3) Le syndrome inventé pour décourager les
amoureux : le Sida dans les années1990
Le syndrome inventé pour décourager les amoureux
est une métaphore de la maladie du Sida qui est née dans le
début des années 1990. Cette figure de style est un
euphémisme aussi bien qu'une ironie. Nous avons trouvé cette
représentation dans une bande dessinée intitulée
Yannick Ndombi ou le choix de vivre 207 . Dans cette bande
dessinée, l'auteur présente les différentes
représentations qui sont attribuées au Sida dans le début
des années 1990. Cette période est propre au moment ou
l'itinéraire du Sida est à son stade exponentiel. C'est la
période oü le Sida est entrain de prendre de l'autorité dans
les consciences collectives et individuelles comme agent mortifère.
C'est la période oü « chaque époque, chaque
société est littéralement hantée par un certain
type de maladie (...) et développe une certaine conception de
l'étiologie208». Curieusement, les débuts de la
prévention du Sida au Gabon sont des moments difficiles, qui ne sont
rendu complexe que par la seule puissance des corollaires des
représentations sociales que nous identifions dans ce propos, entre
autre, comme les métaphores du Sida.
La prévention du Sida au Gabon s'est heurtée
à cette grande nuit dans laquelle sommeille toutes les
sociétés postcoloniales. Une nuit idéologique. Un sommeil
qui s'effectue par la violence de l'imaginaire et du symbole. Dans le cas
spécifique de la maladie du sida, les métaphores, et d'une
certaine manière toutes les représentations sociales, sont cette
grande nuit idéologique dans laquelle la maladie biomédicale est
plongée au Gabon. Alors, le syndrome inventé pour
décourager les amoureux, un euphémisme patent et notoire, est une
ombre qui vise à dissimuler non plus seulement l'ignorance mais surtout
la peur. Car, lorsque les génies de la « terre bénite »
ont abandonné leurs enfants, la peur s'empare des consciences
individuelles jusqu'à créer des fictions qui ont pour intention
de rassurer par la force de l'euphémisme qui n'est autre qu'une violence
de l'imaginaire. Plus simplement, l'expression syndrome inventé pour
décourager les amoureux est un euphémisme qui vise à
atténuer la peur que les populations ont vis-à-vis de la maladie
du Sida. En ce sens que, l'Etat (et la biomédecine) n'a trouvé
aucun remède contre le Sida et que le seul moyen qu'il préconise
c'est des recommandations par le moyen de la prévention.
207 FARGAS, Yannick NDOMBI, ou le choix de vivre, Libreville,
PNLS, 1991.
208 Francois LAPLANTINE, Anthropologie de la maladie,
Paris, Editions Payot, 1992, p 117.
Dans la société de la grande nuit, où les
espaces hétérotopiques sont les pourvoyeurs magistraux des
représentations sociales de la maladie du Sida, le syndrome
inventé pour décourager les amoureux est une expression qui vient
illustrer le fait selon lequel la maladie « appréhendée
comme hasard ou comme nécessité, comme innée ou
accidentelle, (...) est toujours extérieure à l'individu
lui-même.209" Le Sida est une devenu une ombre de la grande
nuit. Cependant, cette maladie est biomédicalement réelle, donc
est une maladie du « jour ", de la réalité. Dès que
le sens est corrompu par les mots, les représentations sociales
c'est-àdire les métaphores, la nuit s'installe et pervertie les
faits réels en faits irréels ; des faits de la grande nuit dans
lesquelles la peur créer ces ombres du spectre qui ne sont que les
métaphores de la maladie du Sida.
Lorsque nous diligentons les figures de styles de la maladie
vers l'analogie, vers la métaphore, l'euphémisation de la maladie
du Sida, il va se créer des mots ou expressions qui peuvent se
décrire sous les termes, maladie du siècle, la grande maladie ou
les quatre lettres. En ces termes nous pensons que, « la pratique
médicale était étroitement lié à la culture
et à l'époque dans laquelle elle s'inscrivait, [et] n'arrive
jamais à s'affranchir soit de la superstition religieuse, soit de la
superstition philosophique [ et populaire]210."
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