côté, le pouvoir idéologique
propre à l'Appareil Idéologique d'Etat (AIE) qui a une emprise
sur les esprits des malades désemparés. De l'autre, les logiques
du marché capitaliste des soins et la précarité
matérielle qu'elles produisent et exacerbent.
Dans ce mémoire nous retrouvons le corolaire
d'expression qui représente la maladie du Sida dans le milieu religieux.
Notamment le terme très récurent de punition divine. Mais il y a
bien plus. En fait notre auteur démontre comment la religion construit
le terme de punition divine. Et en fait, ce qui a lieu de retenir c'est que les
pasteurs la construisent ainsi à des fins capitalistes. Leur
désir est de faire croire, d'allusionner et d'illusionner les
fidèles sur un prétendu pouvoir qu'ils ont de guérir le
Sida par le « tout puissant nom de Jésus-Christ ", ainsi que par la
puissance des portes-feuilles des fidèles. Or, ce Sida n'est pas une
punition divine mais bien une maladie biomédicale. Il
déconstruise le Sida biomédicale et le reconstruise en Sida
religieux, en Sida imaginaire. En suivant l'analyse de Perrin-Herman
IKOUBANGOYE, le Sida comme punition divine n'est qu'une supercherie
capitaliste. Le
113 Parmi ces bandes dessinées nous rappelons celle
parut dans les années 1990 intitulée « Yannick NDOMBI ou le
choix de vivre » publié par le PNLS et ayant le soutien de l'OMS,
ou encore Le livret d'information publié en 2006 par le même
PNLS.
114 Perrin- Herman IKOUBANGOYE, Religion et maladie : le
traitement pentecôtiste du Sida à Libreville (Gabon),
Libreville, UOB, Département de sociologie, 2007.
capitaliste se sert des imaginaires, des
représentations sociales pour se faire du profit. Nous avons à
cet effet une brèche qui peut servir à notre analyse. Notamment,
le fait que le capitalisme soit une des raisons qui justifie la présence
de la forte utilisation de métaphores et de métonymies pour
décrire la maladie du Sida. La maladie et plus particulièrement
la maladie du Sida est comme un gâteau. Chaque composante de la
société veut sa part. Pour ce faire, les MHSB ou la religion se
servent de la violence du sens et de la violence de l'imaginaire pour pervertir
les idées biomédicales d'une maladie à des fins
capitaliste.
Notre discussion se poursuit avec Max Alexandre NGOUA
115 . Ce mémoire à la particularité d'avoir
pour champ d'étude Bitam et de suivre le cadre méthodologique du
matérialisme historique. Il s'intéresse à la pratique de
la sorcellerie du Kôhng dans une ville frontalière du Cameroun et
de la Guinée-Equatoriale. Le propre de cette pratique est de capturer
las âmes d'individus par le moyen de la sorcellerie. C'est
généralement au moyen d'une boîte en argent ou en or dans
laquelle sont disposée des miroirs. Pour lui, « les
commerçants et les politiciens recouvrent tous au Kong, les uns pour
enrichissement rapide, les autres pour conquérir ou conserver le
pouvoir116». Mais ce qui nous intéresse c'est le moyen
par lequel l'auteur décrit comment on inocule le Sida mystiquement
à un individu. Max Alexandre NGOUA dit que les « détenteurs
de ce type de sorcellerie peuvent mystiquement prendre le sang d'un
séropositif pour l'inoculer à un homme sain, dans le dessein de
nuire à ce dernier117». Ce qui revient à dire que
le Sida est une maladie que l'on peut envoyer par le Kôhng d'oü la
présence des métaphores sur le Kôhng au sujet du Sida.
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